AFRIQUE :: Emmanuel Gnapele raconte: A la conquête de sa destinée :: AFRICA
© Correspondance : palabresintellectuelles@gmail.com | 22 Apr 2025 14:37:40 | 852Dansi et son petit frère Macaban l’avaient compris bien assez tôt, que le destin a beau être tracé, encore faut-il suivre ses traces, aller à sa rencontre. Ils n’avaient pas attendu d’être de grands garçons pour s’en aller, à la conquête de la destinée.
Orphelins de mère, maltraités par leur marâtre, les deux fils de Mpidi n’en pouvaient plus. Partir. Ils étaient partis, après la fessée de trop, administrée par la marâtre au benjamin. La fugue avait été planifiée dans la nuit par les deux frères et mise à exécution dès le premier chant du coq. L’école, l’envie, l’irrésistible envie d’aller à l’école et pouvoir ainsi mieux gagner sa vie, c’était là leur principale motivation.
Dans ce pays, ce village-là, l’école était regardée d’un mauvais œil par les parents ; en fait, on soupçonnait l’école de « tuer » les enfants. Une vraie caverne de Platon, que cette contrée. La première préoccupation du roi était de maintenir son peuple dans l’obscurantisme, œuvrer toujours pour l’empêcher de prendre conscience de l’esclavagisme qu’il lui faisait subir, sous l’œil indifférent et peut-être complice du pouvoir central. Emmanuel Gnapele le dit et réitère dans son récit, A la conquête de sa destinée (pp. 78, 134) : « Mal informé on est esclave et bien informé, on est libre » ; « Et à l’école, on apprend à lire, à écrire, à écouter et à comprendre, par conséquent, elle nous donne les moyens de mieux nous informer et d’aspirer à la liberté. »
Cette première partie du livre n’est pas sans rappeler certains classiques mettant en scène des enfants (La vie devant soi de Romain Gary) ; des enfants fuyant pour leur vie ou simplement à la recherche d’un mieux-être (Un sac de billes de Joseph Joffo). C’est aussi la partie que les amateurs de littérature bucolique apprécieront le plus, car les deux enfants cheminent tout au long de la campagne, de village en village, avant d’atteindre la ville, où se trouve l’école (ou plutôt les écoles) que le roi de la localité d’où viennent les deux enfants a diabolisée chez lui, au sein de ses populations. Fermons les yeux, rêvons de la campagne avec Emmanuel Gnapele : « Pendant la nuit les herbes et les arbustes qui bordaient le sentier avaient perdu leur chaleur par radiation, en refroidissant, ils rafraîchissaient l’air alentour jusqu’à atteindre le point de saturation et la vapeur d’eau s’était condensée en rosée. Cette rosée aspergeait les pieds nus des enfants et les bras croisés sur la poitrine de leur torse nu. Les matériels étaient liés et posés en équilibre sur la tête. La fine couche de terre du sentier collait aux pieds mouillés des enfants. Ils marchaient silencieux, sous la menace du froid du petit matin. Peu à peu, l’obscurité disparaissait et faisait place à la lumière. Dansi et son petit frère pouvaient se réjouir du bain du soleil matinal. Ils étaient presque arrivés au champ. Toute la brousse était calme. On ne pouvait imaginer la présence d’un être humain. Seuls les cris des oiseaux et les bruissements des rongeurs, venus déterrer les graines d’arachides et picorer le mil étaient perceptibles. »
« faisait place à lumière... ». Enfin, la ville, cette « forêt illuminée », paradis des opportunités, où la chance sourit aux âmes bien nées. Comme par enchantement, la toute première personne qui s’intéresse aux deux petits villageois égarés vadrouillant dans la rue est un… directeur d’école. Le directeur les recueille, les emmène chez lui, leur ouvre sa maison, son foyer, mais aussi son école. Dansi et Macaban ont une nouvelle famille : un papa, une maman, des frères et sœur. Les conditions sont désormais réunies pour leur épanouissement.
A partir de là, rien n’arrête plus les deux frères, Dansi et Macaban. Ils travaillent bien à l’école, réussissent aux examens, aux concours : Secondaire, Université, études à l’étranger par obtention de bourse, retour au pays, entée dans l’Armée pour l’un, Enseignement pour l’autre, puis début de carrière politique pour Macaban, leader charismatique, élu bientôt député de la nation… C’est là que les problèmes commencent, avec la politique. Macaban arrive avec des idées-lumière, il veut sortir les siens des ténèbres dans lesquelles ils croupissent depuis longtemps. Il propose le changement, s’oppose au parti au pouvoir, au statu quo, et donc aussi au roi de la contrée. Il y de la tension dans l’air, ça va très vite, le récit aussi. D’une ligne à l’autre on peut faire un bond de dix ans. Il faut s’accrocher, sinon on perd le fil. Emmanuel Gnapele est de ces auteurs qui n’ont pas de temps à perdre. La description, oui, si nécessaire ; il faut courir sans cesse pour rattraper les héros et notamment Macaban, qui va de plus en plus vite à mesure que l’histoire évolue… vers la fin. Et quelle fin ! Vous allez être surpris.
Il y a derrière ce beau récit une triste réalité bien connue en Afrique, ignorée par les autorités administratives, et qu’il serait peut-être temps de considérer avec un peu plus de sérieux. Dans certaines régions, le chef ou le roi d’un village ou d’une localité est pour ainsi dire le dieu sur terre. Son pouvoir sur ses sujets passe avant celui des représentants de l’Etat, qui n’y voit vraisemblablement pas d’inconvénient, du moment que le roi œuvre pour asseoir le monopole du parti au pouvoir dans son territoire.
D’un autre côté, Emmanuel Gnapele à travers le parcours de ses héros semble appeler les enfants d’Afrique au travail, le présentant comme la clé du succès dans une société et même à l’échelle individuelle. Le travail change un homme, comme il a changé Macaban. Le travail peut aussi changer un pays, un continent, comme il a changé la Chine.
Et justement, l’Afrique a besoin de changement, dans le sens positif du terme. Plus d’esclavagisme dans nos villages, plus d’abus d’autorité de la part des chefferies traditionnelles, plus d’insécurité, de coupeurs de route, plus de corruption, plus de laxisme dans nos hôpitaux et autres services publics, plus de malversations, etc.
A la conquête de sa destinée d’Emmanuel Gnapele se résume en un mot : changeons !
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