Université de Douala : 300 ingénieurs abandonnés à  leur sort
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Depuis quatre ans, l’Ordre national des ingénieurs de génie civil refuse d’intégrer ces produits de l’université pour « diplômes non-conformes » et « non agréés ».

Le désarroi et le chagrin de Guy Landry Gérard Doumbe sont à leur comble. En effet, voilà six ans que cet ancien étudiant de la Faculté de génie industriel (Fgi) de l’Université de Douala, a bouclé ses études professionnelles. C’était en décembre 2012. « Quand je suis sorti de l’école, j’ai d’abord trimé en exerçant de petits chantiers, mais j’ai pu m’inscrire au tableau de l’Ordre en février 2014. Jusqu’en octobre 2016, où j’ai été exclu du tableau de l’Ordre ».

Depuis lors,  Guy Landry a vu s’envoler son rêve d’ingénieur de génie civil, car, bien que titulaire d’un diplôme sanctionnant cinq années d’études débutées en octobre 2007, il ne peut exercer comme tel s’il n’a préalablement reçu un agrément dûment délivré par l’Ordre national des ingénieurs de génie civil (Onigc), conformément aux règlements de cette organisation professionnelle créée en 2000 et placée sous la tutelle technique du ministère des Travaux publics (Mintp).

Constatant qu’il ne recevait plus de notification de la part de l’Ordre, se posant moult et une 2question, Guy Landry s’est rendu au siège de l’Ordre, à Yaoundé, où sa suspension lui  a été signifiée, en février 2017 (c’est-à-dire quatre mois plus tard), par la secrétaire du président absent. Toutes les démarches entreprises depuis lors par le jeune diplômé et ses 14 autres camarades de la première promotion, admis comme lui au tableau de l’Ordre, puis suspendus, en vue de leur réintégration, sont restées vaines.

La situation de ces quinze ingénieurs, qui n’ont exercé que le temps d’un météore, est celle de trois cents ingénieurs (dont ils font partie) toujours en attente d’intégration, mais   confrontés à la fin de non recevoir qui leur est opposée par l’Onigc. Initialement, cette organisation professionnelle invoquait le motif de non-conformité des diplômes, qui a migré vers celui de « diplôme non agréé », « comme s’il s’agissait de diplômes étrangers ou issus d’un établissement privé clandestin, alors qu’il s’agit de diplômes délivrés par l’Etat du Cameroun dans une école étatique », d’après Gildas Kanko, le porte-parole du Collectif exclu et abandonné à son sort.

Clandestinité

La Faculté de génie industriel est pourtant un établissement public créé par décret présidentiel du 19 janvier 1993. Le génie civil, qui en est l’une des filières, a été ouvert suite à l’arrêté du 18 octobre 2006 du ministre de l’Enseignement supérieur (Minesup). Les lauréats de la première promotion ont reçu officiellement leur parchemin en 2015, des mains de Jacques Fame Ndongo, l’actuel Minesup, sous le parrainage, entre autres, du Camerounais Ernest Simo, ingénieur à la NASA, aux Etats-Unis d’Amérique. Selon les laissés-pour-compte, qui entendent user de tous les moyens légaux pour obtenir leur intégration ou leur réintégration, les diplômes d’ingénieur de la Fgi sont reconnus par le Canada, les Etats-Unis, la France, entre autres, et certains lauréats ont été évalués avec succès par des organismes internationaux.

Par ailleurs, une frange de diplômés de la Fgi ont été reçus au concours d’intégration à la Fonction publique, certains en sont même sortis majors aux sessions de 2015 et 2017. Des faits d’armes qui ont convaincu le Minesup à écrire, à l’attention de l’Onigc, que « les diplômés de la Fgi de l’Université de Douala, option génie civil, sont formés dans le strict respect des exigences du système LMD et sont de ce fait, des ingénieurs de génie civil à part entière ».

Même la saisine du Premier Ministre n’a donné aucune suite. En attendant leur hypothétique inscription, les ingénieurs se débrouillent dans la clandestinité.  

« Formation classique »

Contacté jeudi 8 mars 2018, le président de l’Onigc, Kisito Ngoa, a affirmé que le libellé mentionné sur les diplômes des anciens étudiants est « diplôme d’ingénieur de Génie industriel, spécialité génie civil », toutes choses qui posent problème. Pour lui, nulle part au monde, le diplôme d’ingénieur de génie civil ne relève du génie industriel. L’Ordre a d’ailleurs saisi le doyen de la Fgi et le Minesup pour leur faire part de ces réserves. Les malentendus ont débouché sur l’instruction d’une évaluation de la qualité de la formation querellée.

« On a fait  les évaluations et on a même déjà donné les résultats », déclare Kisito Ngoa. Le rapport d’évaluation a été présenté lors d’une réunion présidée à Yaoundé, le 20 octobre 2017, par le secrétaire général des services du Premier ministre. Dans la foulée, il a été décidé de la mise en place d’un cadre de concertation censé améliorer le dispositif de formation initiale des ingénieurs et c’est à l’issue de cette autre démarche que l’on saura qui admettre ou pas, selon le président de l’Onigc. Qui soutient que la formation reçue par ces étudiants est classique, alors que ces lauréats devraient être issus d’une école spécifique.

« Il est en train de se passer le même phénomène que celui observé dans la formation des médecins au Cameroun. Des écoles publiques et privées se créent ici et là, sans que nous en soyons même informés », met-il en garde.

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