La loi Lamine Gueye du 7 mai 1946 qui fit des Camerounais des citoyens français et la réaction hostile de Charles de Gaulle.
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La loi Lamine Gueye du 7 mai 1946 qui fit des Camerounais des citoyens français et la réaction hostile de Charles de Gaulle. :: CAMEROON

La loi la plus révolutionnaire adoptée, en France, au lendemain de la seconde guerre mondiale, et grâce aux élus africains, fut la loi 46-940 du 7 mai 1946, dont l'initiateur et le rapporteur fut le député sénégalais Lamine Gueye. Elle octroyait la citoyenneté française à tous les « indigènes » d’Afrique, y compris les Camerounais.

Jusqu'alors, le gouvernement français établissait une différence fondamentale entre les "citoyens" français et les "sujets" français. Les sujets français, soumis au code de l'indigénat, avaient l’obligation de payer les impôts et de mourir pour la patrie, la France, mais n'avaient pas de droits civiques ; ils ne comptaient pas dans le débat politique. La loi Lamine Gueye est venue abolir cette discrimination.

Les opposants au projet Lamine Gueye se sont aussitôt rassemblés autour du général de Gaulle et ont créé le RPF, Rassemblement du Peuple Français, en 1947, afin de combattre ces idées « saugrenues » et ô combien contraires à l’idée de la France « éternelle », c'est à dire toute blanche et chrétienne. Ils ont aussitôt voté deux lois :

1 - Loi du 5 octobre 1946, modifiée par celle du 27 août 1947 établissant des restrictions à l'exercice du suffrage universel. Au Cameroun, celle-ci a donné : 30 « indigènes » valaient 1 seule voix, tandis que 1 Blanc valait de son côté la même voix.

2 - Loi du 5 octobre 1946 instituant un double collège d'électeurs ; d'un côté les Blancs, de l'autre les anciens « indigènes ». En clair, la ségrégation raciale. L’Apartheid sans le

nom. L’Assemblée Représentative du Cameroun, ARCAM, de 1947 à 1952, et l’Assemblée Territoriale du Cameroun, ATCAM, de 1952 jusqu’au scrutin du 23 décembre 1956, étaient de ce fait des assemblées ségrégationnistes. Les Blancs et les Noirs n’étaient pas mélangés. Chaque race était de son côté, et, naturellement, les élus blancs se plaçaient au-dessus des élus noirs.

Autre mesure prise par les gaullistes pour contrecarrer la loi Lamine Gueye : le trucage électoral. Au Cameroun, le champion toutes catégories en Fraudes électorales, a été le haut-commissaire André Soucadaux. Il a systématiquement barré la porte de l’assemblée aux upécistes.

Mais, malgré ces freins, le processus de l’égalité entre les Blancs et les Noirs engagé par la loi Lamine Gueye va finir par triompher. En 1956, la loi-cadre Defferre introduit définitivement le collège unique. Plus de ségrégation raciale à l’assemblée, tout comme aux élections. Désormais, 1 homme, Blanc ou Noir, devenait égal à 1 voix.

Lorsque de Gaulle prend le pouvoir en 1958, il est trop tard pour revenir en arrière, c’est-à-dire à 1 Blanc 1 voix, et plusieurs « indigènes » 1 voix. Il ne lui reste plus qu'une solution pour sauvegarder la France blanche : l'instauration d'un nouveau régime avec une nouvelle Constitution, donnant un maximum de pouvoir à l'exécutif, et marginaliser ainsi le Parlement où il y avait trop de Nègres. Finalement, pour ce désir de préservation raciale et afin de ne pas mener indéfiniment de coûteuses et impopulaires guerres coloniales, il s’est résigné, la mort dans l’âme, à octroyer l’indépendance aux colonies françaises d’Afrique noire.

Quant à la loi Lamine Gueye, proprement dite, en voici l’économie :

« Loi 46-940 du 7 mai 1946 tendant à proclamer citoyens tous les ressortissants des territoires d'outre-mer.

L'Assemblée nationale constituante a adopté,

Le président du Gouvernement provisoire de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

Article unique. - A partir du 1er juin 1946, tous les ressortissants des territoires d'outre-mer (Algérie comprise) ont la qualité de citoyen, au même titre que les nationaux français de la métropole et des territoires d'outre-mer. Des lois particulières établiront les conditions dans lesquelles ils exerceront leurs droits de citoyens.

La présente loi, délibérée et adoptée par l'Assemblée nationale constituante, sera exécutée comme loi de l'Etat.

Fait à Paris, le 7 mai 1946, Félix Gouin Par le Président du Gouvernement provisoire de la République :

Le ministre de l'intérieur, ANDRE LE TROQUER

Le ministre de la France d'outre-mer, MARIUS MOUTET

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