GRAVE ATTEINTE AU DROIT A LA SANTE A L'HOPITAL GYNECOLOGIQUE, OBSTETRIQUE ET PEDIATRIQUE DE YAOUNDE
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CAMEROUN :: GRAVE ATTEINTE AU DROIT A LA SANTE A L'HOPITAL GYNECOLOGIQUE, OBSTETRIQUE ET PEDIATRIQUE DE YAOUNDE :: CAMEROON

A l’attention de la communauté nationale et internationale :

1. Que Mandela Center International vient de visionner ce 11 février 2024, avec effroi, choc et consternation, comme des millions d’internautes, une vidéo devenue virale sur les réseaux sociaux montrant une nourrisson ensanglantée agonisante, avec un pronostic vital fortement engagé, abandonnée sans soins  aux urgences de l'Hôpital Gynécologique, Obstétrique et Pédiatrique de Yaoundé (HGOPY), situé au quartier Ngousso ; 

2. Qu’il est constant cette formation sanitaire, de 1ère catégorie, construite avec l'aide du gouvernement chinois, a été instituée en septembre 2001 par Décret  présidentiel N° 2001/2711 et est spécialisé dans les soins aux femmes et aux enfants depuis son inauguration officielle le 28 mars 2002 par le président Paul Biya lors d'une cérémonie en présence du vice-ministre chinois de la Santé ; 

3. Que selon des informations en notre possession, il s’agit d’une nourrisson victime d’un grave accident de circulation de moto avec sa mère en date du 10 février à  Yaoundé et conduite d’urgence dans cette formation sanitaire par un passant inconnu de la famille à bord d’un véhicule de couleur blanche de marque Pick-up;

4. Que conduite, dans un état comateux et ensanglanté, aux urgences de l’HGOPY alors que sa génitrice a déjà perdu la vie, la nourrisson a été abandonnée sans soins pendant une quinzaine de minutes malgré les gémissements des bienfaiteurs qui l’ont  conduit alors qu’elle avait URGEMMENT besoin de soins médicaux ; 

5. Qu’il est constant que le personnel soignant a été incapable d’assurer le minimum qui s’impose en cette circonstance à savoir l’admettre dans une salle de soins, préférant s’en tenir au téléphone aux consignes de leur chef chirurgien qui avait déserté son poste ; 

6. Qu’il s’agit d’une défaillance de l'éthique en milieu hospitalier alors que la compétence éthique de l'infirmier permet de résoudre des problèmes moraux nouveaux et imprévus, en sachant innover afin de trouver le comportement le plus légitime et le plus juste possible face à une situation contextuelle précise ;

7. Que Mandela Center International est en mesure d’affirmer qu’en toute cruauté, irresponsabilité et insouciance, le personnel soignant de l'Hôpital Gynécologique, 
Obstétrique et Pédiatrique de Yaoundé a cruellement manqué à son devoir en abandonnant cette nourrisson sans soins alors que son pronostic vital était fortement 
engagé ;

8. Que dans une réaction sur son compte Twitter, quelques heures après le drame,le ministre camerounais de la santé publique, Dr. MANAOUDA Malachie, en jouant
au ponce-pilatisme et au défaitisme a indiqué que « Suite à la vidéo devenue virale sur les RS sur la prise en charge d’un bébé reçu à l’Hôpital Gyneco de Yaoundé, j’ai saisi la direction de cette structure pour des explications. En regrettant quelques défaillances, l’enfant polytraumatisé a été bien stabilisé et référé à l’HÔPITAL GÉNÉRAL DE YAOUNDÉ (HGY) ».

9. Que ce triste et révoltant spectacle gouvernemental intervient au moment où au Cameroun, l’organisation de l’offre de soins d’urgence est toujours approximative, 
les référentiels de soins n’existent pas, et le système de référence est non fonctionnel ; 

10. Que la réforme des Services d’Accueil des Urgences (SAU) des hôpitaux, a été prescrite, il y a quelques années, par le Premier Ministre, Chef du Gouvernement 
à la suite de nombreuses plaintes des usagers et matérialisée dans les feuilles de route du ministère de la Santé Publique sous forme d’actions visant à humaniser 
l’accueil des patients et améliorer leur prise en charge précoce adéquate dans les SAU ; 

11. Qu’il est constant que le diagnostic posé sur les hôpitaux camerounais a toujours particulièrement concerné les SAU, qui sont des unités des plus visibles et des plus sensibles et la prise en compte du problème par le Premier Ministre, par sa prescription d’engager des actions visant à humaniser l’accueil des patients et 
améliorer leur prise en charge précoce adéquate dans les SAU constitue une circonstance favorable à sa résolution ; 

12. Que la Stratégie Sectorielle de la Santé 2016-2027 prescrit, dans le sens d’améliorer la prise en charge des urgences, de contribuer à accélérer le développement du capital humain et de s’aligner sur les Objectifs de Développement Durable en accélérant la mise en place d’une couverture sanitaire universelle ;

13. Que Mandela Center International est en mesure d’affirmer que cette attitude irresponsable du personnel soignant d’un hôpital de référence constitue CLAIREMENT une grave atteinte au droit à la santé reconnu dans tous les instruments juridiques internationaux relatifs aux droits humains pourtant librement ratifiés par l’Etat du Cameroun ;

14. Que le droit au meilleur état de santé possible suscite un intérêt croissant, notamment de la part des organes de suivi des traités relatifs aux droits de l’homme, de l’Organisation Mondiale de la Santé et du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies qui, en 2002, a créé le mandat de Rapporteur spécial sur le droit de la santé qu’à toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale possible ; 

15. Que l’Etat du Cameroun à travers ses structures sanitaires dont l'Hôpital Gynécologique, Obstétrique et Pédiatrique de Yaoundé (HGOPY) a pour obligation principale de protéger et de promouvoir les droits de l’homme, lesquelles obligations sont définies et garanties par le droit international coutumier (pratique générale des États acceptée comme étant de droit et engendrée par un sentiment d’obligation juridique) et les traités internationaux relatifs aux droits de l’homme, créant des obligations contraignantes pour l’Etat du Cameroun qui les a ratifiés pour donner effet à ces droits ; 

16. Que les obligations de l’Etat du Cameroun en matière de santé à travers le ministère de la santé publique qui est une entité étatique relèvent de trois catégories, à savoir les obligations de respecter (s’abstenir d’entraver directement ou indirectement l’exercice du droit à la santé), les obligations de protéger (prendre des  mesures pour empêcher des tiers de s’immiscer dans l’exercice du droit à la santé) et les obligations de mettre en œuvre (adopter des mesures appropriées d’ordre législatif, administratif, budgétaire, judiciaire, incitatif pour assurer la pleine réalisation du droit à la santé) ; 

17. Que l’obligation de porter assistance à des personnes en danger dont cette nourrisson apparaît comme une manifestation de la solidarité (ou de la fraternité) entre les citoyens et aucun citoyen ne saurait être aujourd’hui victime de l’attitude irresponsable des agents de l’Etat du Cameroun ; 

18. Que dans une République qui n’est pas une simple addition d’individualités, mais également un rassemblement de citoyens animés par un projet commun, il est  indispensable qu’une telle obligation soit mise à la charge de chacun dont du ministère de la santé publique ; 

19. Que l’obligation d’agir au bénéfice d’autrui lorsque celui-ci se trouve en danger de mort ne relève pas seulement de la morale (elle peut être le fruit de la morale  collective ou individuelle. Les philosophies et religions diverses obligent chacun à intervenir : « Qui peut et n’empêche pêche ») mais surtout du devoir qui incombe à toute personne, sans qu’il soit nécessaire qu’elle soit juridiquement tenue à quelque chose à l’égard de la personne en danger ; 

20. Que la non-assistance à personne en danger est clairement sanctionnée par le code pénal Camerounais en son article 283 qui dispose : « Est puni d’un emprisonnement de un mois à trois ans et d’une amende de 20.000 à 1 million de francs ou de l’une de ces deux peines seulement celui qui s’abstient de porter à une personne en péril de mort ou de blessures graves l’assistance que, sans risque pour lui ni pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours » ; 

21. Que les conditions liées aux infractions de l’article 74 (a) du code pénal dispose que : « les personnes morales sont responsables pénalement des infractions commises pour leur compte, par leurs organes ou représentants » ; 

22. Que le droit à la santé est un droit fondamental de l’homme (non négociable) édicté par la loi internationale sur les droits humains, notamment dans la Constitution de l’OMS (1946), dans la Déclaration universelle des Droits de l’homme de 1948 (article 25), dans le Pacte International sur les droits économiques, sociaux et culturels de 1966 (article 12), dument ratifiés par la République du Cameroun ;

23. Que la Constitution de l'OMS établit que «La possession du meilleur état de santé qu’il est capable d’atteindre constitue l’un des droits fondamentaux de tout être humain, quelles que soient sa race, sa religion, ses opinions politiques, sa condition économique ou sociale » ; 

24. Que dans son Observation générale 6, le Comité des Droits de l’Hommedes Nations Unies a établi que le droit à la vie est aussi un élément du droit à la santé ; 

25. Que de surcroît, la Constitution camerounaise révisée du 18 Janvier 1996 mentionne le droit à la santé comme une composante essentielle du droit à la vie, dont de la dignité humaine ;

26. Que le Point 3 sur les Objectifs de Développement Durable sur la bonne santé et le mieux-être prescrit impérativement au gouvernement camerounais de « Donner aux individus les moyens de vivre une vie saine et promouvoir le bien-être à tous les âges » ; 

27. Que le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966 que l’Etat du Cameroun a librement adhéré le 27 juin 1984 prescrit en son article 12 que « Les Etats parties au présent Pacte reconnaissent le droit qu'à toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale qu'elle soit capable d'atteindre » ; 

28. Que le droit à la santé signifie CLAIREMENT que chacun devrait avoir accès aux services de santé dont il a besoin, au moment où il en a besoin et là où il en a besoin, sans être confronté à des difficultés (financières) ;

29. Qu'en tant qu'Etat partie à ces textes internationaux, l'Etat du Cameroun est IMPERATIVEMENT tenu de respecter les droits qui y sont contenus et d'exercer la diligence nécessaire pour prévenir et réprimer les violations de ces droits ; 

30. Que la responsabilité de tous ces faits est ainsi CLAIREMENT attribuée à l’Etat du Cameroun en vertu du droit international, au terme des articles 4 et suivants d’une résolution 56/83 de l’Assemblée générale des Nations Unies en date du 12 décembre 2001 sur la responsabilité de l’Etat pour FAIT INTERNATIONALEMENT ILLICITE.

Eu égard à tout ce qui précède, Mandela Center Internationalet ses partenaires internationaux :

1. Condamnent, avec la toute dernière énergie, cette attitude irresponsable et suicidaire du personnel de l'Hôpital Gynécologique, Obstétrique et Pédiatrique de Yaoundé (HGOPY)de porter gravement atteinte au droit à la santé d’une nourrisson et ce contrairement aux instruments juridiques internationaux relatifs aux droits de l’homme ; 

2. Exigent, avec fermeté, des explications IMMEDIATES du Professeur MBU Robinson ENOW, Directeur de l’HGOPY pour ce manquement grave au devoir et atteinte au droit à la santé prescrit par les instruments juridiques internationaux ; 

3. Demandent, clairement, au Ministre camerounais en charge de la santé publique, le Dr. MANAOUDA MALACHIE de prendre des sanctions fermes à l’endroit des auteurs de ces actes ignobles ; 

4. Demandent ouvertement et clairement, aux autorités camerounaises de prendre toutes les dispositions pour rendre effective la procédure des Bons d’Urgence sur l’ensemble des formations sanitaires nationales ; 

5. Rappellent, avec fermeté, au gouvernement camerounais ses obligations de respecter, de protéger et de mettre en œuvre le droit de tous les Camerounais à la santé, sans aucune restriction ;

6. Recommandent vivement au Gouvernement Camerounais des mesures spéciales conformément à ses engagements internationaux en vue de la protection effective des droits fondamentaux qui sont ainsi violés au quotidien.

Fait à Yaoundé, le 11 février 2024
Le Secrétaire Exécutif Permanent
Jean Claude FOGNO

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