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CÔTE D'IVOIRE :: Comme le dit un proverbe africain : Ma grand-mère me disait… :: COTE D'IVOIRE

« Le zèbre ne se défait pas de ses zébrures », clamait Senghor pour justifier les fondements de son concept de la Négritude. En réaction, Wolé Soyinka lançait que « le tigre ne proclame pas sa tigritude, il bondit sur sa proie et la dévore ». Lequel de ces deux sages africains avait raison, là n’est pas la question ; le fond du débat a certes fait couler beaucoup d’encre, mais ici, c’est la forme qui nous intéresse. Car c’est ainsi, par de telles allégories, de telles paraboles, de tels proverbes, que nos grands-parents et aïeux tenaient discours et palabres, dispensaient leurs enseignements et véhiculaient la sagesse, la sagesse africaine aujourd’hui en déperdition, pour ainsi dire. L’école occidentale ne nous a pas fait que du bien, elle a relégué notre culture au dernier rang. Il y a urgence, il faut revaloriser la dialectique africaine, l’art et l’imagerie fabuliste qui font la richesse de sa rhétorique, inspirent l’éloquence de son oralité. Il y a urgence, disions-nous, certains intellectuels africains l’ont compris, à l’instar de l’écrivain ivoirien Fodjo Kadjo Abo, qui nous présente en deux tomes l’héritage proverbial de la tribu Abron de Côte d’Ivoire, dont il est originaire.

En 2021, Palabre Intellectuelle s’est fait l’écho d’un ouvrage de Fodjo Kadjo Abo intitulé Mon grand-père me disait…, notamment dans un article publié sur la toile sous le titre Invitation au village : La maxime du palmier à huile. Nous découvrions alors dans ce livre le jeune Koffi Adoum, imbu du savoir occidental et des connaissances académiques, mais aussi conscient de ce qu’en matière de sagesse africaine il lui restait encore beaucoup à apprendre. C’est ainsi qu’avec son doctorat en Sciences politiques tout fraîchement décroché, il s’en ira passer un mois de ses vacances à Adoumkrom, son village natal, où son grand-père décide de lui dispenser des leçons de vie pratique, à mille lieux de la logique virtuelle enseignée dans les amphithéâtres. C’est au total trente-deux proverbes qui seront développés par le grand-père, à l’intention de Koffi mais aussi du lecteur. Puis en 2025, Fodjo Kadjo Abo nous revient avec un second recueil de proverbes abron intitulé Ma grand-mère me disait… Si le précepteur a changé, l’apprenant reste le même, le jeune Koffi en l’occurrence. Le grand-père ayant tiré sa révérence (pour de bon), la grand-mère a pris le relais. Au programme, trente-deux nouveaux proverbes abron viennent enrichir le répertoire du jeune Koffi en la matière, savamment développés par Nanan Adjoa Tabia, la grand-mère de Koffi.

« L’humanité traverse une crise de sagesse qui me semble être à l’origine de la plupart des maux dont nous souffrons. Nombre d’échecs et d’ennuis que nous connaissons viennent du fait que les vertus et la morale ne président pas toujours à nos actions. En somme, tant de malheurs nous accablent ou arrivent à d’autres par notre faute, parce que nous nous permettons des actes contraires au bon sens et à la raison. » Ainsi parle Fodjo Kadjo Abo à l’entame de son ouvrage. Qu’est-ce qui peut expliquer cela, c’est ceci : « La poule connaît le lever du jour, mais elle laisse au coq le soin de l’annoncer. » Il n’y a pas à redire, cette maxime abron est la première que nous apprend Nanan Adjoa Tabia dans Ma grand-mère me disait…, ces mots sont d’une pertinence proverbiale, d’une portée universelle. On retrouve certainement cette maxime dans d’autres cultures, déclinée différemment mais voulant tout simplement dire qu’il appartient à la terre de tourner autour du soleil et non le contraire. Qu’il y a un temps pour tout, et c’est écrit. Qu’à partir du moment où les choses ne sont plus à leur place, que plus personne ne joue sa partition, alors le 9 devient 6. C’est le monde à l’envers. Le monde s’écroule (Things fall apart) – la formule prophétique de Chinua Achebe revêt ici tout son sens.

C’est ainsi qu’aujourd’hui où tout semble aller de travers, Fodjo Kadjo Abo nous rappelle à l’ordre ; l’ordre, ordonné, comme dans « l’ordre des choses » ; mais aussi l’ordre, synonyme de paix, comme dans « l’ordre règnera ». Si le modernisme peut se vanter d’avoir apporté plus de confort matériel dans nos vies, il a en revanche corrompu les bonnes mœurs et préparé le terrain à des courants de pensée révolutionnaires et rebelles qui ont mis la sagesse en déroute. Et nous payons le prix fort : chaque jour qui vient, le monde se porte moins bien que la veille. Si la société va mal, l’individu peut-il mieux se porter ? Réponse de Krisnamurti : « Ce n’est pas un signe de bonne santé que d’être bien intégré dans une société malade ». Le remède à cela, c’est qu’il faut retourner à la conscience collective qui sous-tend l’égrégore de nos ancêtres, et dont les proverbes constituent en partie le socle des enseignements (avec les contes).

Donc, oui, il faut encourager et féliciter des initiatives comme celle de l’écrivain ivoirien Fodjo Kadjo Abo, qui a pris le temps de traduire et coucher dans un ouvrage en deux tomes soixante-quatre proverbes du peuple Abron. On n’en sort pas moins intelligent. Après lecture de ces deux livres, on est plus prompt à parler et raisonner en images à la manière de nos grands-parents, inspirateurs de Senghor et Wolé Soyinka comme nous l’avons vu plus haut. Plutôt que de citer des philosophies étrangères et parfois hostiles à nos réalités. Et c’est cela, la voie royale pour l’aliénation culturelle, la source même de nos malheurs. La grand-mère de Koffi nous l’apprend, que « c’est quand on secoue le basilic qu’on sent son odeur ». L’apparence est trompeuse. Le basilic, cette plante attrayante à vue d’œil couve une odeur nauséabonde qui se dégage quand on la secoue. L’école occidentale aussi, qui nous a longtemps paru vierge de tout défaut, a fini par nous révéler son vrai visage une fois que nous l’avons secouée. Le vin est tiré, mais nous pouvons ne pas le boire, puisqu’il a été tiré par erreur, pour ainsi dire. Et voici, un proverbe abron nous l’apprend : « On ne dépèce pas par erreur un animal abattu par erreur. » Tout est dit… dans la sagesse africaine.

Nous nous en voudrions de sortir de cette promenade littéraire sans saluer avec des acclamations la distinction honorifique du poète camerounais Merhoye Laoumaye, qui représente bien son Garoua natal, en prose comme en vers. Le Laurier-Vers vient de lui être décerné par le collectif Reading is so Bookul, comme un hommage bien mérité pour sa poésie. Cette poésie qui nous est si chère à nous, le Club des muses. Nous avions il y a quelques années découvert la plume du poète Merhoye Laoumaye à l’occasion d’un passage dans la ville d’Ebolowa, dans les rayons de la bibliothèque de la Maison de la Culture Québec-Cameroun. Monsieur Joseph Tounssi, le responsable de la Maison, nous avait alors fortement recommandé la poésie de Laoumaye, qui se déclinait dans deux recueils : Le silence se tait, La cloche et le tympan. Et c’est avec plaisir que nous sommes allés à la rencontre du poète, à travers ses écrits, ses vers polyvalents, qui savent célébrer la nature, les choses et les moments en revêtant toujours le costume qui sied à la danse, fusse-t-elle articulée sur une cadence d’émotion, de contemplation ou d’indignation. En sus, Merhoye Laoumaye est aussi un fervent défenseur des causes africaines, tout comme l’écrivain ivoirien Fodjo Kadjo Abo.

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