Je reviens du Gabon! Un peuple s’est levé,pendant que le Cameroun s’enlise dans la tribu :: CAMEROON
© Correspondance : Pierre Laverdure OMBANG | 16 Apr 2025 08:10:02 | 1501Je reviens du Gabon. Et ce que j’y ai vu m’a remué. Ce n’est pas seulement la beauté tranquille du littoral gabonais, ni les sourires pleins d’espoir que l’on croise dans les rues de Libreville. C’est ce frisson collectif, ce souffle nouveau que l’on sent, presque physiquement, dans l’air. Un peuple s’est levé. Un peuple a décidé d’écrire une autre histoire. Une histoire sans la tribu au centre.
Ce que le Gabon a réussi en quelques mois, c’est une mutation politique et psychologique rare sur notre continent. Ce pays, longtemps dirigé par une même famille depuis 1967, a connu le choc d’une transition brutale. Mais la surprise, ce n’est pas la chute d’Ali Bongo. C’est ce qui a suivi : le dépassement pacifique des appartenances tribales pour faire nation. Une prise de conscience nationale qu’il fallait tourner la page, ensemble, sans chercher un sauveur ethnique, sans replonger dans les vieilles fractures.
J’ai écouté des commerçants fang, des fonctionnaires nzébi, des jeunes activistes punu. Aucun ne m’a parlé de son ethnie comme d’un totem politique. Tous parlaient du Gabon, de la justice, de l’État, de la nation. Tous avaient compris que la vraie fracture, aujourd’hui, n’est plus entre groupes culturels, mais entre une minorité accrochée au pouvoir et un peuple qui aspire à la dignité.
Et dans cette dynamique, c’est presque naturellement que le général Brice Clotaire Oligui Nguema s’est imposé, non pas en tant que représentant d’un groupe ethnique ou d’un réseau militaire, mais comme un visage nouveau capable de faire rupture. Ce que le peuple gabonais a voulu, c’est un président, pas un cousin. Un dirigeant pour le pays, pas pour la région.
C’est ce dépassement que je ramène avec moi au Cameroun. Et c’est là que le contraste fait mal.
Chez nous, au Cameroun, la tribu n’est pas seulement une réalité culturelle, elle est devenue la colonne vertébrale du système. Depuis l’arrivée au pouvoir de Paul Biya en 1982, les clivages ethniques ont été entretenus, cultivés, institutionnalisés. Sous couvert d’équilibres régionaux, c’est un modèle d’exclusion silencieuse qui s’est construit. Les postes clés de la République sont souvent distribués selon des critères d’appartenance plus que de compétence. Le débat public est miné par des suspicions ethniques. La critique politique est perçue comme une attaque contre un groupe. Le mérite est étouffé par l’allégeance.
Le Cameroun est devenu un archipel de tribus méfiantes, chacune protégée par ses élites, repliée sur ses blessures, et hostile à tout projet commun. Pire encore, le pouvoir a appris à jouer de ces divisions pour régner. Pendant que les citoyens se soupçonnent entre eux, les vrais maîtres du jeu consolident leur emprise. C’est un théâtre cruel, où l'on met en scène l’unité tout en creusant la fracture.
Ce tribalisme n’est pas un folklore bénin. C’est un poison lent qui tue la nation de l’intérieur. Il mine l’éducation, la justice, l’administration. Il empêche les meilleures énergies de s’exprimer. Il fait de l’État un gâteau à partager entre initiés au lieu d’un projet à construire ensemble. Il empêche l’alternance, parce qu’il transforme chaque élection en affrontement communautaire.
Et pourtant, ce n’est pas une fatalité. La preuve : le Gabon. Rien ne prédestinait ce pays à réussir un tel saut. Mais il l’a fait. Parce qu’un moment est venu où la conscience nationale a supplanté les réflexes identitaires. Parce qu’un seuil de souffrance a été atteint. Parce que le peuple a compris que le vrai ennemi n’était pas le voisin d’une autre tribu, mais le système qui les enfermait tous.
Le Cameroun peut apprendre du Gabon qu’aucune réforme n’est possible sans un sursaut collectif. Que le changement ne viendra ni d’un homme providentiel, ni d’une ethnie dominante, mais d’un peuple qui accepte de se voir d’abord comme citoyens, égaux en droits et en devoirs.
Il faut briser le tabou du tribalisme. En parler franchement. Dénoncer ceux qui l’utilisent pour prospérer. Et surtout, éduquer notre jeunesse à penser en termes de nation et non de clans. Car aucun avenir n’est possible dans un pays où les diplômes se confrontent aux patronymes, où les régions s’affrontent au lieu de s’unir.
Je reviens du Gabon. Et j’y ai vu un miroir. Un miroir tendu au Cameroun. Le reflet d’un possible. Le reflet d’un réveil. -Reste à savoir si nous aurons, nous aussi, le courage de regarder en face.-
Lire aussi
Élections au Cameroun : La surveillance des votes est-elle efficace face aux fraudes présumées ? :: CAMEROON
CAMEROUN :: Campagne électorale de Paul Biya : Le ministre Nganou Djoumessi booste les infrastructures à l’Est :: CAMEROON
Je reviens du Gabon! Un peuple s’est levé,pendant que le Cameroun s’enlise dans la tribu :: CAMEROON
CAMEROUN :: L’INTELLECTUEL DANS UN ÉTAT EN CRISE: En réponse au Prof Édouard Bokagné :: CAMEROON
Travailleurs Étrangers Clandestins au Cameroun : Un Manque à Gagner de 60 Milliards par An :: CAMEROON
LE DéBAT
Afrique -Débat: Pourquoi la crise anglophone persiste au Cameroun? :: AFRICA
AFRIQUE :: Divorces dans la diaspora camerounaise en Europe : explications ? :: AFRICA
AFRIQUE :: Quand est-ce les Camerounais prendront enfin leurs responsabilités pour la gestion de leur équipe? :: AFRICA
Afrique : Quel droit à l'image pour les défunts au Cameroun ? :: AFRICA
Canada - Cameroun, Liberté de manifestation partisane au Cameroun : Encore une incurie liberticide de Biya Paul ?
POINT DU DROIT
CAMEROUN :: La problématique du changement de nom en droit comparé :: CAMEROON
Les étapes et les frais de procédure du morcellement d'un terrain au Cameroun :: CAMEROON
L'obtention d'un titre foncier au Cameroun à l'issue d'une vente de terrain :: CAMEROON
Le jugement supplétif de rectification d'acte de naissance au Cameroun :: CAMEROON
CAMEROUN :: La procédure d'achat d'un terrain titré dans la ville de Yaoundé :: CAMEROON
partenaire
Vidéo de la semaine
Calvin DJOUARI; Ecrivain et Romancier, invité Sopieprod
Dr. Ing. BRICE NYA invité Sopieprod depuis Hambourg
Florida explique son engouement autour de l'AUTISME
ESPO DEUX BEN A NIORT A L'OCCASION DE LA JOURNEE DES FEMMES Mars 2025
LA CULTURE BAMOUN S'INVITE A TOURS
Vidéo
Fadimatou Iyawa à Bruxelles : sa colère contre la BAS et son déni de nationalité
59è Fête de la Jeunesse : Conseils d’un Aîné avec Me Charles Epée | Paix & Développement
Plongeon au cœur du SIBCA 2024 : Les coulisses du salon de la beauté afro
Cabral Libii : Son livre choc sur le Cameroun nouveau - Révélations exclusives à Bruxelles !
SIBCA 2024 : Le Plus Grand Salon de la Beauté Afro à Bruxelles !
il y a une semaine
CAMEROUN :: Braquage de Nkol Afamba : Le gendarme Yemele Gildas se rend avec une partie du butin :: CAMEROON
Semaine chargée au Cameroun : toilettes payantes et duty-free à l'aéroport inaugurés :: CAMEROON
CAMEROUN :: Décès du Sénateur Luc René Bell : Le RDPC en Deuil :: CAMEROON
Présidentielle 2025 au Cameroun : Yamb Ntimba Dominique Candidat de l'UPC :: CAMEROON
CAMEROUN :: Conflit Brys-Eto'o : Saintfiet (Mali) réagit sur les tensions Fécafoot-Gouvernement :: CAMEROON
il y a un mois
CAMEROUN :: Conflit au sein des Lions Indomptables : Vincent Aboubakar et Marc Brys défient Samuel Eto’o :: CAMEROON
Le franc CFA : Un outil de domination économique en Afrique :: AFRICA
Jean Bahebeck : Des Propositions Audacieuses pour la Présidentielle 2025 au Cameroun :: CAMEROON
FRANCE :: PROFESSEUR AIME BONNY IMPOSTEUR OU DONNEUR DE LECON ?
Crise Politique au Cameroun : Maurice Kamto Prêt à Riposter en 2025 :: CAMEROON
il y a un an