Cameroun, Assemblée nationale: Le Député Jean Michel Nintcheu épingle le Minfi
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Le ministre des Finances est passé sous les fourches caudines du député Sdf du Wouri-Est, au cours d'une session plénière de la Chambre basse, jeudi 15 juin 2017.

A la faveur de l'examen du projet de loi portant ratification de l'ordonnance n° 2017/001 du 17 mai 2017 modifiant et complétant certaines dispositions de la Loi n°2016/018 du 4 décembre 2016 portant loi de finances de la République du Cameroun pour l'exercice 2017, le député du Social democratic front (Sdf), a interpellé le ministre des Finances sur un certain nombre de dossiers. Au sujet de l'endettement du pays, le président régional du Sdf pour le Wouri, estime en s'appuyant sur les statistiques de la Caisse autonome d'amortissement (Caa), qu'il est à hauteur de 4.503 milliards Fcfa répartis ainsi qu'il suit : 3480 milliards de dette extérieure et 1023 milliards Fcfa de dette intérieure.

Toutes choses aux antipodes de la posture du ministre de l'Economie, de la planification et de l'aménagement du territoire (Minepat), Louis Paul Motazé, qui a déclaré sur une chaîne de télévision de la place que le Cameroun n'est endetté qu'à hauteur de 25% de son produit intérieur brut (Pib). Selon toute vraisemblance, ces chiffres sont inexactes au regard de ceux ventilés par la Caa, sérine Jean-Michel Nintcheu qui conclut que le rêve du Minepat serait de le porter à 85% comme dans tout pays normal.

Pour cet élu de la nation, la dette contractée par le gouvernement est mauvaise. Elle n'est pas de nature à pouvoir permettre au pays de mieux emprunter dans le futur, du fait de son mauvais classement par les agences de notation. Une situation rendue complexe par la difficulté actuelle du Cameroun à lever des fonds sur les marchés financiers avec pour conséquence la crise sévère qui s'abat sur le pays, l'insuffisance des réformes structurelles et aux mauvais choix économiques. Le député soutient que le gouvernement doit avouer son incapacité à manager le pays.
«On ne bombe pas le torse quand on a échoué. Ayez l'humilité de reconnaître devant la représentation nationale que le régime auquel vous appartenez a plongé le Cameroun dans un désastre économique. Vous avez plongé le pays dans un abîme sans précédent et vous cherchez à en sortir en vous agrippant le long des parois. C'est la raison pour laquelle dans le projet de loi sous examen vous avez réparti les emprunts en deux catégories à savoir les emprunts concessionnels de 500 milliards Fcfa et les emprunts non concessionnels de 1.200 milliards Fcfa ».

Paradis fiscaux

Poursuivant sur cette lancée, Jean-Michel Nintcheu estime que le régime demande à la représentation nationale de lui délivrer un chèque en blanc pour jeter le pays dans la gueule des prédateurs financiers et porter ainsi la dette du pays à plus de 6.200 milliards Fcfa. «Encore faudrait-il savoir si le Minfi n'en fait pas partie à travers des sociétés écrans disposées dans les paradis fiscaux. Depuis que nous demandons la mise sur pied d'une commission d'enquête parlementaire qui aura entre autres charges d'inspecter les véritables identités des acquéreurs des parts de l'État, vous freinez des quatre fers». Résultats des courses, les Camerounais ploient sous le poids de la dette alors que les infrastructures y relatives ne rapportent rien. Les travaux accusent un retard chronique et sont scandaleusement surfacturés. On observe cette pratique dans tous les projets dits structurants. Pour faire simple, prenons le cas du stade de Japoma. Ce marché d'un montant de 160 milliards Fcfa à été attribué à une entreprise turque qui n'a jamais construit un seul stade dans le monde et qui, selon certaines indiscrétions, sous-traite les travaux aux entreprises locales. Ce montant de 160 milliards Fcfa est 60% plus cher au Cameroun que dans les pays de la sous-région qui ont construit des stades de même capacité...

Le président régional du Sdf pour le Littoral croit dur comme fer que la crise économique que subit le Cameroun est plus structurelle que conjoncturelle. La corruption et les détournements de deniers publics constituent l'Adn de l’administration publique. Le député étaye son propos d’exemples éloquents. Dans ce droit fil, les salaires fictifs ont coûté à notre Trésor public plus de 1920 milliards Fcfa en 20 ans. Et on n’est guère sorti de l’auberge. La saignée se poursuit.

Retro-commissions

«Si on avait attaqué dès le début cette gangrène, le Cameroun aurait pu éviter les affres des différents programmes drastiques imposés par le Fmi qui n'ont abouti qu'à une remise de la dette de 1420 milliards à la faveur de l'atteinte du point d'achèvement de l'initiative Ppte. Ces 1420 milliards Fcfa sont de loin inférieurs aux 1920 milliards Fcfa détournés dans votre administration publique au seul titre des salaires fictifs en 20 ans». Avec fougue, JM Nintcheu, tire a boulets rouges sur le scandale des marchés fictifs de gré à gré. Plus de 5.000 milliards évaporés en cinq ans dont 926 milliards Fcfa pour le seul compte du budget de fonctionnement de l’Etat de l’exercice 2015 (Rapport de la Chambre des comptes). Que dire des détournements opérés pour le compte des budgets d’investissement depuis plus de cinq ans ?

Le refus obstiné de mettre sur pied la Caisse des dépôts et consignations engendre entre 6.800 et 9000 milliards de pertes sèches en 9 ans. La Caisse des dépôts et consignations est régie par la loi N° 2008/003 du 14 avril 2008. Neuf ans après l'adoption de cette loi par l'Assemblée nationale, elle n'a toujours pas été mise sur pied. Cet organisme stratégique aurait pu contribuer au financement de certaines activités notamment les projets étatiques, si l’on s’en tient à l’article 4 de la loi du 14 avril 2008 qui dispose que : «la Caisse des dépôts et consignations peut concourir au développement économique du Cameroun, par l'intermédiaire des structures spécialisées, selon les priorités définies par le gouvernement». Plutôt que de mettre sur pied cette Caisse qui aurait pu financer des projets étatiques, le gouvernement à travers le Minfi opte toujours pour la piste désastreuse de l'endettement frénétique à des taux usuraires et sur fond de forts soupçons de rétro-commissions.

Le Minfi sur la défensive

Monsieur le ministre, la coupe est loin d'être pleine. Il est donc constant que le Cameroun n'aurait jamais connu la crise actuelle si, en plus d'implémenter les choix économiques justes et réalistes axés sur l'agriculture, l'industrialisation, la recherche et l'innovation, le système auquel vous appartenez avait véritablement pourchassé les métastases structurelles qui ont provoqué au niveau des caisses de l'État des pertes lourdes égales ou supérieures au Pib national. Malheureusement pour le pays, vous choisissez une fois de plus la voie facile de l’endettement qui plombera davantage l’avenir des générations futures. C’est en cela que vous êtes inconséquent» conclut Jean Michel Nintcheu.

A la suite du député, l’argentier national, à son corps défendant, a expliqué aux députés que la dette du Cameroun reste en gros soutenable et que le gouvernement s’emploie à implémenter les réformes nécessaires pour corriger certains dysfonctionnements. 

Parlant de la lutte contre la corruption, le Minfi se réjouit des structures mises sur pied par le pouvoir en place à l’effet de tordre le cou au phénomène qui constitue une pieuvre.

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