DECISIONS DE LA COP 23 : VERS UNE APPLICATION CONCRETE
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Du 6 au 17 novembre 2017, sous la présidence des Iles Fiji, s’est tenue la Cop 23, à Bonn. La phase de transcription des décisions de l’accord de Paris (Cop 21), en un manuel détaillé (le Paris rulebook), phase constituant l’essentiel de la Cop 23, doit s’achever en fin 2018 en Pologne.

La Cop 22 qui s’était tenue au Maroc, étant placée sous le signe de la recherche de solutions pour la lutte contre le réchauffement climatique, avait permis de grandes avancées (voir notre article intitulé Cop 22, le Maroc de tous les espoirs) dont l’augmentation considérable de la cagnotte de 100 milliards de dollars à financer par les pays riches pour lutter contre le changement climatique, le succès remporté par l’initiative basée sur l’adaptation (Adaptation pour l’Agriculture Africaine) portée par le Maroc, malgré quelques critiques, et la promesse de plusieurs pays développés de réduire de façon drastique leur production de Gaz à Effet de Serre (GES) d’ici 2050. En effet, les Etats-Unis, le Canada, l’Allemagne, entre autres, se sont engagés à ne plus rejeter de gaz à effet de serre d’ici cette date (seuil fixé de 80 à 95% pour certains pays) à la Cop 22. Déjà en début d’année passée, nous mettions en garde dans notre tribune écrite à l’occasion de la Cop 22 à propos du risque de voir les Etats-Unis se retirer de l’accord à cause de l’arrivée d’un « climato sceptique » au pouvoir dans ce pays. Cela s’est matérialisé par leur sortie fracassante annoncée par Donald Trump le 04 Août 2017. Précisons que cette décision de retrait des Etats-Unis ne sera effective qu’en 2020.

Il convient de rappeler ici l’intérêt de la lutte contre le changement climatique dans le monde en général et en Afrique particulièrement, afin de mettre en relief les enjeux que cette lutte présente. Ensuite, nous reviendrons sur les décisions majeures prises à la Cop 23.

A l’entame de notre propos, relevons que l’accord de Paris (signé à l’occasion de la Cop 21) est le texte le plus largement et le rapidement signé de l’histoire de l’humanité.

Ensuite, ajoutons que pour entrer en vigueur, cet accord devait être ratifié par au moins 55 Etats, couvrant 55% des émissions des GES. La première condition avait été remplie le 21 novembre 2016 et la seconde le fut le 5 Octobre 2016. L’accord est ainsi entré en vigueur le 4 novembre 2016. Toutefois, l’application de cet accord n’est pas encore gagnée. Certains, comme des proches de Moscou, estiment que sans la participation des Etats-Unis, l’accord sera inapplicable.

Pour revenir à l’empressement des Etats à la signature de l’accord de Paris, disons que c’est une posture qui traduit l’importance de la lutte contre le changement climatique pour la communauté internationale, lutte qui a entrainé une mobilisation sans précédent.

Pourquoi est-ce donc si important de lutter contre le changement climatique dans le monde en général et en Afrique en particulier ?

Tout d’abord à cause de la hausse de température et de la pluviométrie que le réchauffement climatique occasionne. Celle-ci entraîne une prolifération de vecteurs de maladies comme le paludisme, la dengue et la fièvre jaune. Ensuite, à cause de la pollution occasionnée par ce phénomène. Elle entraine des problèmes de santé comme les affections respiratoires (allergies, asthme, bronchopneumopathie chronique obstructive, cancer) et des complications cardio-respiratoires.

En troisième lieu, circonscrire ce phénomène est une urgence à cause de la sécheresse occasionnée par le réchauffement climatique, traduisant un phénomène paradoxal. Celle-ci induit une réduction des terres cultivables et de celles dédiées à l’élevage, phénomènes entraînant à leur tour une insécurité alimentaire et parfois des conflits dus à cette insécurité alimentaire.

Relevons que les difficultés d’accès à l’eau potable occasionnent des maladies diarrhéiques, ainsi que des conflits, sans parler des dangers auxquels elles exposent les femmes qui sont responsables de la corvée d’eau le plus souvent. Dans un pays comme le Burkina-Faso, il existe des quartiers périphériques où le seul point d’eau où le liquide précieux est disponible n’est alimenté qu’en pleine nuit. A cause de l’assèchement des barrages que le réchauffement climatique a provoqué, ces robinets ne sont alimentés en eau qu’à des heures avancées de la nuit, obligeant les femmes à veiller (et à braver les dangers) pour approvisionner leurs foyers en eau.

N’oublions pas les phénomènes climatiques avec les nombreux dégâts qu’ils occasionnent comme les inondations avec pertes en vies humaines et pertes matérielles. Ces inondations ne concernent pas que les pays occidentaux, mais aussi l’Afrique. Des pluies diluviennes entraînant des inondations ont balayé deux villages kenyans ce mois de mai, occasionnant plus de 47 décès d’hommes et de femmes.

En outre, ajoutons que le fait de trouver de nouvelles sources d’énergie, des énergies renouvelables, permettra de rendre l’industrialisation et le développement de l’Afrique viables, car ce continent ne peut pas continuer à épuiser les maigres ressources énergétiques dont il dispose sans penser au lendemain et aux générations futures.

Un autre fait majeur à relever concernant le réchauffement climatique est qu’il occasionne la paupérisation des plus pauvres, notamment celle des femmes. Comme nous l’avions relevé plus haut, la corvée d’eau revient aux femmes en Afrique, aussi bien en zone rurale qu’urbaine (quartiers périphériques). Les difficultés d’approvisionnement en eau entrainent une augmentation de la distance à parcourir pour trouver de l’eau potable et une exacerbation de la corvée. La même chose est valable pour l’approvisionnement en sources d’énergie (bois), pour la cuisine par exemple ou les activités commerciales. La pénibilité des corvées liées au travail domestique a des répercussions indéniables sur les rares activités génératrices de revenus dont disposent les femmes rurales.

Au vu de toutes ces conséquences, la Cop 23 a défini les outils et les modalités d’application des décisions prises pour « sauver la planète », en d’autres termes maintenir le réchauffement de celle-ci à moins de 2 degrés ou moins de 2 degrés Celcius d’ici 2100. Au sujet de cette Conférence des parties, il est important de relever qu’aucun pays ne s’est présenté pour assurer le leadership de l’initiative depuis le départ des Etats-Unis. Revenons sur quelques uns des points forts de la Cop 23.

Le plan d’action sur le genre

Le premier outil d’opérationnalisation de l’Accord de Paris que nous voudrions décrire ici est le plan d’action sur le genre qui a été adopté, parce que notre intérêt pour les questions de genre est vif. Celui-ci réitère les engagements des Etats membres de l’accord de Paris à mettre

en œuvre des politiques de lutte contre le réchauffement climatique qui tiennent compte de la promotion du genre.

Quelques points saillants :

* Les femmes participent « pleinement, réellement et sur un pied d’égalité » aux politiques climatiques ; il faut promouvoir des politiques climatiques tenant compte de la perspective genre » ;

* Les politiques climatiques en faveur de la promotion du genre doivent être renforcées dans le cadre de l’adaptation et de l’atténuation (deux mesures visant à combattre le changement climatique) ;

* Le renforcement des capacités, le partage des connaissances et la communication (ateliers, assistance technique) liés à la perspective genre dans la lutte contre le réchauffement climatique sont à renforcer ;

* Il faut une représentation équilibrée des sexes, une participation et un « rôle dirigeant des femmes ».

Tout ceci signifie que la lutte contre le réchauffement climatique ne pourra plus être menée en dehors de la perspective genre.

Les finances

Abordons la question des finances, question non moins négligeable de cette Cop 23. À la demande des pays en développement, la COP 23 a reconfirmé que le Fonds d’Adaptation servira sous l’Accord de Paris, après la prise de certaines décisions nécessaires fin 2018. Les pays africains militent plutôt pour l’adaptation que pour l’atténuation en termes de solutions contre le réchauffement climatique. Nous avions défini ces notions d’adaptation et d’atténuation dans notre article sur la Cop 22. Le premier terme désigne « L’ensemble des stratégies, initiatives et mesures individuelles ou collectives (entreprises, associations, collectivités, etc.) visant, par des mesures adaptées, à réduire la vulnérabilité des systèmes naturels et humains contre les effets réels ou attendus des changements climatiques » (Wikipédia). Quant au deuxième concept, il désigne la réduction drastique de l’émission des gaz à effet de serre.

L’opérationnalisation de la Plateforme pour les communautés locales et les peuples autochtones

Cette action a pour thématique la valorisation des savoirs traditionnels. Elle a pour but de favoriser, selon le CCNUCC « l’échange des données d’expériences et [de permettre] la mise en commun des meilleures pratiques en matière d’atténuation et d’adaptation de manière holistique et intégrée ». Rappelons que le CCNUCC est la convention cadre des nations unies sur le changement climatique.

Retenons que le bilan de cette Cop 23 est mitigé, comme toutes les autres Cop. Cependant, citons comme point positif l’avancée dans la rédaction du manuel détaillé comprenant les outils d’opérationnalisation de l’accord de Paris. Il faut espérer que le retrait des Etats-Unis en Août 2017 ne vienne pas ruiner les efforts consentis pour l’application de l’accord de Paris, l’accord international le plus rapidement entré en vigueur de l’histoire de l’humanité (en plus d’être le plus rapidement signé). L’un des points positifs de cette Cop 23 est la définition du plan d’action genre qui donne pleinement aux femmes leur place d’acteurs majeurs, acteurs de premier plan, dans la lutte contre le réchauffement climatique.

L’étape de Katowice en Pologne (prochaine Cop) devrait concrétiser ces acquis, elle qui a pour objectif de finaliser le « Paris rulebook ».

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