Cameroun: Michel MOMBIO « L’appel à la candidature du camarade Paul BIYA, est une invite à l’immobilisme et à la perpétuation du néo-colonialisme français. La base du parti y est étrangère… "
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Cameroun: Michel MOMBIO « L’appel à la candidature du camarade Paul BIYA, est une invite à l’immobilisme et à la perpétuation du néo-colonialisme français. La base du parti y est étrangère… " :: CAMEROON

Élu au poste de Délégué à l’Éducation et à la Propagande du Comité de base de Mélong centre, lors des récentes opérations de renouvellement des organes de base du RDPC, notre confrère se prononce ici sur la dernière actualité au sein de son parti. Fidèle à lui-même, il n’a pas sa langue dans la poche.

Michel Mombio, vous suivez certainement l’actualité dans votre parti, le RDPC. Quelle lecture faites-vous des différents appels à candidature de Paul Biya.

Je note simplement qu’une fois de plus, le même folklore saisonnier est orchestré. C’est une pratique infantilisante usitée par les hiérarques et autres opportunistes qui trustent le sommet du parti, pour préserver leurs positions et les prébendes qui vont avec. On n’a pas à inviter un individu à se présenter à une élection. Il doit le faire personnellement, et engager ainsi sa responsabilité.

À vous entendre, la base de votre parti n’a rien à y voir ?

Je serais au courant si mon Président de Comité de Base avait été contacté pour ce faire. Ce n’est pas le cas. Tout nous tombe du sommet du parti. Comme toujours !

Ils parlent pour vous tous, non ?

Je ne me sens pas concerné par ces gesticulations à la limite avilissantes. Je parie qu’il en va de même pour mes autres camarades à la base, car notre vision se veut différente. Notre souci en effet, est de nous démarquer de cette folklorisation sclérosante de la politique, qui nous entretient dans l’illusion de l’omnipotence.

Comment entendez-vous vous démarquer ?

En réfléchissant sur les problèmes persistants des populations, et en y apportant ou proposant des solutions simples et concrètes. Nous voulons voguer à contre courant de la démagogie et de la flagornerie ; être une force de proposition et d’action. Le culte d’un homme ne nourrit ni ne développe un pays. C’est plutôt la promotion de l’éducation, de la formation, de la santé, la construction des infrastructures etc., qui y contribuent. Or ce n’est pas la voie que prennent nos dirigeants.

Qu’est ce qui selon vous, explique cette incurie des dirigeants de votre parti ?

Les causes sont diverses. D’abord, sur le plan structurel, les textes du parti sont calqués sur la Constitution, c'est-à-dire conçus pour la toute puissance d’un individu. Lequel individu, à l’examen, nous a été imposé au départ. Au début, il a su trouver les mots pour fédérer un large spectre de la population. Puis, il s’est enfermé sur lui-même, s’est coupé du peuple et gère la routine pour s’éterniser au pouvoir. Il s’est alors transformé en monarque républicain, à l’image de son maître François Mitterrand.

De même, le centralisme organique lui permet de nommer des gens n’ayant jamais affronté le suffrage à la base du parti. Ces faux militants suivent ce qu’on appelle en science politique, le cursus inversé : ils commencent leur militantisme par le sommet, généralement après une nomination. Ils utilisent alors leurs positions pour museler la base. C’est eux donc, qui tenant leur position de Paul Biya, le décrètent immortel, irremplaçable. Ce qui est incongru ! On en rirait si le sort du Cameroun tout entier n’était ainsi hypothéqué par des plaisantins et de dangereux opportunistes.

Vous semblez bien sévère, là !

Vous voulez la vérité pour vos lecteurs pour qui j’ai du respect. Je vous la donne, avec les mots qui sont les miens. Et puis, les latins disaient, quid bene amat, bene castigat…J’aime ce parti, j’aime mon pays. Le pire est que ces gens semblent croire en leurs mensonges à la fin.

Vous pourriez être exclu…

Que celui qui m’a nommé m’exclue…Je tiens ma légitimité de la base, et de personne d’autre. On doit en finir avec la pensée unique. Je suis lucide et réaliste.

Vous n’avez pas peur ?

On ne devrait pas avoir peur des médiocres ! Il faut en effet être d’une médiocrité à pleurer, pour reprendre Mongo Béti, pour se convertir en flagorneur de bas étage, pour réifier et déifier ainsi notre président. Justement, ces gens règnent par la terreur qu’ils inspirent aux populations, par la confiscation du jeu politique. Ce qui est loin d’être démocratique… Ils ont fait oublier le « Libéralisme communautaire » qui est le projet politique du parti et du président. Ce dernier étant devenu un fond de commerce politique qui, en réalité, cache leur vacuité idéologique.

Or, le camarade Paul Biya, contrairement à ce que disent certains de ses vils adulateurs, n’est pas éternel. Il faut songer à sa succession à la tête du parti, et de l’État.

Ce d’autant qu’à mon avis, Paul Biya ne fait plus partie de la solution. Le RDPC doit veiller à ne pas perdre le pouvoir après lui. Ceci suppose la préparation de l’alternance. Il faut bien que quelqu’un, au sein même du parti, le leur rappelle de temps en temps…

Vous êtes donc d’accord avec le Sultan Mbombo Njoya ?

Je dirais que c’est lui qui est d’accord avec nous. En effet, nous n’avons pas attendu sa dernière sortie pour souligner la nécessité de préparer l’alternance. Mieux, de façon pratique, nous avons créé une page Facebook pour l’affirmer et y travailler. Ceci dit, je reconnais que ce monarque est le seul à avoir tenu un langage sensé lors de la célébration de cette messe païenne célébrée à Bafoussam, au cours de la quelle une bande d’opportunistes, une fois de plus, a jeté l’opprobre sur la Région de l’Ouest en général et sur les Bamilékés en particulier. Notez que la plupart de ces drôles, en commençant pas le Secrétaire général du Comité central, n’ont jamais affronté le suffrage des militants. Ils sont très mal placés par conséquent, pour parler au nom de la base !

Parlez-nous de ce cette page Facebook…

Il s’appelle : Renouveau-Émergence-Alternance ; Mouvement Réaliste. Son ambition est simple : préserver le peu des acquis positifs de notre parti, et préparer son avenir. Il compte quelque 3000 membres, et le nombre ne cesse de grandir. Car nous nous efforçons de mener des réflexions de fond, sans plates flagorneries ni obséquieux culte de quelque personnalité. Notre pays doit changer, et ce n’est pas avec ces gens viscéralement attachés – et c’est vraiment le cas de le dire ! –à leur ventre, que cela va se faire.

Votre page est-elle reconnue par le Comité central ?

Nous les saisirons en tant voulu. Nous n’avons besoin d’aucune permission particulière pour agir. Notre ambition est claire : créer et animer un courant dans le parti pour éviter ce ronronnement ; et surtout nous démarquer clairement de ces entourloupes qui prennent les militants et les populations en otage. Nous attendons d’avoir un nombre critique de membres pour nous signaler aux instances faîtières du parti. Nous voulons établir des bases solides.

Ce sera une bataille pour nous faire accepter par les conservateurs sclérosés, nous le savons…

Alors, allez-vous boycotter votre président national ?

Il faut être démocrate. Si la machine du parti, qui a les moyens de mobiliser la majorité du parti s’engage, nous devons suivre, mais en marquant notre différence, en exprimant les réserves objectives. Surtout, nous ferons connaître nos exigences. Nous serons une force de propositions innovantes.

Vous affirmez militer pour le changement. Que faut-il en vérité pour changer notre pays ?

C’est simple. Il faut changer la Constitution, en adopter une qui nous ressemble, qui se démarque du jacobinisme et de l’inféodation à la tutelle française. Aussi longtemps que tant de pouvoirs seront concentrés entre les mains d’un seul, nous serons en monocratie. Ce sera l’immobilisme assuré. Quand en 2016, le président de la République nomme encore jusqu’aux simples directeurs dans les ministères, il y a hiatus. En clair, nous devons nous émanciper du néo-colonialisme ambiant.

Pour vous donc, la responsabilité de la France est engagée ?

Bien sûr ! Des voix telles que celles de mon maître Mongo Béti l’ont clamé bien avant moi.

Et comment se libérer du joug de la France ?

Mongo Béti a relevé, en prenant l’exemple du Viêt-Nam, de l’Algérie et du Cameroun, que la France n’est sensible qu’à la violence de la part des pays sous sa tutelle. Dans les deux premiers pays, le pays de François Hollande a cédé. Par contre, elle a écrasé les nationalistes de l’UPC dans le sang. Mais les jeunes camerounais réalisent de plus en plus que le pacifisme ne paie pas forcément avec ce pays là.

En effet, ils comprennent grâce aux médias, que le moindre mort français créé beaucoup d’émoi dans leur pays. On en suit par conséquent, qui évoquent publiquement la possibilité de s’en prendre aux ressortissants français. Il ne faudrait pas le souhaiter, mais l’on comprendrait ces jeunes sans les absoudre pour autant, s’ils passaient à l’acte.

Espérons qu’on n’en arrivera pas à de telles extrémités. Le mot de la fin ?

Eh bien, il faut toujours croire en notre pays. Les dirigeants actuels ne sont pas éternels, et aucune motion de soutien vers Dieu n’empêchera ce dernier de les rappeler à lui le moment venu. Nous devons simplement veiller à ce que les futurs nouveaux dirigeants ne soient pas pires. Ceci passe par la formation politique, civique, professionnelle de la jeunesse. Nous devons ré inculquer les vraies valeurs à nos enfants.

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