Mobilisation : Questions autour de la marche du 28 février
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Qui sont les organisateurs de cet évènement ? Que recherchent-ils et quel est le niveau d’adhésion des Camerounais ?

Samedi 28 février 2015. 7h. 50.000 personnes venues de quatre coins du Cameroun convergent en petits groupes dans un carrefour au coeur de la ville de Yaoundé. Elles arborent pour l’essentiel des T-shirts aux couleurs nationales. D’autres portent leurs vêtements ordinaires, mais font flotter au vent le drapeau vert rouge jaune. Personne ne porte des gadgets politiques ou des messages partisans. Sous le soleil levant, elles entament une longue marche dans les rues de la capitale, chantant l’hymne national à tout rompre.

Elles condamnent en choeur les actes abjects de Boko Haram, soutiennent l’armée déployée au front ainsi que la population de l’Extrême-Nord, première victime de ces exactions. Parmi les « marcheurs », des hommes, des femmes, des jeunes, et même des adolescents, des non-Camerounais. La marche s’achève vers midi, après l’exécution du refrain de l’hymne national. Pour l’instant, c’est un rêve nourri par un collectif de moins de dix personnes issues du milieu de la presse camerounaise. Qui sont-elles ? Il s’agit entre autres de Polycarpe Essomba, Guibai Gatama, Thierry Ngongang, Éric Benjamin Lamere, Raoul Simplice Minlo etc.

Depuis plus d’un mois, ces hommes de médias bien connus ont investi la toile pour vendre leur projet. Ils multiplient des réunions, prennent des contacts, bref préparent ce qu’ils appellent la « grande marche patriotique ». Mais cet évènement suscite dans l’opinion à la fois, curiosité et interrogations. Curiosité d’abord en raison du profil des organisateurs- des journalistes qui pouvaient sensibiliser à travers leur plume-. Des interrogations ensuite pour s’assurer qu’il ne s’agirait pas d’une quelconque commande politique. Des inquiétudes bien légitimes dans un Cameroun où toute initiative est suspecte.

Le Jour est allé à la rencontre de ce collectif et a pris part à une séance de travail samedi avec quelques uns de ses membres. Il en ressort qu’ils sont déterminés à « marcher » le 28 février prochain. D’ailleurs, ils affirment être très avancés dans les préparatifs, avouant tout de même leur inexpérience en matière de mobilisation de masse. Ils croient mordicus qu’il s’agit d’une initiative d’une rare pertinence. Justement quelle est la pertinence de marcher à Yaoundé pour dire non à Boko Haram ? Quel impact cela peut avoir d’abord sur le moral de nos soldats et ensuite dans les coeurs des Camerounais de l’Extrême-Nord ? A ces questions Raoul Simplice Minlo, Guibai Gatama, Thierry Ngongang répondent presque en choeur : « Boko Haram multiplie des exactions dans l’Extrême-Nord, mais dans le reste du Cameroun, on ne mesure pas ce qui se passe véritablement. On s’est dit pourquoi ne pas organiser un évènement pour amener les gens à s’intéresser à cette situation, d’où l’idée de la marche. Ensuite, il y a l’aspect symbolique.

Les soldats du Cameroun sont au front depuis sept mois et ils se battent pour nous, pour l’intégrité de notre pays. il est urgent de leur dire qu’ils ont notre soutien surtout avec l’entrée de Tchadiens qui ont été applaudis à Kousseri . Il y a ensuite les populations qui sont tuées, endeuillées. Vous savez les gens ne demandent pas de l’aumône. Les gens veulent du respect, de la solidarité. Quand on va au deuil par exemple, ce n’est pas pour ressusciter le mort, mais, c’est pour dire qu’Il y a un certain rapprochement, une certaine solidarité face à ce qui se passe ». Guibai Gatama révèle les chiffres effroyables montrant la gravité de la situation, et surtout l’urgence de la mobilisation. Ils souhaitent aussi à travers cette marche montrer que Boko Haram tue aussi bien les non-musulmans que les musulmans. Lors de la dernière attaque, ils ont tué un imam et brûlé une mosquée. Boko Haram est l’ennemi de tous.

Comme Charlie Hebdo

La marche. S’agit-il d’imiter ce qui s’est passé en France après l’attaque de Charlie hebdo? « Non et non », réagit Raoul simplice Minlo qui se lève presque de son siège. «Nous avons eu l’idée bien avant ce qui s’est passé en France, en témoignent les photos prises lors de la première séance de travail ». Au fait comment est structuré ce collectif ? Qui fait quoi ? « Nous n’avons pas de porteparole, pas de secrétaire général. On est tous au même pied d’égalité. Nous avons les mêmes objectifs : mobiliser les Camerounais pour leur dire la gravité de ce qui se passe dans l’Extrême-Nord, soutenir nos soldats et dire notre solidarité à nos frères et soeurs qui vivent dans la zone touchée », explique Guibai Gatama.

Mais cette initiative rencontre des résistances-souvent bien camerounaises. Des internautes souvent déchainés critiquent vertement et s’attaquent même aux organisateurs. Ces derniers en rient, tournent ces critiques en dérision. Mais pour l’essentiel, ils répondent, expliquent le bien-fondé de la démarche, et parviennent à convaincre. Des anonymes appellent, envoient des mails pour s’imprégner des conditions de participations. D’autres proposent des gadgets. « J’ai 400 polos dans la voiture. Quelqu’un vient de donner ça maintenant », se réjouit Guibai Gatama. Raoul Simplice montre au reporter un message d’un internaute qui souhaite prendre part avec toute son association. Mais tous les membres du collectif jurent qu’ils ne reçoivent aucun appui financier. Mieux, ils n’en demandent même pas. « Le patriotisme ne se vend pas et ne se marchande pas », disent-ils.

© Le Jour : Younoussa Ben Moussa

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