Cameroun - Sensibilité : La bière, cet opium
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Cameroun - Sensibilité : La bière, cet opium :: CAMEROON

La relation entre les boissons alcoolisées et les Camerounais traduit leur désespoir et assure la gouvernabilité.

D’après Global report, le taux de consommation d’alcool au Cameroun est l’un des plus élevés d’Afrique. La bière dans notre pays a gravit des échelons pour occuper une place de choix dans…l’espace sociopolitique. Après le sport, il s’agit sans d’un opium. Jean Kamdem, un consommateur des boissons alcoolisées affirme sans ambages que « rien ne peut plus se faire sans la bière. Lorsque vous recevez un ami ou un frère, c’est toujours important de déposer une ou plusieurs bières ». D’après Mathieu Chedjou, un ingénieur, « il existe une  relation de concubinage entre les boissons alcoolisées et les populations camerounaises.

Les périodes de funérailles drainent d’importants buveurs. Je vis à Douala et lorsque je reçois quelqu’un chez moi, je le conduis d’abord au bar ». Conséquence, le métier de barman prend de galons. S’imposent. Selon Polycarpe Mbarga, «celui qui vend de la bière, fait de bonnes affaires. Il suffit de compter le nombre de ventes à emporter au kilomètre carré dans nos grandes villes». Consommer de la bière est devenue une priorité dans els familles.

Elle est budgétisée carrément dans les foyers. Elle vient avant la scolarité. Jeannette Ngoua, une enseignante soutient qu’il y a une « relation d’amour entre le Camerounais moyen et la bière. Je parlerai même d’une histoire parfois passionnelle. Je connais des parents qui préfèrent se diriger dans un bar que d’acheter des cahiers et livres à leurs progénitures». Pour elle, les bars et autres snack sont des lieux stratégiques pour résoudre des problèmes et s’évader par moments des laideurs existentielles.

Espace de catharsis

A en croire le sociologue Claude Abe, « cette relation est si forte que celui qui n’en consomme pas passe facilement pour un marginal. Le contexte aujourd’hui au Cameroun explique cette forte propension des Camerounais à la bière ». Il ajoute que « le revenu des Camerounais est redevenu inférieur et la bière apparaît alors comme un espace de catharsis où des gens vont injecter leur frustration. C’est un lieu de désespoir vu l’absence d’une quantité d’argent pour épargner ». Même son de cloche. Le Pr Hubert Mono Ndjana pense pour sa part que « La boisson était une nécessité dans nos sociétés d’avant.

On s’asseyait sous l’arbre à palabre avant l’arrivée des blancs pour résoudre des problèmes ». Toutefois, le contexte a changé. « La boisson et la bière en particulier ne joue plus cette fonction sociale. Elles jouent un rôle de dérivations des angoisses et des découragements ». Pour lui, des gens boivent actuellement pour trouver des solutions à leurs problèmes. Et c’est l’artiste Maahloox, rappeur camerounais qui traduit la place de cette boisson dans notre société. « La bière, c’est combien ici ? », chante t-il. « Cet artiste montre que la boisson est un crédo. C’est un coup d’épée dans l’eau pour le peuple camerounais. Je dois dire que le pouvoir compte aussi sur la boisson pour augmenter sa gouvernabilité, pour endormir le peuple », Hubert Mono Ndjana.

Il précise par ailleurs qu’il « y a deux opiums au Cameroun : l’alcool et le sport. Ceux-ci aide le peuple à oublier ses soucis, l’Etat à se maintenir ». Le sociologue Christian Bios Nelem indique aussi que « l’augmentation des prix de la boisson ne peut pas empêcher les Camerounais de boire, c’est l’opium. Ils sont dans une dépendance et ne peuvent plus s’arrêter ». Il ajoute que les boissons alcoolisées jouent un rôle dans notre société de consommation. « Le problème n’est pas celui de la production de ces boissons mais celui du contrôle de la consommation. Malheureusement beaucoup de Camerounais pensent que « La vérité est dans le vin ! C’est une tromperie ».

© Le Jour : Jean-Philippe Nguemeta

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