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© Correspondance : Amedee Dimitri Touko Tom ,Homme Politique
- 16 Mar 2025 07:03:38
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CAMEROUN :: CE QUE JE PENSE DE LA FIÈVRE « RÉVOLUTIONNAIRE » VENDUE SUR LES RÉSEAUX SOCIAUX PAR LE Dr F. NYAMSI :: CAMEROON
Il y a deux ans, lors d’un dîner avec mon grand frère et ami, l’honorable Nintcheu Jean Michel, je lui fis observer que la longévité de BIYA au pouvoir est surtout tributaire de la lâcheté collective, des renoncements, des trahisons de l’opposition. Je parvins au constat selon lequel l'<<invincibilité>> ou l'<<indomptabilité>> de l'homme qui gouverne encore de fait le Cameroun, relevait plus de nous-mêmes que des qualités, bien des fois imaginaires qu'on lui prête naïvement.
Cette observation était profondément inspirée de ma riche expérience de militant et responsable politique de terrain au Cameroun.
Alors que je me serais attendu à ce que l'honorable Nintcheu Jean Michel , qui est sans aucun doute, l’homme politique le plus expérimenté de l’opposition camerounaise, se sente froissé dans son orgueil, il me répondit sèchement, l'air grave : « on dit qu’on a tout fait, mais on a déjà fait quoi ? ». Il exprimait ainsi ce qui doit être le sentiment profond de tout acteur politique ambitieux, qui connaît l’étendue des horizons de combats inexplorés, inexploités, de même que les renoncements et trahisons de l’opposition. Qui mieux que lui est au faîte de cette paresse militante, qui fait de l'opposition une caution de la dictature… Quoi qu'il en fût, l’intrépide député qu'il est, exprimait ainsi le point de vue d'un homme qui sait parfaitement de quoi il parle, exactement comme un marin qui connaît le bruit de la mer. Ne pas le lui reconnaître serait synonyme de vouloir parler latin à un clerc.
Dans cet ordre d’idées, l’enthousiasme, l’engagement, la détermination et l’optimisme affichés par des personnalités politiques et intellectuelles, comme Maurice Kamto, Jean miche NINTCHEU, Mamadou Mota , BOUCHE DE MAROUA, ABA’A OYONO, Aristide MONO, Jean BAYEBECK… se nourrissent de cette connaissance du terrain et du fait que pour réussir, il faut tourner le dos à la flemme militante.
Insinuer comme le fait à priori Franklin NYAMSI, que l’opposition institutionnelle ne serait constituée que d’escrocs intellectuels, qui conduisent le peuple à l’abattoir de BIYA, procède soit, d’une méconnaissance profonde de ces réalités du terrain et de l’action, qui peuvent se révéler comme étant le tout stratégique, invisibles du profane, soit simplement d’une imposture intellectuelle.
De manière frontale et brutale, certains opposent avec désinvolture le «changement dans la paix », à l’insurrection populaire, qu’ils appellent pompeusement la révolution.
LE CONTEXTE DE LA RÉVOLUTION DU DIVORCE
En effet, Maurice KAMTO est, depuis quelques années déjà, la personnalité centrale de la vie politique camerounaise, en même temps qu'il apparaît comme la personnalité la plus à même d'accéder au pouvoir. Paradoxalement, de nombreuses figures, se réclamant de l'opposition ou de la résistance camerounaise, semblent avoir fait de sa ruine politique, la priorité majeure ou vitale de leurs démarches, l’espace politique dans l’opposition apparaissant comme entièrement préempté par ce dernier.
LE PREMIER PÉCHÉ MORTEL : LA RÉVOLUTION CONTRE LA RÉSISTANCE
L’idée Révolutionnaire au Cameroun, se construit sur un postulat naïf : « On ne combat pas une dictature dans la paix ». Le faisant, les tenants de cette thèse croient ainsi disqualifier Maurice KAMTO. En assénant la vérité de Lapalisse, selon laquelle la loi du nombre peut faire basculer toute dictature, ses fameux contempteurs, dont Franklin NYAMSI, annoncent un << miracle>> par une révolution impréparée.
Pourtant une simple compréhension des processus révolutionnaires aurait pu éviter aux adeptes de cette logique leur errance stratégique.
La résistance telle que conduite par Maurice KAMTO, entend s'interroger, dans une dimension critique, sur les conditions de ses possibilités. En d'autres termes, essayer de savoir avec le plus d'honnêteté possible, si la révolution est désirable, nécessaire, opportune et possible.
À la démarche méthodique prônée par << l'homme qui fait peur au régime dictatorial>>, certains vendent la séduction du vacarme de l'agitation révolutionnaire, la fascination de la révolution «spectatorielle».
En effet, la Révolution du point de vue de la manière dont elle est accueillie, représentée, regardée, a toujours suscité un certain enthousiasme chez des peuples en quête de liberté.
Pourtant, il s’agit tout à la fois de reconnaître, d’accroître la légitimité d’un mouvement à travers des actions de soutien et de résistance, afin de nourrir et de valider un soulèvement populaire et donc, de convertir la résistance en « révolution » si ceci s’avère opportun.
En choisissant donc de manger son blé en herbe, « l’idée révolutionnaire » se déconnecte de la légitimité Kamtoenne.
DEUXIÈME PÉCHÉ MORTEL : VOULOIR BÂTIR UNE RÉVOLUTION SUR LA RUINE DE L’OPPOSITION POLITIQUE À BIYA
Des impatiences et l'absence de vision partagée sur la trajectoire à suivre pourraient générer au sein de la résistance camerounaise, des turbulences, dont il serait utile d’en faire l’économie. Dans ce magma politique, Maurice KAMTO, le leader de l'opposition, semble être devenu l'enjeu vital : il est célébré et porté en triomphe par d'aucuns qui espèrent par cette démarche lui donner toute la force dont il aurait besoin pour atteindre les objectifs politiques qu'il s'est assignés, tout comme il est combattu et réduit par d'autres, qui espèrent ainsi attirer les regards ou les égards des Anti-KAMTO ou du pouvoir, et construire sur ses ruines un nouveau leadership de l'opposition, à défaut de pouvoir prendre sa place.
C’est ainsi que sous le prétexte de divergences très souvent superficielles, s’engagent d’inutiles guerres de tranchées pour des mobiles inavoués. Inapte à promouvoir une vraie intelligence de la composition au sein de l’opposition camerounaise, on opte pour la paresse intellectuelle et militante, on développe l’intelligence du clivage, on essaye de couper son morceau, de couper sa part pour bâtir hâtivement un truc à quoi on donne le nom de baptême de «LA RÉVOLUTION».
L'absence de réponse sérieuse à la question de l'alternative à KAMTO nous ramène au caractère aventureux de tels positionnements que d'aucuns soupçonnent d'être plus aptes à séduire le pouvoir qu'à aider l'opposition à se consolider. À vrai dire, si pour l'opposition on a un projet plus ambitieux, on le met simplement en œuvre...
Pour construire une plus belle maison, on ne détruit pas l'ancienne dans laquelle se trouvent des gens pour les jeter dans les intempéries et l’insécurité avant d'engager le chantier. On construit d'abord la nouvelle et on y met à l'abri sa famille, avant de détruire l'ancienne si besoin.
D’ailleurs, il faut indiquer qu’on n’est absolument pas obligé d'être avec KAMTO ou de le suivre dans sa trajectoire politique. Mais envisager une démarche alternative en insinuant que celle prônée par ce dernier ne marchera pas, signifie, du point de vue purement humain, la remise en cause l’intelligence stratégique de tous ces cerveaux et expériences qui l’accompagnent, et de la pertinence du positionnement politique de l’organisation dont il préside aux destinées. Ce qui évidemment induit chez ses partisans, au moins une attitude d’auto-défense et plus encore des questionnements sur les moyens dont disposent ces néo-révolutionnaires pour mettre ici et maintenant en branle le train de la révolution.
En clair, l’analyse stratégique ne saurait se réduire à un exercice de divination dans lequel les sécrétions de nos esprits prédiraient l’échec inéluctable de l’entreprise de résistance la plus ambitieuse de ces 30 dernières années.
TROISIÈME PÉCHÈ MORTEL : UNE SIDÉRANTE DÉMONSTRATION D’UN MARASME STRATÉGIQUE
Les « Révolutionnaires » ambitionnent d’opposer à la barbarie du régime BIYA, une mobilisation populaire dont ils n’ont le secret que par la parole. Ils indiquent de manière péremptoire que « le changement dans la paix, n’est pas possible ».
Pourtant, la démarche révolutionnaire suppose un important soutien populaire. L’engager sur le clivage et le divorce d’avec la force populaire la plus importante de l’opposition incarnée par Maurice KAMTO est une faute stratégique grave. En politique plus qu'ailleurs, on ne fait pas des plans sur la comète. Par ailleurs, vouloir susciter de l’adhésion en cette période de notre résistance, avec pour leitmotiv, « Kamto va échouer » me semble suicidaire.
Sur le plan d’une certaine éthique politique et intellectuelle, on ne saurait parler d’échec d’une stratégie qu’on ne connait pas, de même qu’on ne peut constater l’échec avant le terme d’une démarche.
En réalité, les contextes politiques aux apparences semblables, ne sont similaires que pour des esprits non avisés : le contexte de 1960 n'est absolument pas celui de 1990, n'est pas celui de 2018 et ne sera pas celui de 2025. Dire qu'une démarche a échoué alors qu'elle ne s'est même pas encore déployée est regrettable. Le charlatanisme et la voyance du poteau ne remplaceront jamais une sérieuse analyse politique.
Le bruit sur les réseaux sociaux, le dévoiement de la stratégie de ceux se réclamant de l’option révolutionnaire procède de tout, sauf de ce qui gouverne ce type de démarche, qui se fait sous le sceau de la discrétion, de la sobriété et surtout de la consensualité. On ne libère pas un peuple sans lui, contre lui, malgré lui. Le contexte d'une révolution se prépare et davantage dans un pays où les gens sont encore peu enclins à arracher ce qui leur revient de droit, notamment le droit de manifester librement. Il faut, par l’action militante et l’éducation politique, aider le peuple à traduire sa colère, en capacité d'action.
En outre, la publicité autour de cette démarche laisse plus d’un observateur pantois : Il n’est même pas exclu que la dictature de Yaoundé, au moyen d’agents, finance et prenne le contrôle d’une telle entreprise et lui donne l’orientation la plus à même de lui permettre de garder le pouvoir.
Penser donc qu'en un temps relativement court, sans se donner les moyens d’un élément déclencheur, que pourrait être la fraude électorale, on sera à Etoudi parce qu'on aura vendu la révolution sur les réseaux sociaux, ressemble à du gribouillage stratégique. Une stratégie ou démarche dans laquelle les moyens ne sont pas évalués et maîtrisés, dans laquelle la dimension politique n’est pas soignée, est simplement inexistante.
QUATRIÈME PÉCHÉ MORTEL : LE RISQUE DE CRIMINALISATION DE LA RÉVOLUTION
Le fondement de l’action révolutionnaire, c’est la légitime défense contre un oppresseur. Cette légitime défense, n’est pas un acte de vengeance. Ce qui suppose que soient réunies des conditions politiques et de fait, qui légitiment et valident le soulèvement du peuple, ou d’une partie de celui-ci. Une répression sanglante de manifestation, une fraude avérée à une élection ou une victoire volée, sont autant d’éléments pouvant fonder la légitimité d’une défense. Pour cela, il faut préparer assidûment le terrain politique par une vigoureuse action de résistance.
La révolution, a priori, n’est pas de l'ordre de la légalité. Avant que ne s'impose à la légalité, la légitimité populaire d’une révolution qui réussit, prévaut l’ordre dominant, qui est celui de la dictature. Dans ce contexte, seront considérés et traités comme des délinquants, des criminels, ceux qui ambitionnent ouvertement de renverser par la rue <<l’ordre institutionnel>>. Des procédures judiciaires contre ces derniers peuvent être engagées par des gouvernants qui, sous le prétexte de la légalité de leur existence, neutralisent les révolutionnaires auto-déclarés.
Ceux qui, sur les réseaux sociaux, échafaudent naïvement sous le regard de la terre entière, des projets dits révolutionnaires à implémenter au Cameroun, comme s’il s’agissait d’aller planter des graines de maïs dans un champ, tombent sous le coup des lois pénales camerounaises. Un parti politique au Cameroun, ne peut avoir pour programme politique de soulever le peuple. Aucun groupe sérieux, aucune organisation sérieuse, qui opterait pour une révolution, ne viendrait le faire sur la place du marché. Le folklore qui s’observe sur les réseaux sociaux est une curiosité comme le Cameroun sait en produire, c'est de la fanfaronnade Camerounaise.
Non ! Ces choses ne se passent pas comme ça. D’aucuns pourraient penser qu’il s’agit d’actes de bravoure et de courage... Un leader qui se livre ou se suicide n’est pas un leader courageux, c’est un aventurier car en réalité, toute l’entreprise de « libération » qu’il ambitionnera de bâtir, sera démantelée au premier acte de son exécution. La vérité étant que dans tout État normal, une fois qu’on affiche aussi ouvertement des velléités insurrectionnelles, on fait l’objet de surveillance immédiate et continue. On ne vend pas le vent à un peuple.
CONCLUSION
La colère découlant des injustices au Cameroun doit être le ciment de l’action militante. Elle ne doit pas nous isoler les uns des autres, malgré toutes les forces œuvrant en ce sens. Ces injustices ont pour principal objectif, d’atomiser la société, de briser les liens qui nous unissent et nous permettent de nous mobiliser. Elles nous plongent dans une jungle où la solidarité devient une chimère. Nous devons retrouver notre humanité, nous devons aider les autres à le faire.
En même temps, nous devons garder notre lucidité. C’est pourquoi j’ai envisagé cet exercice, non pour décourager les initiatives de ceux qui les portent, mais pour les aider à passer au crible de la raison critique et sous la sanction expertale, des démarches, des actions. Nos erreurs stratégiques, ou la méconnaissance de l’environnement juridique, politique, diplomatique et sécuritaire, peuvent être exploitées par nos adversaires, au préjudice d'autres dynamiques en cours et ainsi ruiner les espoirs d'un peuple avide de changement. Cela dit, promouvoir et diffuser une intelligence de la composition, qui est en réalité, la forme la plus raffinée et aboutie des intelligences, celle qui porte le monde, par opposition à une intelligence du clivage doit être la voie. Ainsi perçue, la résistance nourrit le processus révolutionnaire, elle ne saurait s’y opposer, on ne doit pas les opposer. Si l’opposition souvent si proche du pouvoir au Cameroun semble confrontée à la malédiction de la dernière marche pour y accéder, c’est justement à cause de ses faiblesses, de ses renoncements, de ses défections, de ses trahisons. Son défi à venir, c’est sa consolidation, c’est son renforcement suivant ma théorie : TOO LARGE, TOO HIGH, TOO BIG, TOO HEAVY TO COLAPSE.
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