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© L’Oeil Du Sahel : INNOCENT-BLAISE YOUDA
- 14 Jun 2016 00:30:01
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CAMEROUN :: MBAIMBOUM : Le marché de bétail sous protection militaire :: CAMEROON
Au milieu des attaques de coupeurs de route et autres brigands dans cette zone de la région du Nord-Cameroun, le grand marché de bétail reste une plaque tournante entre le Cameroun, le Tchad et la République centrafricaine.
Ce 21 mai 2016, le jour se lève à peine dans la localité de Mbaimboum, située à environ 35 Km de Touboro. Comme tous les samedis, c’est le grand jour du marché de bétail. Partis de Touboro à 8 h, des commerçants et autres acheteurs convergent sur le marché, en arpentant une route non bitumée et en très mauvais état qui relie les deux localités, sises dans le département du Mayo-Rey. Mais ce n’est pas la décrépitude de cette route qui constitue le plus grand danger pour ces commerçants et clients. Ce sont bien les coupeurs de route qui ne lâchent pas prise.
Et justement sur le trajet ce 21 mai 2016, un groupe d’environ 7 coupeurs de route a tenté d’agresser un moto-taximan et deux de ses passagers au lieu-dit Karang-Padjama. Fort heureusement, grâce à une intervention militaire, ils ont échappé aux griffes des gangsters. «Face à ce grave climat d’insécurité, les autorités ont essayé de renforcer le dispositif sécuritaire dans la localité de Touboro.
En réalité, si vous voulez vous rendre au marché de Mbaimboum en sécurité le samedi, il faut tout faire pour se faire escorter par le Bataillon d’intervention rapide (Bir). Les militaires du BIR organisent deux escortes pour accompagner les commerçants de Touboro à Mbaimboum entre 6 h et 7 h. Le même exercice est répété dans la soirée à la fermeture du marché dans le sens Mbaimboum-Touboro, généralement entre 18 h et 19 h. Si vous n’êtes pas dans ces deux escortes, naturellement, vous vous exposez aux coupeurs de route, même si les éléments du BIR et du BIM (Bataillon d’infanterie motorisé) veillent au grain à longueur de journée», explique Victor Soropole, agent communal au marché de bétail de Mbaimboum.
FRONTIÈRES
A 9 h 40, les rescapés de l’agression de Karang-Padjama, comme de nombreux autres acheteurs, se mêlent aux commerçants déjà bien installés au marché de bétail de Mbaimboum. Il faut d’abord se faire enregistrer dans un hangar de fortune qui sert de poste de contrôle du marché. Celui-ci a été bâti après la destruction de la toiture du bâtiment qui abritait les bureaux de la direction du marché, il y a quelques années. En plus des agents communaux et du chef de centre vétérinaire, l’on observe une forte présence des forces de l’ordre tout autour du marché.
Gendarmes, policiers et éléments du BIR et du BIM se mobilisent ainsi tous les samedis pour la sécurité des personnes et des biens. Au milieu de tout ce dispositif, ce sont 800 à 900 boeufs regroupés par secteur, en fonction de leur origine. «Nous sommes encore en saison sèche, c’est pour cela que vous ne voyez pas assez de bêtes. En saison des pluies, on dénombre ici, tous les samedis, près de 1500 à 2000 bêtes. Elles viennent naturellement du Cameroun, mais aussi du Tchad et de la République centrafricaine. Les clients, quant à eux, sont essentiellement des Camerounais, des Soudanais, des Nigérians et des Gabonais», souligne Victor Soropole.
Ici, les bêtes sont vendues sur pattes. Aussi, Mbaimboum constitue- t-il un des plus grands points de ravitaillement en viande de boeuf de la partie Sud Cameroun. La preuve, à un jet de pierre du site du marché, se trouve un point d’embarcation des bêtes pour les villes de Yaoundé, Douala, et les pays voisins que sont le Nigeria et le Gabon. Il en est ainsi tous les week-ends à Mbaimboum, «village du chef» en langue Mboum, et qui est situé à la frontière du Tchad et de la RCA. Un voisinage qui ne fait pas que du bien à Mbaimboum.
«Pendant que nous déplorons les difficultés liées à l’insécurité, notamment sur l’axe Touboro-Mbaimboum, il faut également noter que la localité a été très affectée par le phénomène des Séléka lors des troubles en République centrafricaine. Plusieurs éleveurs centrafricains se sont vus piller leur bétail par ces rebelles, ce qui, du même coup, a réduit les potentialités du marché de Mbaimboum, avec un impact sur les recettes pendant longtemps », explique Souleymanou, un commerçant camerounais.
TAXES
En tout cas, le prix d’un boeuf à Mbaimboum, varie entre 100 et 200 000 Fcfa. Et ce sont généralement des grands revendeurs, les fameux «Palké» qui effectuent le déplacement du «village du chef». Une aubaine pour la commune de Touboro, qui peut engranger chaque samedi à Mbaimboum, la rondelette somme de 200 à 300 000 Fcfa de recettes communales en saison sèche. Et en saison des pluies entre 800 à 900 000 Fcfa.
La différence d’approvisionnement du marché en bétail entre les deux saisons s’explique par le fait qu’en saison des pluies, il y a plus de pâturage pour les animaux. Mais il n’y a pas que la mairie qui perçoit des taxes sur le bétail au marché de Mbaimboum. Les vendeurs de boeufs élevés au Cameroun, payent également une taxe de 1 500 Fcfa par bête ; somme que se partagent la commune et le ministère de l’Elevage, des Pêches et Industries animales (Minepia). La plus grande partie des taxes provient des boeufs venus de l’étranger. Pour chaque bête, les commerçants étrangers doivent verser la somme de 4 700 Fcfa.
Cette somme est répartie ainsi qu’il suit : 1 000 Fcfa pour la mairie, 2 000 Fcfa pour les Douanes, 1000 Fcfa pour les Impôts et 700 Fcfa pour le Minepia. Avant le retour de l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (Undp) à la tête de l’exécutif communal de Touboro, le lamido de Rey-Bouba, recevait également un subside par tête de boeuf vendue.
«La répartition de ces taxes a fait l’objet de plusieurs bagarres entre les autorités administratives et les dogaris du lamido de Rey-Bouba. Quand nous avons repris la commune en 2013, on a constaté que l’ancienne équipe du Rdpc reversait une taxe de 1000 Fcfa par bête vendue dans ce marché aux dogaris, argent qui était destiné ensuite au lamido.
Personne n’a pu nous dire à quoi était affecté cet argent et quel texte justifiait cette perception. Les dogaris nous ont simplement dit que c’était d’autorité qu’ils devaient percevoir cette taxe et la reverser à leur chef, ce que nous avons supprimé au prix de fortes luttes», explique un conseiller municipal de Touboro.
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