Boko Haram  : Enquête sur les disparus de Magdémé et Doublé
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274 personnes disparues après des attaques de Boko Haram et une rafle de l’armée.

Avec l’ ambition affichée de la secte à vouloir couper le Logone et Chari du reste de la région de l’Extrême-Nord par la prise du contrôle de l’axe Mora-Waza, à défaut de s’emparer de ces deux villes, la guerre contre Boko Haram est assurément entrée dans une nouvelle phase. Cette stratégie, à laquelle il faut ajouter l’intensification des infiltrations dans les villes et villages de l’Extrême-Nord, se traduit par la multiplication des attaques aussi bien des véhicules de l’armée que des voitures de particuliers sur ce tronçon. C’est ainsi que le 26 décembre 2014, entre les villages Tchakramari et Gambaru, le Bataillon d’intervention rapide (BIR) perdait un élément dans une embuscade tendue par la secte au cours d’une patrouille de routine. Quelques jours plus tôt, précisément le 19 décembre 2014, c’étaient deux employés de la Bicec qui trouvaient la mort à la suite de l’attaque de leur pickup…

RÉACTION

L’armée se devait donc de réagir, notamment après que des éléments de Boko Haram ont attaqué les villages Doublé et Magdémé et brûlé des concessions, le 27 décembre 2014. Peu après cette offensive, près de 200 éléments des forces de défense en provenance de Maroua ont bouclé la zone, pour la passer au peigne fin. Jusquelà, aucun problème. Mais la suite va être une incompréhension entre les populations et l’armée. Pour les habitants de Doublé, Magdémé et des villages environnants, 274 personnes manquent à l’appel depuis le 27 décembre 2014. Soit, après l’incursion de Boko Haram et le rafle de l’armée.

Selon nos informations, ce ne sont pourtant que 70 suspects qui ont été acheminés à Maroua par les forces de défense déployées ce 27 décembre 2014 dans le secteur Mora-Waza. A leur arrivée aux alentours de 23h, il s’est posé le problème de leur lieu de détention, la prison centrale et les cellules des unités des forces de l’ordre de la ville de Maroua étant surpeuplées depuis plusieurs mois. Mission a alors été confiée au patron de la légion de gendarmerie de l’Extrême-Nord, le colonel Zé Onguéné, de trouver un lieu de détention provisoire. C’est ainsi qu’un grand magasin se trouvant dans l’enceinte de la légion a été dédié à la garde des suspects. Mais le lendemain, alors que les gendarmes veulent sortir les prisonniers et lancer la procédure d’interrogatoire, ils constatent la mort de 25 d’entre eux.

EXPLICATIONS

«Le 28 décembre 2014, lorsque les portes ont été ouvertes pour extraire les suspects, nous avons constaté que 25 personnes étaient mortes. Le médecin Affana a été appelé à leur chevet, car nous ignorions les circonstances de leur décès et il était nécessaire de faire toute la lumière sur cette situation qui s’était imposée à nous. Les autres suspects, 45 au total, ont été transférés à la prison de Maroua où ils s’y trouvent toujours », explique un haut gradé de la gendarmerie en poste à Maroua. Les suspects retrouvés morts, et qui ne disposaient d’aucune pièce d’identification par devers eux, ont été enterrés par les sapeurs pompiers de Maroua. «L’armée n’a rien à cacher car, nous sommes une armée républicaine au service des citoyens. D’ailleurs, au moment où je vous parle, une enquête est ouverte pour connaître des circonstances exactes de cette regrettable situation. Les autres suspects interpellés au cours de cette opération sont toujours en vie, à la prison de Maroua», renchérit une autre source militaire à Maroua. Il reste que les populations de Magdémé, Doublé et d’autres villages environnants recherchent tout de même la trace de 274 personnes disparues ce 27 décembre 2014. Où sont-elles ?

«Il n’est pas juste de mettre les disparitions des uns et des autres sur le dos de l’armée. Plusieurs personnes ont fui les villages lors des attaques de Boko Haram et se sont éparpillées dans la nature, d’autres peuvent avoir rejoint la secte ou sont mortes lors des différentes incursions de cette bande de terroristes dans nos villages. Dans le brouhaha d’aujourd’hui, retrouver la trace des uns et des autres n’est pas chose aisée, il faut un peu de temps. Moi même je n’ai retrouvé qu’un parent hier (Ndlr : 03/01/15), après une semaine passée à le rechercher», affirme un habitant de Madgémé installé à Waza.

Alors que la polémique autour des disparus de Magdémé, Doublé et des villages environnants s’essouffle, le tronçon Mora-Waza continue toujours de payer un lourd tribut à la guerre. Le 28 décembre 2014, le lendemain même de l’opération de l’armée dans le secteur, ce sont deux militaires du 41eme BIM qui trouvaient la mort dans une embuscade alors même qu’ils se rendaient en compagnie de leurs camarades à Mora. Dans la nuit du 1er janvier 2015, 12 personnes ont été tuées dans une attaque d’un car en provenance de Kousseri et qui se rendait à Memé, non loin de Mora.   

© L’Oeil du Sahel : RAOUL GUIVANDA

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