Écriture et Diaspora Camerounaise : Rencontre avec le Président de l’AMACAD
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FRANCE :: Écriture et Diaspora Camerounaise : Rencontre avec le Président de l’AMACAD

Serges Ngounga est le Président de l’AMACAD (Amicale des Auteurs Camerounais de la Diaspora), une association regroupant des écrivains camerounais établis à l’étranger. Rassemblé en Amicale, il y a plus d’un an, ce groupe d’auteurs vient d’officialiser son existence par une association légalisée par la préfecture de l’Essonne, en février 2025. Depuis lors, elle suscite un intérêt grandissant et nourrit des ambitions notables pour la promotion de la littérature camerounaise à l’international. Afin d’en savoir plus sur ses projets et ses perspectives d’avenir, Afriksurseine est allé à la rencontre de son promoteur et président. Au fil d’un échange spontané et sincère, il nous dévoile les motivations qui ont conduit à la création de cette association.

Bonjour Serges Ngounga. Avant d’entrer dans le vif du sujet, pourriez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

 Bonjour Gaelle, bonjour à vos nombreux lecteurs à travers le monde. Merci pour l’honneur que vous me faites, ainsi qu’à l’AMACAD, pour que je suis dire quelques mots. Pour me présenter, je suis Serges Ngounga, écrivain poète, résident en Europe depuis quelques années. J’écris depuis une vingtaine d’années des textes divers et variés qui valorisent les richesses et la culture africaine, je mets aussi dans mes œuvres les merveilles de ce monde, présentes aussi bien au sein de la nature environnante que dans les valeurs qui magnifient notre humanité.

Vous animez depuis un an un collectif d’auteurs. Quelle a été la motivation derrière la création de l’AMACAD et quelles sont les ambitions qui vous portent ?

Comme vous le savez, le travail d’écriture est un acte solitaire, un moment où l’écrivain est livré à lui-même et est en face d’une feuille blanche qu’il doit noircir. la promotion, la vulgarisation de l’œuvre publié d’un auteur est souvent difficile, cela peut être un parcours de combattant. On écrit pour être lu, pour partager ses idées, sa passion. Pour parvenir au sommet, il faut être soit dans une très grande et bonne maison d’édition, ou mettre beaucoup d’énergie pour se faire connaître au-delà de sa sphère privée.  Avec quelques auteurs, nous avons pensé que se mettre en réseau augmenterait la visibilité sur nos productions littéraires, bien sûr en tenant compte de la qualité du contenu de chaque publication. L’idée d’une amicale est apparue comme une évidente après plusieurs mois d’échange informel avec des auteurs basés en France et dans certains pays d’Afrique. Une fois que nous avons pris conscience que nous avons 3 choses en partage : notre pays natal le Cameroun, notre amour pour les lettres, l’écriture, et notre vie en diaspora, il fallait donc se lancer avec la mise en place d’une structure qui fédère nos pensées, nos rêves, nos projets et nos énergies pour porter encore plus haut la production littéraire et artistique des natifs du Cameroun.

L’AMACAD est-elle une structure ouverte à tous ? Qui peut en devenir membre et selon quels critères ?

L’AMACAD est une association ouverte à tous les auteurs camerounais ayant déjà publié un ouvrage et résident hors du triangle national. Comme il est écrit dans l’article 6 de nos statuts, l’adhésion des membres se fait par cooptation, par parrainage, ou démarche personnelle. Le nom d’un nouveau membre éventuel est soumis au bureau exécutif par le secrétaire de l’association.

– Le bureau vérifie que le candidat répond aux critères d’éligibilité des statuts de l’Association (avoir déjà produit un ouvrage, résidant hors du Cameroun, être dans un esprit de rencontre et de partage de cette passion du livre, etc.)

– Après examen de la candidature, un avis rapide est donné.

Et le membre peut participer à nos activités, s’acquitter de sa contribution symbolique d’adhérent, il est ensuite intégré dans nos différentes plates-formes et site de communication. Chose importante, nous souhaitons des adhérents actifs, force de propositions et impliqués dans le dynamisme de l’association. Au sein de l’Amicale, nous considérons le livre comme un vecteur de développement majeur et un élément d’édification de la population. En étant à la fois des scribes et des passeurs de relais, nous sommes résolument convaincus que les nations où les gens lisent plus sont à même de créer un socle solide de valeurs favorables à l’épanouissement d’un grand nombre de personnes.

Après une année d’existence, quel bilan tirez-vous de cette aventure ? Quelles réalisations ou difficultés marquantes pouvez-vous partager ?

Disons qu’il est trop tôt pour parler de bilan. Je peux simplement dire qu’après plus d’un an de réflexion, le bilan a été assez évident, il nous fallait cette structure pour fédérer nos énergies. Nous avons en ligne de mire la 4ème édition du salon du livre africain de Paris (SLAP), qui aura lieu les 14-15-16 mars 2025 ; ce sera le 1er rassemblement officiel de l’association. N’oublions pas le Cameroun sera l’invité d’honneur et il est important qu’on y soit en force, en nombre et surtout en qualité. Nous aurons 3 jours magnifiques où de brillants esprits auront l’occasion de mettre en avant les productions. Nous aurons aussi un temps d’échanges avec les auteurs camerounais du pays, qui viendront en délégation officielle. L’organisation de ce salon a prévu de nous donner un moment pour une conférence, sur un sujet en cours de finalisation. Ce sera vraiment un beau moment. Pour les difficultés, disons qu’elles sont inhérentes à toute organisation humaine, il faut savoir écouter les avis mêmes contraires et ne pas perdre de vue les objectifs de l’association. Un auteur est une personnalité et une amicale d’auteurs est un regroupement de diverses personnalités, il faut œuvrer pour une alchimie, pour une bonne synergie entre ces personnalités. Pour l’instant, disons que chemin faisant, on saura relever les challenges qui se présenteront à nous.

Quelles sont les perspectives de développement de l’amicale à court, moyen et long terme ?

Les perspectives sont multiples. Aujourd’hui, les auteurs de l’Amicale sont basés sur les 3 continents que sont l’Afrique – l’Europe – L’Amérique. Dans un 1er temps, on apprendra à se connaitre à travers plusieurs activités comme des salons, des cafés littéraires, etc. Nous avons aussi se soutenir pour la promotion des publications des œuvres de nos auteurs. Nous allons faire fonctionner le réseau à fond. A moyen, terme, nous allons créer nos propres évènements sur ces 3 continents après avoir mis en place des antennes régionales pour rassembler large et être plus efficace dans nos actions.  On pourrait aussi, pourquoi pas envisager des publications communes de quelques-uns parmi nous, un recueil de poésie, de nouvelles, ou autres. Toutes ces idées vont dépendre de l’implication et de l’engagement d’un grand nombre. Sans oublier aussi que tout membres de l’amicale peut être porter d’une idée à partager au groupe.

En tant que porte-voix d’un collectif d’auteurs, quel regard portez-vous sur la littérature camerounaise dans la diaspora ? Quelles en sont les forces et les défis ?

Le regard que je vais porter sur la littérature camerounaise au sein de la diaspora, va être un regard personnel et non en tant que président du collectif, car chacun de nous a et peut avoir une vision différente de la mienne. Ceci dit, je peux dire depuis les années 1990, il y a eu une explosion d’auteurs camerounais, aussi bien basés au Cameroun que loin du pays. Dans ma jeunesse au Cameroun, on avait des grands noms comme Ferdinand Oyono, Mongo Beti, Séverin Cécile Abéga, Francis Bebey, Rabiatou Njoya, etc. la plupart de ces grands auteurs avaient vécu en Europe, et étaient avant nous autres des auteurs camerounais de la diaspora.

Aujourd’hui, pour la France, que je connais mieux, il y a depuis plus de 20 ans, des noms qui sont des références, des têtes de proue qui font vraiment la fierté du pays, je pense entre autres à Calixthe Beyala, Eugène Ebodé, Léonora Miano, Achille Mbembe, bref ils sont nombreux. Je trouve que cette littérature est prolifique et permet aux lecteurs d’apprécier le regard que portent ces fils et filles sur le monde. Ces auteurs sont respectés et leurs paroles ont du poids dans le concert des littératures du monde. Ce qui en fait une force et une émulation pour d’autres qui souhaitent suivre le même chemin.

Pour les défis, je dirai que le plus palpable, c’est un constant personnel : j’ai le sentiment que les auteurs de la diaspora vivent parfois dans une sphère dorée, en vase clos, certainement due aux conditions proposées par les maisons d’édition en Europe, tandis que les auteurs camerounais vivant au pays, connaissent une autre réalité. Bien qu’il existe de très belles maisons d’édition au pays, je trouve qu’il y a très peu de passerelles, très peu de circuits de communication entre les auteurs de la diaspora et ceux de l’intérieur. Est-ce parce qu’ils ne se connaissent pas assez ? Est-ce parce qu’il existe peu de structures en même de faire converger ces forces utiles pour l’édification d’un peuple ? …  Et j’ai aussi le sentiment que les auteurs de la diaspora, loin de leur terre natale, ont un ton plus mordant, plus incisif dans leurs écrits que ceux résident au pays, allez savoir pourquoi…

Animer et gérer un tel regroupement d’écrivains, avec les responsabilités et contraintes que cela implique, n’est pas une tâche aisée. Quel est selon vous le secret de la cohésion et de la pérennité de cette initiative ?

Aucune tache dans la gestion des hommes et femmes d’un groupe n’est aisée. Je l’ai dit plus haut. Un auteur, du moins la plupart des auteurs ont de forte personnalité, car sans cette force de caractère, on ne peut défendre les idées qui sont exposées dans les publications. Donc rassembler des personnalités pour les faire converger vers les mêmes objectifs nécessite de l’écoute, de la patience et une dose d’humilité. En même temps, il ne s’agit pas d’un projet personnel, le projet de l’AMACAD est collectif, chacun membre doit se retrouver et se reconnaitre dans les projets que nous peaufinons ensemble et que nous mettons en place, sans nier les individualités mais en les mettant au service du collectif. Tout le monde gagne, et surtout le Cameroun et nos nombreux lecteurs. Ne perdons pas de vue, qu’au fond de nous, nous avons cette fierté de nos origines qui d’une certaine manière transpire dans nos ouvrages et en souhaitant les partager à travers le monde, on se doit d’être mieux organisés, structurés et faire fonctionner le réseau pour l’éclosion de chacun. Seul le temps sera le juge suprême de nos démarches et engagements.

 Enfin, avez-vous un dernier mot à adresser à nos lecteurs et aux passionnés de littérature camerounaise ?

Au sein de l’Amicale, nous considérons le livre comme un vecteur de développement majeur et un élément d’édification de la population. En étant à la fois des scribes et des passeurs de relais, nous sommes résolument convaincus que les nations où les gens lisent plus sont à même de créer un socle solide de valeurs favorables à l’épanouissement d’un grand nombre de personnes. Alors venez à notre rencontre, pour ceux qui seront à Paris, venez à nous découvrir, les 14-15-16 mars 2025. Au salon du livre africain de Paris, une douzaine d’auteurs de l’AMACAD auront l’immense joie de vous présenter les joyaux de leurs riches patrimoines livresques. Un livre en main, est un espace de liberté et d’évasion. Venez, et vous partirez avec une clé pour votre épanouissement à tout point de vue ! Le continent sera en haut !

 

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