Lutte contre Boko : Le Tchad se teste au front
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La coalition a livré en fin de semaine ses premières batailles, le pont qui relie Fotokol à Gambarou est sous son contrôle.

Les commandos de l’armée tchadienne forcent l’entrée de la ville de Gambarou. Depuis jeudi 29 janvier dernier, ils pilonnent cette ville nigériane que les terroristes occupent depuis cinq mois. Ce jour-là, ils sont arrivés dans la localité de Leimari, non loin de Fotokol. Ils y ont été disposés selon les plans de l’opération Logone 2015. A peine installés dans leur nouvelle position, les soldats tchadiens ont tiré quelques salves d’obus en direction de la ville de Gambarou. « Ils voulaient marquer leur présence », explique un militaire de la coalition.

D’abord passifs, les terroristes de Boko Haram ont dû réagir le lendemain. Vendredi, le harcèlement de la coalition s’est poursuivi. Militaires camerounais et tchadiens, jouant chacun sa partition à la perfection. « Les Camerounais ont tiré avec des pièces d’artillerie. Ils ont pilonné les positions de la secte qu’ils avaient préalablement repérées à Gambarou. Nous avons  utilisé des canons de 120 mm et même de 155 mm pour faciliter l’entrée en sol nigérian des commandos tchadiens », explique un militaire camerounais. Les Tchadiens, eux, ont fait intervenir deux avions. Ils ont aussi pilonné la ville. Ils se préparaient à y faire entrer leurs commandos mais, se sont heurtés à une vive résistance.

Ils ont dû se résigner à attendre le lendemain. Samedi, les bombardements ont repris de plus belle. Les Tchadiens coalisés ont fait intervenir cette fois des hélicoptères d’attaque. Ils sont parvenus à enfoncer les premières lignes des terroristes, ont franchi le pont, l’ont sécurisé. Ils voulaient poursuivre leur progression dans Gambarou mais, les Boko Haram qui y sont stationnés étaient un peu plus coriaces qu’ils ne le croyaient. Ils ont dû battre en retraite pour rester sur leur position au niveau du pont, où de toutes les façons, les terroristes n’osent plus s’aventurer depuis le mois d’août dernier.

Les militaires camerounais occupent l’édifice et repoussent violemment toute velléité d’incursion de la secte. Les militaires tchadiens, malgré le déluge de feu qu’ils ont continué de déverser sur Gambarou dimanche, n’ont pas encore gagné un mètre en territoire nigérian ou sur cette partie du sol nigérian que Boko Haram occupe. Ils ont annoncé tout de même, par la voix de l’état-major des armées tchadiennes, qu’ils ont tué 123 membres de la secte vendredi. Ils ont aussi déclaré que trois de leurs éléments avaient été tués par des engins explosifs improvisés et que 12 autres ont été blessés. Samedi, l’un des blessés a succombé à l’hôpital à Ndjamena.

Selon des militaires camerounais, leurs alliés tchadiens qui sont arrivés avec d’impressionnants moyens, semblent très pressés de franchir la frontière du Nigéria. « Ils ont probablement obtenu un droit de poursuite au Nigéria. Ils semblent recevoir leurs ordres directement de Ndjamena. Nous on en est encore à attendre le feu vert de l’Onu mais, eux, ils font comme s’ils n’étaient pas concernés », déclare un militaire camerounais. De fait, deux attitudes ont été observées au sein de la coalition : la réserve des soldats camerounais, qui se contentent d’apporter du ravitaillement en carburant et en munitions à leurs alliés, de leur faire un topo de la région et de Gambarou qu’ils connaissent mieux que quiconque, de pilonner des positions des terroristes de l’autre côté de la frontière … toutefois, des Camerounais qui n’osent pas faire un pas au-delà de la frontière. « Nous ne pouvons pas la franchir tant qu’on ne nous en donne pas l’ordre.

Vous savez que le Cameroun avait refusé avec justesse, il faut le préciser, le droit de poursuite au Nigéria, nous ne pouvons donc pas entrer chez eux à notre tour sans leur permission », explique notre source. Les Tchadiens, eux, se comportent comme s’ils avaient obtenu ce droit de poursuite. Leur aviation a bombardé Gambarou et Mallam Fatori, 100 km plus au nord, sans que l’armée nigériane ne bronche. Une permissivité des autorités d’Abuja qui surprend.

Les actions de l’armée tchadienne se déroulent alors que l’Union africaine, réunie à Addis-Abeba la capitale éthiopienne la semaine dernière, a annoncé une réunion pour fixer le cadre juridique de l’opération Logone 2015 que va conduire la coalition des états de la Commission du bassin du lac Tchad. Du 05 au 07 février prochain, des experts doivent se réunir à Yaoundé pour définir la mission de cette force multinationale mixte ainsi que l’a appelée l’Ua. Mais, les soldats tchadiens semblent n’en avoir cure. Un droit de poursuite aurait-il été négocié entre le Tchad et le Nigéria, qui exclut le Cameroun ?

Le Tchad  au sein de cette coalition est-il en fait le bras armé de la communauté internationale et des Usa qui obéit à des règles d’engagement à part ? Le président Idriss Deby pourtant, a publiquement soutenu que l’Afrique doit cesser de quémander aux occidentaux de l’aide pour la défendre. « Nous avons les moyens de nous défendre mais, c’est la volonté qui nous manque », a-t-il dit en marge du dernier sommet de l’Ua. Est-ce que lors de sa visite à Abuja le 25 janvier dernier, le secrétaire d’Etat américain John Kerry est parvenu à infléchir la position des dirigeants nigérians, qui refusaient toute intervention d’une armée étrangère sur leur territoire ? Sur quelle base d’engagement les forces tchadiennes entrent-elles au Nigéria alors qu’elles font partie de la force multinationale mixte qui n’a pas encore défini les siennes?

© Le Jour : Aziz Salatou

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