ETUDE CRITIQUE DE L’OEUVRE DE MARTIAL BISSOG INTITULE LA « FRANCE ET NOUS »
FRANCE :: LIVRES

ETUDE CRITIQUE DE L’OEUVRE DE MARTIAL BISSOG INTITULE LA « FRANCE ET NOUS »

Etude réalisée par DHC

C’est par l’entremise d’une voisine de quartier, Valérie, que j’ai fait la connaissance de Martial Bissog. Un matin, alors que nous nous rendions au travail et étions assis côte à côte, nous parlions de l’écriture camerounaise, chacun citant les auteurs qui façonnent les pensées au sein de la diaspora. Valérie, fascinée par la conversation, me parla de Martial Bissog (le Pépé) et m’encouragea vivement à explorer son univers et à suivre ses activités.

Curieux de nature, comme il aime lui-même à se définir, je me laissai emporter par la découverte de ses différents thèmes. Je découvris alors que cet homme était profondément enraciné dans les discours spirituels, politiques et philosophiques, tous traités avec profondeur et humanisme. Plus tard, son passage à la télévision ivoirienne, tel un messager traversant les frontières pour diffuser ses idées, attira une fois de plus mon attention. Pourtant, jusqu’en 2024, nos chemins, bien que parallèles, ne s’étaient jamais croisés. Ce fut lors d’une conférence organisée dans le prestigieux 16ᵉ arrondissement de Paris par Claire Ntolo que notre rencontre eut enfin lieu.

Dans ces circonstances, j’eus le privilège d’échanger directement avec lui. Martial, dans un geste de générosité et de simplicité, me remit un exemplaire de son essai fraîchement publié, « La France et nous. »  La lecture de cet ouvrage, à la fois assidue et inspirante, se révéla riche en réflexions et profondément humaniste. Aujourd’hui, c’est avec un enthousiasme sincère que je vous invite à découvrir les idées qui y sont développées.

Ce qu’il faut retenir de cet essai, c’est qu’il explore un ensemble de thématiques entremêlées. Il dresse  un tableau critique et introspectif de la société française. Martial Bissog analyse notamment les identités multiples, les héritages historiques et les contradictions sociopolitiques. Qu’il s’agisse de la France, envisagée comme un espace de rêves et de paradoxes, ou des trajectoires personnelles liées à l’exil et au retour aux origines, chaque chapitre pose une question fondamentale : comment concilier les tensions entre universalité et spécificités culturelles, entre modernité et tradition, entre espoir et désillusion ? Ces réflexions, souvent portées par un ton engagé et parfois poétique, mettent en lumière les défis des sociétés postcoloniales et des individus pris dans un monde en perpétuel changement. Au cœur de ces analyses émerge la thématique de l’héritage, qu’il soit culturel, politique ou personnel.

Les textes décrivent la France comme un pays d’accueil marqué par  des contradictions, qui oscille  entre ses idéaux humanistes et ses réalités sociales complexes. De même, les tensions liées aux inégalités, aux choix individuels face aux pressions collectives, ou encore aux incohérences des politiques contemporaines, révèlent une critique lucide et souvent ironique. À travers ces récits et réflexions, Martial Bissog questionne le sens du lien entre les peuples et les nations, tout en invitant à repenser les notions de dignité, d’appartenance et de transformation sociale. L’ouvrage commence ainsi, dans son introduction :

« Ça y est ! La France, c’est nous. Et si la France, c’est véritablement nous, qui sommes “nous” ? J’ai voulu, ici, dire au monde que nous existons, que nous avons existé et que nous existerons. Ce livre n’est pas un hymne au communautarisme. Je prends aisément mes distances avec tout ce qui pourrait nous enfermer dans des boîtes, des cases, pour mieux nous stigmatiser, nous isoler, et nous contrôler. Cet ouvrage est donc un appel à plus d’humanisme, car la France moderne est appelée à être ce qu’elle n’a jamais cessé d’être : un hexagone d’intelligence, de talent, de combat, de rêve et d’idéal. Cette France doit tendre l’oreille aux échos de libération de tous les peuples du monde. »

Ce début de l’œuvre  explore la notion de « France » et le sens de « nous ». Les termes liés à l’identité collective incluent : « France », utilisée à la fois comme un espace géographique et une entité symbolique. « Nous », qui pose une question d’inclusion et de définition qui est ce “nous” ? tout en insistant sur une appartenance collective. « Existons », « avons existé », « existerons », qui soulignent l’affirmation d’une identité et d’une continuité historique. L’auteur met en avant une vision idéalisée de la France : « Humanisme », « intelligence », « talent », « combat », « rêve », « idéal ». Ces mots peignent une France ouverte et universaliste. « Libération », « peuples », « monde » qui  s’inscrivent  dans une perspective internationale, appelant à une France pour tous, qui rejette le « communautarisme » et les mécanismes de segmentation sociale et culturelle. Stylistiquement, plusieurs procédés renforcent le discours :

Anaphore : « Que nous existons, que nous avons existé et que nous existerons. » Cette structure ternaire martèle l’idée de continuité et de persistance. Interrogation rhétorique : « Et si la France, c’est véritablement nous, qui sommes « nous ? » Cette question interpelle le lecteur et invite à réfléchir sur les notions d’identité et d’inclusion. La métaphores : »Boîtes » et « cases », symbolise  les mécanismes d’enfermement identitaire. « Oreille tendue vers les échos de libération », une métaphore auditive qui donne une dimension sensible et engagée à l’image d’une France moderne. Il emploie des énumérations : « Intelligence, talents, combat, rêve, idéal ». Cette accumulation amplifie l’effet lyrique et dessine une vision positive et idéalisée de la France.

Une introduction au service de la réappropriation identitaire.

Ce partie, qui n’est autre que l’introduction du livre, s’inscrit dans une logique de réappropriation. Tout au long de cette ouverture, l’auteur affirme une identité collective « nous » tout en interpellant sur sa définition dans un contexte national. Le « nous » reste volontairement ambigu, représentant potentiellement une minorité ou une diversité non explicitée. L’auteur rejette l’idée que les identités multiples doivent être enfermées dans des « cases ». Cette critique du cloisonnement s’accompagne d’un appel à une vision plus large, plus universaliste et profondément humaniste. La France est perçue comme un symbole d’intelligence et de libération. Compte tenu de l’importance d’un tel thème, cette partie du livre se distingue par un style mêlant argumentation et lyrisme.

L’auteur adopte un registre soutenu et un ton solennel pour donner du poids à son propos. Les figures de style, notamment les anaphores et les métaphores, renforcent l’aspect engagé du discours tout en cherchant à résonner émotionnellement avec le lecteur. L’introduction de ce livre célèbre à la fois l’humanisme et la diversité, tout en critiquant les cloisonnements identitaires. L’auteur s’appuie sur un langage riche et symbolique pour transmettre une vision intime et universelle. Dès les premières lignes, Martial commence par une exclamation forte : « Ça y est ! » Cet effet d’annonce capte immédiatement l’attention du lecteur, marquant un moment de révélation. L’interrogation suivante, « Et si la France c’est véritablement nous, nous c’est qui ? », soulève un double questionnement, identitaire et national. Le pronom « nous » reste volontairement ambigu, incitant le lecteur à réfléchir sur l’inclusion et la représentation des diversités en France.

Cette interrogation rhétorique interpelle directement le lecteur, l’impliquant dans une réflexion sur l’appartenance collective. L’auteur articule sa réflexion à travers une construction dialectique : il répond à cette question par des affirmations successives « nous existons, nous avons existé, nous existerons » et une opposition entre une vision humaniste et les dangers du communautarisme.

Une France idéalisée et universelle

Très vite, l’auteur oppose à une vision réductrice une perspective universaliste et humaniste. Des termes tels que « intelligence », « talent », « combat », « rêve », et « idéal » amplifient l’idée d’une France magnifiée, ouverte et généreuse. Cette énumération exalte les qualités attribuées à une France idéalisée. En affirmant que la France moderne doit être fidèle à ce qu’elle « n’a jamais cessé d’être », l’auteur inscrit son propos dans une continuité historique. Il évoque la France comme une « oreille tendue vers les échos de libération de tous les peuples du monde », soulignant son rôle historique et contemporain dans les luttes émancipatrices. Martial redéfinit la France non comme une entité homogène, mais comme un espace d’inclusion et de diversité. Ce « nous », central dans son propos, symbolise une pluralité d’identités rassemblées sous un humanisme engagé et une identité collective forte.

Un récit entre idéalisme et réalisme

Dans le premier chapitre, des expressions telles que « grand pays », « rêve », « parcelle de terre magique », « havre de paix », et « paradis » inscrivent la France dans une vision presque mythique. À cette idéalisation s’oppose une réalité plus concrète, évoquée à travers des termes comme « douanière » ou « demander l’asile ». L’expression « barrières », utilisée métaphoriquement, symbolise les obstacles rencontrés par l’exilé. Le texte évoque un « désir de liberté », thème central, qui s’oppose à l’image de rejet ressentie dans les pays de départ.

L’exil comme quête et mission

L’auteur met en lumière les attentes souvent irréalistes des familles envers les expatriés, illustrées par l’expression : « Va te battre là-bas. » Cette injonction sociale souligne une forme de pression où le départ devient à la fois une opportunité et une obligation. Le mot « millions » reflète une vision matérialiste du succès projetée sur les exilés. L’idée d’une « sympathique douanière », qui contraste avec une attente négative d’autorité, illustre le caractère exceptionnel de la France, perçue comme un lieu d’accueil et de défense des plus vulnérables. L’image de la France comme « parcelle de terre magique » ou encore « un bout de paradis sur terre » traduit une idéalisation forte, soutenue par des métaphores lyriques.

Une France universelle et engagée

L’auteur interroge et célèbre l’identité collective, tout en appelant à dépasser les divisions. Son récit, traversé par des expériences personnelles et des réflexions universelles, invite à repenser l’humanisme et l’inclusion dans une France magnifiée et porteuse d’espoir. Le chapitre suggère une ambiguïté inhérente à la France. Si elle est perçue comme un lieu de liberté et de défense des droits, cette image est tempérée par les obstacles représentés par les « barrières ». La critique implicite des pays d’origine renforce encore la complexité de ce rapport. L’évocation de la douanière aidant un exilé à demander l’asile témoigne d’une humanité inattendue dans un contexte administratif souvent rigide. La France devient alors le symbole d’un espace où l’on peut être défendu, même face à l’adversité.

Exploration des liens historiques et contemporains

Dans ce chapitre, l’auteur mêle réflexion historique, critique sociale et lyrisme pour explorer les liens complexes entre la France et ses anciens territoires coloniaux. Il met en lumière une relation ambiguë, marquée à la fois par l’attachement et la nécessité d’une réévaluation. Ce thème est abordé à travers des notions de souffrance collective et d’identité. Des termes comme « empire », « cercle », ou encore « notre lien avec la France » évoquent une continuité historique, suggérant que le passé colonial continue d’influencer les relations actuelles. La douleur est manifeste dans le champ lexical : « souffrances », « coule », « sauvé », « blesse », « sang ». Ces mots symbolisent à la fois des tensions profondes et des efforts de guérison.

Inclusion et introspection

L’auteur insiste sur l’inclusion des communautés issues de la diversité, notamment à travers des expressions comme : « ces gens dans les rues bondées de Bondy, à Sarcelles » et « bien d’ici ». Par ailleurs, des termes comme « franchise », « se poser les bonnes questions », et « ne croyez donc pas » traduisent une démarche introspective et une volonté de débat honnête. L’expression métaphorique : « Quand on se blesse dans la bouche, on crache une partie du sang, et on en avale malheureusement une autre », illustre avec force la difficulté de traiter pleinement les blessures historiques. Une part de douleur est rejetée, mais une autre reste enfouie, assimilée malgré soi. L’ambivalence des relations avec la France est résumée dans : « On coule avec, soit on est sauvé ». Ce lien est perçu comme inéluctable, mais potentiellement salvateur.

Admiration et critique

La déclaration : « Qui peut détester ce pays ? » et la question : « Quel est l’homme normalement constitué ? » soulignent une contradiction apparente : la possibilité de critiquer la France tout en admirant ses valeurs. L’humour subtil dans : « Fontainebleau, pardon, de Déhane » crée un glissement qui met en lumière une tension entre la centralité française et les périphéries oubliées. Enfin, la France est décrite comme un pays qui « se fait la guerre à lui-même et aux autres », une formule qui reflète la complexité de son histoire, entre luttes internes et conflits externes.

L’héritage et le lien intime

Le passage de la page 49, intitulé L’héritage France, approfondit ces réflexions. On y lit : « Une fois dépassées les peurs de ceux qui ne veulent pas disparaître, il faut aborder sereinement la question du legs, mais aussi du lien entre la France et nous. Mon père, arrivé en métropole très tôt, a préféré ses beaux jours à Kribi, entre le soleil et la plage, car il estimait, comme Aznavour, que la misère est moins pénible au soleil. » Ce chapitre explore les thèmes de l’héritage, du lien entre la France et ses anciennes colonies, et le regard ambivalent sur l’exil et le retour aux origines.

Héritage historique et personnel

Le terme « legs » est central. Il incarne une double dimension : Un héritage historique et culturel : les relations complexes entre la France et ses anciennes colonies, où l’influence de la métropole perdure malgré les peurs identitaires et les mutations sociales. Un héritage personnel : à travers la figure du père, qui est le reflet d’une trajectoire migratoire typique. Son retour à Kribi symbolise un besoin de réconciliation avec ses racines, tout en gardant les traces  de son expérience en France. La mention des « peurs de ceux qui ne veulent pas disparaître » montre  à la fois les craintes des Français face aux changements sociétaux et la lutte des peuples issus des colonies pour affirmer leur place.

Mélancolie et quête de sens

Le père, personnage clé, illustre le choix de nombreux migrants : retourner à une terre qui incarne chaleur humaine et géographique. La référence à la chanson d’Aznavour : « La misère est moins pénible au soleil » relie cette expérience individuelle à une réalité universelle, celle des sacrifices liés à l’exil. Le contraste entre la métropole et Kribi est incarné par l’opposition entre « le soleil et la plage » et « la misère ». La France devient un lieu d’efforts et d’épreuves, tandis que Kribi représente un refuge apaisant. Le « soleil » symbolise non seulement la chaleur physique, mais aussi émotionnelle et culturelle. Ce retour est une quête d’authenticité et de simplicité.

Questions existentielles et conclusion

Le choix du père de quitter la métropole reflète-t-il une désillusion face à un modèle incapable de combler toutes les attentes ? La patrie idéale existe-t-elle ailleurs que dans l’imaginaire ? Comme le suggère Camara Laye, : « Malgré l’hospitalité qu’on peut vous offrir ailleurs, ta terre sera ta terre, rien que ta terre. » Ainsi, la France, tout en étant un espace de transformation, reste pour certains une étape et non une finalité.

Nous arrivons à la page 84 : « Paolo Coelho, le messager de la paix, comme il se faisait appeler, disait que « les nations abouties sont des nations schizophrènes ». Elles sont en contradiction permanente : on dit une chose et son contraire. On veut sauver l’agriculture et l’élevage tout en célébrant les véganes, on désire des autoroutes mais se proclame écolo, on refuse les immigrés tout en en demandant davantage sur les chantiers lourds. On ne veut plus des peaux d’ours mal léchés, mais on veut des fourrures pour les vieilles bourgeoises mal aisées du seizième. De contradictions en contradictions stériles, on aboutit à une société malade où un quarteron de millionnaires veut s’arroger tous les privilèges. Et vous voulez qu’on vous applaudisse ? »

Ce chapitre constitue l’essence même du livre, par ce qu’il offre  une réflexion critique sur les contradictions de la société française, en s’appuyant sur une citation de Paulo Coelho et en adoptant un ton sarcastique et incisif. L’auteur met en lumière les paradoxes d’une société qu’il qualifie de « schizophrène ». Ce terme, utilisé ici au sens figuré, dépeint des incohérences profondes dans les politiques, les comportements et les valeurs. Des expressions comme « on dit une chose et son contraire », « de contradictions en contradictions », ou encore « on veut… mais » structurent le texte et soulignent ces oppositions.

Les contradictions dénoncées

L’auteur emploie un vocabulaire connoté négativement pour décrier une élite perçue comme hypocrite ou égoïste : « société malade », « quarteron de millionnaires », « vieilles bourgeoises mal aisées du seizième ». Ces termes traduisent une dénonciation acerbe des inégalités sociales et des privilèges. Le mot « stériles », utilisé pour qualifier les contradictions, en souligne le caractère improductif et nuisible. Les références à des groupes spécifiques (végans, bourgeois, immigrés) et à des enjeux contemporains (écologie, travail, consommation) ancrent le texte dans un contexte à la fois actuel et universel. Par exemple, l’expression « peau de l’ours mal léché » évoque un imaginaire populaire, créant une image humoristique mais critique des contradictions sur la protection animale et les modes de vie.

Une structure rythmée

Le parallélisme récurrent, notamment dans la structure répétitive « on veut… mais », rythme le texte et accentue les incohérences : « On veut sauver l’agriculture et l’élevage tout en célébrant les véganes. » « On veut des autoroutes mais se proclame écolo. » Cette construction traduit une montée en tension, culminant dans l’exclamation finale : « Et vous voulez qu’on vous applaudisse ? » Les incises, comme « comme il se faisait appeler » ou « et vous voulez qu’on vous applaudisse ? », créent une proximité avec le lecteur tout en renforçant le ton sarcastique. L’ironie est omniprésente, par exemple dans « vieilles bourgeoises mal aisées du seizième », une expression qui tourne en dérision leur prétendu inconfort financier. La citation de Paulo Coelho, qui ouvre le texte, sert de point de départ pour la réflexion. Elle confère une légitimité philosophique ou intellectuelle au propos, tout en s’accordant avec le ton critique du reste du chapitre.

En qualifiant Coelho de « messager de la paix, comme il se faisait appeler », l’auteur semble également ironiser sur la portée parfois simpliste des aphorismes de cet écrivain. Je déplore que l’auteur n’ait pas approfondi le passé esclavagiste dans son analyse, car il est impossible d’ignorer l’impact de cette sombre période sur la construction des grandes villes européennes, notamment Paris. Cette ville, dont les fondations datent du XVIIᵉ siècle, témoigne d’un labeur titanesque qui, à l’époque, ne pouvait guère être assumé par une majorité de Français. Il serait illusoire de croire que les conditions inhumaines de l’esclavage aient pu susciter quelque forme de consentement ou de passion pour ce travail forcé. Si l’on observe les métropoles d’Europe, largement bâties ou transformées durant la révolution industrielle, on perçoit clairement comment cette accélération du progrès a été liée, en arrière-plan, à l’exploitation des peuples asservis.

J’aurais également souhaité que l’auteur défende davantage l’éducation des valeurs africaines, à l’image de la présence d’écoles françaises en Afrique destinées aux enfants des expatriés. Par ailleurs, son évocation de Kylian Mbappé aurait gagné en profondeur s’il avait fait référence à cette finale de la Coupe du monde au Qatar. Pendant les prolongations, la scène marquante de dix joueurs noirs sur le terrain, accompagnés d’un gardien français, incarne une symbolique forte.  Ce moment dépasse le cadre sportif pour devenir une illustration vivante de l’histoire et de l’identité françaises. Une analyse plus poussée de cet épisode aurait permis de donner une lecture éclairante sur la place des minorités et l’héritage colonial dans le récit national.

Tout compte fait dans cette partie du livre Martial Bissog se place dans une position de dénonciateur des injustices et des hypocrisies sociales, comme le montre l’interpellation finale à travers un style acéré et un ton sarcastique, dénonce les contradictions inhérentes aux sociétés modernes dites « abouties ». En mêlant ironie, hyperboles et figures imagées, l’auteur peint un portrait critique d’une société marquée par des incohérences politiques, sociales et économiques. La réflexion s’appuie sur des exemples contemporains et concrets, rendant le propos percutant et accessible. Cet essai  s’inscrit dans une tradition d’écriture polémique mais rationnelle, où la dénonciation des privilèges et des hypocrisies sert à éveiller une conscience critique chez le lecteur. À travers ses écrits, Martial Bissog montre qu’il est la figure d’un auteur humaniste profondément engagé dans la réflexion sur l’identité et les relations humaines.

Il nous invite à un dialogue sincère et sans fard sur les complexités du monde contemporain. En affirmant que « la politique est l’art de la sophistication de la pensée », il nous pousse à repenser les débats politiques et sociaux non pas à travers des idéologies réductrices, mais par une approche nuancée et réfléchie, où la pensée et la dignité humaine sont au centre de tout processus. Cette sophistication de la pensée n’est pas une fin en soi, mais un moyen pour mener une réflexion collective qui repose sur l’empathie, la compréhension et l’inclusion.

En exhortant ses « sœurs et compatriotes » à un « devoir d’humilité et d’humanisme », Bissog appelle à un changement profond de perspective, il invite  chacun à dépasser les clivages et à s’engager pour un monde plus juste. L’auteur ne se contente pas de critiquer les injustices, il propose des solutions pratiques fondées sur l’amour et la solidarité. « Faites un effort d’humanisme », nous dit-il, une invitation à redécouvrir l’importance des liens humains au-delà des frontières raciales et culturelles. En nous demandant d’ »apprendre à aimer les noirs », il nous rappelle que l’humanisme véritable passe par l’acceptation de l’autre dans toute sa diversité et sa richesse, sans préjugés ni divisions. Ainsi, à travers sa plume, Bissog nous guide vers une société plus ouverte, où la fraternité et l’amour universel sont les piliers d’un avenir commun.

Lire aussi dans la rubrique LIVRES

Les + récents

partenaire

Vidéo de la semaine

évènement

Vidéo


L'actualité en vidéo