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Les Camerounais n’ont plus le droit de s’intéresser à leur président… :: CAMEROON

Une note du ministère de l’Administration territoriale interdit à tout citoyen camerounais, de se préoccuper de la santé du chef de l’État Paul Biya. Et moi, je me demande si mes compatriotes ont même encore le droit de s’intéresser à leur propre président…

On n’a plus le droit de parler de son absence

On n’a même plus le droit de parler de ses absences. Parce que bien auparavant, on pouvait quand même déblatérer sur ses longs séjours présidentiels là-bas en Suisse ou bien en Hexagone, et cela alimentait convenablement les Unes de nos journaux et de nos tabloïds. Mais aujourd’hui, niet !

Le ministre de l’Administration territoriale vient de sortir une note, dans laquelle il instruit clairement aux gouverneurs de sévir « sans complaisance », envers tous ceux qui s’aventureraient à pérorer sur une supposée indisponibilité physique de notre chef de l’État.

Paul Biya est pourtant absent de notre pays depuis le 2 septembre, et cela commence sérieusement à dater. Il n’a plus été aperçu en public — ni même en photo — depuis une quarantaine de jours, ce qui devient particulièrement intriguant. Mais on n’a même plus le droit de se demander s’il est encore là-bas (où ça ?) pour une villégiature, pour une période de vacances, pour un bilan de santé, pour ses affaires personnelles ou alors pour des raisons d’État que nous n’avons même pas le droit de chercher à vouloir comprendre…

On n’a pas le droit de parler de ses maladies

Le type a quatre-vingt-onze ans et demi ! Je suis désolé, monsieur le ministre, mais ma grand-mère n’a même pas encore atteint cet âge. Pourtant je la vois croupir sous une pléthore de maladies dégénératives, et je n’ose même pas imaginer si elle était responsable de toute la destinée de notre République !

Paul Biya a bien le droit de tomber malade, mais nous n’avons même plus l’autorisation d’en discuter. Ses sbires du RDPC et du gouvernement (c’est la même chose) passent le temps à ratiociner, en nous affirmant qu’il est en « pleine forme » ; et que d’ailleurs il s’entraînerait assidûment pour les prochains Jeux olympiques qui sont prévus en 2028.

Paul Biya a déjà quatre-vingt-onze ans et demi. Il est donc tout à fait normal qu’il puisse attraper un rhume, une fièvre, un diabète, une hypertension et que sais-je encore. Il est certainement un être humain comme monsieur-tout-le-monde, et ainsi les thuriféraires du pouvoir ne devraient pas en faire un cas tabou et encore moins particulier. Car même s’il est certain que l’état de santé du chef de l’État constitue un enjeu majeur pour la sécurité de notre pays, il n’en demeure pas moins que ça reste un sujet qui nous concerne. D’ailleurs dans certains pays sérieux, le bilan de santé du président est diffusé publiquement dans les médias officiels ; et cela presque toutes les semaines.

On n’a même pas le droit de manifester

Qui peut même manifester au Cameroun ? Hein ? En dehors de quelques motions de soutien qui sont montées de toute pièce pour demander à Paul Biya de se représenter une énième fois en 2025… Hein, qui peut même réellement manifester contre le RDPC ici au Cameroun ?

Parce que dans un pays d’intellectuels et de bavards, nous avons bien le droit de nous masturber intellectuellement sur les plateaux de télévision et dans les blogs. Nous avons le droit de commenter l’actualité internationale, de préférer la Russie ou encore de condamner la Françafrique et le franc CFA en espèces, mais ça s’arrête là ! Nous avons le droit de contester le Code électoral qui est complètement biaisé, et même de critiquer les quarante-deux ans de mal-gestion de monsieur le président Paul Biya. Mais… est-ce que nous avons alors le droit de sortir et de manifester dans les rues ?

Le régime actuel a mis sur pied un véritable système de répression, qui interdit toute velléité de contestation politique. Et ainsi nous avons bien le droit de pleurnicher, mais nous n’avons absolument pas le droit de nous plaindre ni de revendiquer quoi que ce soit. Sinon on va vous sortir l’arsenal juridico-militaire qui va vous condamner pour terrorisme, pour appel à la sédition et à la révolte, ou encore pour outrage à chef d’État et propagation de fausses nouvelles visant à déstabiliser les institutions républicaines…

Il est interdit de parler des coups d’État

Nous sommes justes des observateurs, en réalité. Car on a beau observer le Niger, le Burkina, le Mali ou encore le Gabon, mais nous n’avons pas le droit d’en parler ni de les analyser ! Une note de notre gouvernement avait formellement interdit de débattre sur les coups d’État qui ont eu lieu récemment en Afrique, et surtout de faire des parallèles avec le Cameroun. Et moi j’ai envie de leur demander : mais c’est quoi le rapport ?

Notre régime actuel est si frileux, qu’il a peur de la moindre petite étincelle. Et c’est pour cela qu’on nous musèle, qu’on nous interdit de comparer certaines similitudes qui sont pourtant patentes, et qu’il est surtout proscrit de s’imaginer un changement quelconque à la tête de la Présidence de la République. Et pourtant, il viendra bien un temps, bon gré mal gré, où notre pays sera amené, par la force des hommes ou de la nature, à se retrouver dirigé par un autre être humain, un autre dictateur, un autre gang, un autre parti-État et que sais-je encore…

Les Camerounais n’ont même plus le droit de s’intéresser à leur présidence…

Donc une note du ministre de l’Administration territoriale interdit à tout citoyen camerounais, de se préoccuper de l’état de santé de monsieur Paul Biya. Et moi je me demande si Pierre La Paix Ndamè aura même encore le droit de s’intéresser à son propre président…

Les Camerounais n’ont plus le droit de s’intéresser à leur président ! Ils ont le droit de parler de lui, ils ont le droit de le critiquer, mais ils n’ont plus le droit de chercher à savoir où il se trouve exactement, ni s’il se porte bien actuellement.

Les Camerounais n’ont plus le droit de s’intéresser à la présidence ! Ils peuvent au moins spéculer sur la future élection présidentielle de 2025, mais il est strictement interdit de discuter sur la vacance à la tête de l’État ; et encore moins sur les réelles capacités physiques et intellectuelles de notre président.

Les Camerounais n’ont même plus le droit de s’intéresser au Cameroun, tout simplement, et pourtant il s’agit bien là de leur propre pays.

Le ministre de l’Administration territoriale, Paul Atanga Nji, a sorti une note qui instruisait à tous les gouverneurs de nos dix régions, de faire immédiatement embastiller tous les contrevenants. Et donc il est désormais interdit de parler de la santé de Paul Biya, de parler de sa succession et même de parler de ses activités privées ou professionnelles. Il est interdit de chercher à savoir où il se trouve, et manifestement aussi de le voir à la télévision ou de l’entendre à la radio. Depuis le 2 septembre 2024 qu’il a disparu des radars, nous n’avons plus reçu aucune nouvelle de notre patriarche Paul Biya.

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