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© lexpress.fr : Vincent Hugeux
- 24 Sep 2015 15:16:37
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BURKINA FASO :: Burkina : un coup (d’Etat) pour rien
Cynisme, cécité ou inconscience ? Hier à Ouagadougou, au terme de la cérémonie rétablissant dans ses fonctions le président de la transition Michel Kafando, épilogue du coup d’Etat foireux dont il fut le « cerveau », le général de brigade Gilbert Diendéré, droit dans ses rangers, a osé ce sidérant raccourci : « Le putsch est terminé, on n’en parle plus. » Un peu court, non ? Parlons-en au contraire.
Epris de protocole et d’apparat, de garde-à-vous impeccables, de talons qui claquent, de lits au carré de treillis aux plis millimétrés, d’ « honneur » et de « dignité », ce Saint-Cyrien ébauche ensuite un étrange mea culpa. « Le plus grand tort, confesse-t-il, est d’avoir fait ce putsch ». Tardif accès de lucidité, qu’atteste aussi une déroutante lapalissade : « Aujourd’hui, quand on parle de démocratie, on ne peut pas se permettre de faire des actions de ce genre » … Puis -on remarquera la hiérarchie des regrets chez cet homme d’ordre-, un triple aveu: « C’est du temps perdu, je le reconnais. Des moyens perdus, je le reconnais. Ces sont des vies humaines perdues, je le reconnais. » Difficile, à vrai dire, de contester le désastre et son ampleur.
Autre morceau choisi, à la lisière de l’obscénité : « Ce qui me rend de bonne humeur, c’est qu’il n’y a pas eu d’affrontements. » Bien sûr, le patron en sursis d’un Régiment de sécurité présidentielle (RSP) qui ne vaut guère mieux fait ici allusion au dénouement négocié de l’épreuve de force engagée entre sa garde prétorienne et les « frères d’armes » loyalistes venus de province. Il n’empêche : on transmettra l’excellente nouvelle aux familles des dix civils tués, fauchés par la répression brutale du sursaut citoyen ouagalais, reflet d’une inaltérable vigilance civique .
S’il évite le pire, l’accord conclu la nuit précédente sous l’égide d’une poignées de chefs d’Etat de la Cedeao et du Moro Naba, roi des mossis -l’ethnie majoritaire au pays de Hommes intègres- et chef coutumier révéré, ne résout pas tout. Il s’en faut. Reste en effet à solder les arriérés de cette semaine calamiteuse. Quid de l’amnistie exigée par les putschistes ? Quid de la participation aux scrutins présidentiel et législatif à venir des partisans de Blaise Compaoré, bannis en bloc en « vertu » d’une loi électorale outrancière. Et quid du RSP ? Si les candidats à la magistrature suprême, qui n’ont pas tous brillé par leur bravoure et leur fermeté d’âme au cœur de la tempête, exigent désormais haut et fort sa dissolution, il faudra bien trouver un emploi à ses 1300 soldats supposés d’élite. « Inimaginable de le conserver en l’état », tranche le premier ministre par intérim Isaac Zida, un ancien de la maison. C’est ainsi : l’échec d’un pronunciamiento hasardeux ne suffit pas à garantir la réussite d’une mue démocratique.
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