Présentation de l'ouvrage de Lawrence Atiladé, " La Côte d'Ivoire Post-Crise sous Alassane Ouattara"
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Que retiendra-t-on du passage au pouvoir du Président Alassane Ouattara ?... La préface du Professeur Franklin Nyamsi 

J’ai le bonheur d’esquisser en quelques lignes, les bonnes raisons qui émergent de mon appréciation du présent recueil d’articles soumis au public par un jeune chercheur ivoirien que j’ai eu le bonheur de rencontrer et d’accompagner depuis plus de trois ans à Paris. Les tribunes ici rassemblées par Lawrence Atilade, au jour le jour, ont pour point axial la trajectoire et l’action politiques contemporaines du docteur Alassane Dramane Ouattara, élu Président de la République de Côte d’Ivoire le 28 novembre 2010, et réélu aux mêmes fonctions suprêmes en octobre 2015. L’auteur s’y attèle à une analyse par aspects des politiques constitutionnelles, sociales, culturelles, diplomatiques, économiques, de l’actuel Chef de l’Etat ivoirien.

La méthode de chacune des analyses est logique et constante : à partir d’une problématisation théorique, Lawrence Atilade interroge patiemment les faits, avant d’en venir à des esquisses de conclusions, qui se veulent aussi hypothèses de prolongation de l’action réfléchie.

Au fond, tout l’ouvrage tourne autour d’une sorte de question testamentaire : que retiendra-t-on du passage au pouvoir du Président Alassane Ouattara ? Lawrence Atilade, en prudent philosophe et politologue, a le mérite de se mettre d’emblée à l’écoute des thèses concurrentes en présence, avant de construire la sienne, comme pour ainsi dire, en connaissance de cause.

Il y a bien sûr la thèse des ultranationalistes et xénophobes praticiens de l’idéologie discriminatoire de l’ivoirité : pour eux, Alassane Ouattara est le fossoyeur absolu de la Côte d’Ivoire. Son arrivée dans l’historicité politique du pays en 1989 aurait signé le commencement de son déclin. Il aurait livré le pays, en coupe réglée, au capitalisme international, à l’hégémonie burkinabé, à la domination ethnoreligieuse nordiste, etc. Lawrence Atilade montre à suffisance que cette version de l’agir Ouattara relève de la pure propagande, du simplisme intellectuel le plus primaire et de la haine gratuite employée comme facteur unique de lutte politique.

Il y a la thèse autrement plus sérieuse des progressistes ivoiriens et africains, qui sans tomber ni dans la xénophobie, ni dans l’identitarisme désuet de la vulgate frontiste, voient en la politique de Ouattara, une sorte de reproduction stérile des mythes ultralibéraux d’Adam Smith ou de Ricardo venus de sa culture économique Américaine. Les politiques libérales du Ouattara des années 90 seraient dès lors, selon cette critique, en écho avec le culte de la croissance et des grands ensembles macro-économiques dans la gouvernance Ouattara depuis 2010. Ce qui est questionné ici, c’est l’efficacité socioéconomique de cette politique Ouattara, notamment pour vaincre en Côte d’Ivoire, le chômage massif des jeunes, les crises concomitantes et persistantes des secteurs de la santé, de l’éducation, du foncier rural, de l’économie extravertie de vente des matières premières agricoles et minières, et finalement de la réconciliation politique entre les sensibilités politiques du pays.

L’intérêt des tribunes de Lawrence Atilade réside justement dans l’effort qu’il fait de dépasser, tout en en retenant l’essentiel, les deux thèses précédemment évoquées. Atilade, subtilement, propose une vision multidimensionnelle de la politique d’Alassane Ouattara dépassant le clivage entre ultranationalisme et ultralibéralisme. Il montre comment le mentor du Rassemblement des Républicains aura essayé de mettre en œuvre pragmatiquement, des réformes de l’Etat, de la diplomatie, de l’école, de l’économie et même de la constitution ivoirienne, en parfaite intelligence avec les forces et les situations en présence. Il juge la politique d’Alassane Ouattara sur pièces, selon la méthode empirique anglo-saxonne. Il force ainsi le respect par les faits qu’il souligne. Cela faisant, Lawrence Atilade ne manque pas de souligner les difficultés, voire les impasses de l’action entreprise par le Président Ouattara dans ce siècle ivoirien…

Je vais m’arrêter là, tout en félicitant chaleureusement l’auteur de cet opuscule pour son effort de penser son temps et avec son temps. Le rôle du préfacier est d’aiguiser l’appétit de lire et de penser avec l’auteur. Non point de le satisfaire. Il me fallait et il me suffisait de mettre en perspective ce en quoi les tribunes ici rassemblées ouvrent réellement le débat sur le bilan, à trois ans de la fin de son deuxième et dernier mandat présidentiel, de l’ère Ouattara. Comment ne pas saluer, en ce travail de Lawrence Atilade, sa double signification d’hommage à une grande figure politique ivoirienne et d’ouverture de perspective sur une grandeur ivoirienne à venir ? Nul ne peut comprendre les 30 dernières années de la politique ivoirienne sans ausculter la figure majeure du Président Alassane Ouattara. De même, on ne peut imaginer l’avenir sans avoir médité sur les succès et les échecs du « bravetchè ». Car la politique, rappelons-le aux esprits fanatiques de tous bords, est d’abord l’art de gérer la fragilité des affaires humaines. En tant que telle, la politique elle-même est aussi fragile que l’Humain. Car comme nous le rappelait si bien Amadou Hampâté Ba, « L’homme est à la fois Tout et Rien. Tout en tant qu’il porte en lui, l’étincelle créatrice de Dieu. Rien, en tant qu’une simple fièvre suffit pour l’anéantir. » 

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