Grossesse précoce : Quand devenir mère fait place à la stigmatisation
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Telle est la réalité de nombreuses jeunes filles qui tombent enceinte précocement. Alimatou, habitante de la ville de Yaoundé raconte son histoire.

Au quartier Nkomana à Yaoundé, capitale politique du Cameroun, vit la jeune Alimatou, âgée de 24 ans et étudiante dans une école d’hôtellerie. Son histoire, résonne comme défi face aux normes familiales et sociales auxquelles elle a dû faire face. Alimatou s’en souvient encore, comme si c’était hier. Alors âgée de 17 ans, la jeune fille a commis l’« inacceptable » selon ses proches : porter une grossesse. Dans son état, elle a dû naviguer dans un océan de stigmatisation et de rejet. « Quand j’ai annoncé ma grossesse à ma mère, elle m’a battue. Et m’a dit que j’avais apporté le déshonneur dans la famille », raconte cette jeune orpheline de père, la voix empreinte d’émotions.

Selon sa mère, raconte cette seule fille d’une fratrie de trois, son statut de fervente chrétienne ne lui permet pas d’accepter une telle « abomination ».

Alimatou a conçu en classe de troisième. Sur le plan éducatif, les témoignages font d’elle une élève brillante. Celle-ci rêvait de devenir médecin. Son avenir semblait prometteur jusqu’à la nuit où tout a basculé. « C’était lors d’une petite soirée organisée par les camarades, pendant la période de fêtes. Mon camarade Samuel m’aimait bien. Il avait 23 ans et au lycée toutes les filles voulaient de lui. J’ai considéré cela comme un privilège, et il s’est passé ce qu’il devait se passer. C’était ma première fois », raconte-t-elle avec regret.

Ce qui devait être une soirée à la fois innocente et amusante, s’est transformée en un moment décisif. Quelques mois plus tard, c’est effectif, la jeune fille est enceinte. « Je n’avais jamais pensé que cela pouvait m’arriver. J’ai banalisé le fait et aujourd’hui j’en paie encore les conséquences. Quand j’ai appris que j’étais enceinte, je savais que ma vie ne serait plus jamais la même », confie-t-elle, les yeux embués de souvenirs.

Lorsque sa mère apprit la nouvelle, la réaction fut immédiate et brutale. « Tu es une honte pour notre famille ! » hurla-t-elle, renvoyant sa fille de la maison. Alimatou se retrouva alors chez une tante, mais la honte la suivait partout. Les rumeurs circulaient dans le quartier, dans la famille et même à l’école. Elle était isolée, admet-elle.

Dans son nouveau foyer, elle luttait pour s’adapter à sa nouvelle réalité. Le regard des autres était pesant. « Mes anciennes amies m’évitaient, et je me sentais seule. J’étais devenue la fille qui a échoué », raconte-t-elle, la voix tremblante. Le poids de la stigmatisation était si lourd. La remarque était la même partout où elle passait : les jeunes filles qui accouchent hors mariage sont des échecs et elle n’en faisait pas exception. Peu à peu, son rêve de devenir médecin s’évanouissait. Elle n’allait plus aux cours, pour ne pas faire face au regard de l’autre à l’école, dans la rue.

Après avoir accouché quelques mois plus tard, Alimatou déclare s’être sentie plus forte et prête à tout pour prendre soin de son bébé. « Ma fille était une force pour moi. Au fond, je savais que je devais me battre pour prendre soin d’elle car son père ne s’était jamais présenté », raconte-t-elle.

Par la suite, « Étant encore chez ma tante, j’ai commencé à faire de petits gâteaux que je déposais dans des boutiques et salons de coiffures, grâce à un petit capital de 10 mille Fcfa qu’elle m’avait donné. En fin de semaine, je pouvais me retrouver avec cinq mille fcfa. Ce qui m’a permis de faire de petites épargnes. J’y associait des oranges et des chips de plantain », poursuit-elle. Quand ma fille a eu deux ans, le suis retournée à l’école avec le soutien de ma tante, qui a bien voulu prendre soin du bébé. Aujourd’hui je suis dans une formation hôtelière où j’apprends la restauration ».

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