Alors que les appels invitant Paul Biya, le président de la république du Cameroun se multiplient de l'intérieure, un autre son de cloche vient de s'y ajouter: celui des artistes. Il est bien vrai que  toute  démocratie se manifeste dans le fait que les gens ont la latitude de concevoir toutes sortes d’idées et qu’ils jouissent de la liberté qu’il faut pour les exprimer. Mais quand son opinion frise le calcul, ça devient du ridicule voire même de la honte.

Le 21 mars 2016, 46 artistes musiciens basés dans la région du Littoral ont signé une «motion de soutien et de déférence» à l’intention du Président de la République, Paul Biya. Conduits par Charly Nelle, ils ont remis leur correspondance à Narcisse Mouelle Kombi, Ministre des Arts et de la Culture, au cours d’une cérémonie solennelle organisée dans les locaux de son département ministériel.

Ces artistes ont prié le «Dieu Tout-puissant de lui accorder (à Paul Biya, ndlr) ainsi qu’à sa chère épouse Madame Chantal Biya succès, bonheur, longévité dans l’exercice de ses très hautes et exaltantes fonctions».

Cet appel à la candidature de Paul Biya à l'élection présidentielle prochaine au Cameroun, arrive après d’autres initiatives initiées notamment par les artistes des régions du Centre, du Nord-Ouest et de l’Ouest.

Drôle d’appel qui ressemble à un film de fiction qui déborde notre entendement car, l’univers des artistes camerounais est bercé par une mélodie lugubre qui s’éternise. Parlez-leur du droit d’auteur et ils évoquent un incroyable capharnaüm. Aucun centime n’est plus payé depuis belle lurette. 

Ces artistes mendiants n'ont plus de salle de concert au Cameroun. Ils s'égosillent nuit et jour avec leurs instruments musicaux vétustes dans les cabarets qui n'ont que de nom. Avec la nouvelle technologie, leurs oeuvres sont victimes de la piraterie

Comme on pouvait s’y attendre, tout le monde n’est pas d’accord avec cette démarche. Quelques artistes  pensent différemment dans les avis recueillis par le quotidien Le Jour dans son édition du 15 avril dernier. Ekambi Brillant déclare : « Ils sont libres de faire ce qu’ils veulent. S’ils veulent faire de la politique, qu’ils le fassent. Nous sommes en démocratie. Mais ce n’est pas une bonne chose pour un artiste qui devrait rester neutre. Dans la culture, nous sommes certes encadrés par l’Etat, mais cela ne veut pas dire que l’on doit faire des motions de soutien au président en place. C’est déplorable. C’est une poignée d’artistes qui l’a fait ». 

Un point de vue que partage Joe La Conscience. Reconnu pour sa critique acerbe contre l’ordre gouvernant, ne met pas les gants pour tancer ses camarades : « C’est une folie. C’est un appel du ventre certainement, un appel de la famine. Ces artistes doivent être atteints du syndrome de Stockholm, parce qu’avec la gestion du droit d’auteur au Cameroun et la morbidité dans laquelle le régime de Biya a plongé l’art musical, que ces artistes se mettent à appeler un dirigeant aussi incompétent à mourir au pouvoir, je crois que c’est tout simplement une hérésie ». 
 
D'où vient-il que ces artistes se massent ainsi derrière un homme qui a semé la désolation au sein même de leur corporation par sa politique culturelle désinvolte ?

N'ayant pas d'infrastructure appropriée au Cameroun, n'ayant plus de salle de spectacle idoine, ces derniers espèrent comme la plus part d'entre eux de prester à l'étranger. Face à ce manquement de leur part, que pense la diaspora progressiste camerounaise de cette posture?

Faut-il au niveau de la diaspora camerounaise boycotter les artistes signataires des appels à la candidature de Paul Biya?  Telle est la question de la semaine.

Une liste complète de ces artistes signataires des appels du ventre serait necessaire.

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