Cameroun, Illégitimité politique : Biya n’est plus le représentant du peuple
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Cameroun, Illégitimité politique : Biya n’est plus le représentant du peuple :: CAMEROON

En quatre points essentiels, nous avons prouvé que le régime de Biya est un régime illégitime. En voici la suite.

Point n ° 5: Biya n'est pas le représentant du peuple (tradition démocratique)

Il y a des similitudes ici avec la tradition du contrat social que nous avons traité la dernière fois. En démocratie, le régime en place doit représenter les intérêts de la population qu'il représente et par laquelle il a été élu. Mais lorsque Biya changeait les termes traditionnels de la loi fondamentale comme mentionné déjà dans d’autres articles, où il changea les mandats présidentiels de cinq à sept ans, la population n’était en rien impliquée. Egalement, lorsque les amendements étaient apportés à la même loi qui passa d’un mandat de sept ans renouvelables une seule fois, à désormais aux termes de mandats présidentiels indéterminés, la population n’était pas impliquée non plus. Tout était fait dans un parlement plein de représentants de son parti. Or dans un parlement qui n'est pas équilibré, un changement constitutionnel de cette envergure doit se faire par référendum. La loi ne le requière pas, mais par éthique démocratique, c’est ce qu’il fallait faire pour des changements aussi déterminants. Mais lorsque le peuple n’est pas impliqué dans la gestion démocratique du pays, nous tombons dans la maxime qui dit que « le pouvoir fait le droit ». Le pouvoir ici c’est la force que quelqu’un ou un groupe de gens détient. Et le pouvoir fait le droit n’est rien d’autre que la dictature parce que si vous avez le pouvoir, vous pouvez imposer une loi et faire en sorte que les gens y obéissent. C’est encore ce que certains ont appelé le positivisme légal par opposition aux lois naturelles. Si vous avez le pouvoir et si vous pouvez amener les gens à se soumettre à vos volontés, vous faites de vos volontés des lois. C’est ce qui s’appelle positivisme légal et c'est exactement ce qui se passe au Cameroun.

De nos jours, Biya a déjà plus de trois décennies au pouvoir dans un monde raflé par la modernité et les changements structurels. L’Union Européenne resserre l’étau autour d’elle-même et exige une certaine rigueur de ses états membres et des aspirants au sacrosaint. Le conseil européen de Copenhague en 1993 a peaufiné trois critères fondamentaux par lesquels un pays doit souscrire s’il entend jouir du droit de membre de l’UE. Ces critères sont politiques, économiques, et les obligations de l’adhésion à l’Union.

Selon l’article 49 du traité sur L’UE, pour remplir les critères politiques, un pays doit faire ses preuves en termes d’état de droit (où est découragé le chao légal : tous sont égaux aux yeux de la loi) et de stabilité démocratique et protection des minorités. Les critères économiques sont remplis en faisant montre d’une économie viable et la capacité à faire face à la concurrence à l’intérieure de l’Union Européenne. Enfin, l’aspirant doit souscrire aux objectifs de l’Union politique, économique et monétaire et « reprendre l’’acquis communautaire’ (c’est-à-dire accepter et transposer dans la législation nationale l’ensemble du droit européen en vigueur). » En clair, chaque état membre de l’UE agrée que l’UE est le Super-Etat et que les membres en sont des entités dépendantes.

En Europe donc, tout au moins dans la zone de l’Union Européenne, aucun pays ne peut se payer le luxe de donner le pouvoir à un seul et même individu pour des décennies. Aucun état ne peut se livrer à une gestion injustifiable des ressources sans faire face aux représailles. La Grèce, l’Italie, et le Portugal en sont des exemples à succès. Même si les constitutions ne l’interdisent pas, même si par galanterie les textes de l’Union disent ne pas donner droit à l’Union de s’ingérer dans les affaires politiques internes, les dispositions tacites le démontrent de façon indubitable.

Cette même Europe qui ne pourrait permettre aucun débordement démocratique dans son continent est silencieuse, sinon plus, devant des impostures perpétrées au Cameroun. Les pays comme le Soudan ont eu tous les reproches au point de se retrouver avec leur président, Oumar El Béchir, condamné par contumace pour crimes commis au Darfour. Actuellement il y a seize présidents africains (déchus ou au pouvoir) qui sont tous poursuivis soit par leur pays, soit par la Cour Pénale Internationale, et tous ces seize sont sous le coup d’une instruction française en accusation des biens mal acquis. Bien que je sois pleinement contre la justice qui est imposée par l’ailleurs, force est de constater avec éberluement que dans le même temps, Biya est reçu à l’Elysée encore et encore et encore en grandes pompes, tapis rouge déroulé et armes levées vers le ciel, tel un gouverneur de colonie qui est choisi de recevoir le prix du meilleur agent des représentations d’outre-mer tel que certifié par les résultats réalisés dans les caisses du colon. Jusques à quand va-t-on assister à un tel théâtre rabaissant !

Contre-argument

Biya est un acteur de paix et les puissances étrangères lui en savent gré.

Si vous êtes si merveilleux de reconnaître autant de crédit à un seul homme, béni soit votre cœur ! Et bien entendu, il a joué une partition très importante dans le processus d’accalmie au Cameroun. Il écoute mieux ses parrains et voilà que l’accalmie a encore son ombre au pays. Mais parler de paix au Cameroun c’est aller un peu trop loin.

Notre président est comme un soldat qui agit sous les ordres sans poser de questions. S’il entend qu’il faut transporter des munitions, il le fait comme obéissant aux supérieurs. S’il entend qu’il faut laver les voitures, il le fait mêmement. Sinon, comment expliquez-vous que le président soit convaincu qu’il dirige un pays qui avance vers l’émergence alors même que ce pays peine à goudronner les routes qui sont autour de la présidence ? Quelqu’un peut-il nous expliquer pourquoi chemins de fer, aéroports, et routes tombent en lambeaux sans que le chef de l’état ne dise un mot ?

L’opération surnommé « opération épervier » aujourd’hui a déjà versé trop de gens en prison. Cette opération a pour noble objectif d’assainir la gestion de la chose publique. Mais elle s’est tournée en règlements de comptes contre les ambitieux politiques. Et s’il faille se voiler la conscience et penser que ceux qui sont en prison par l’épervier avaient détourné des fonds publics, ne serions-nous pas là à reconnaître l’échec d’un système, d’un régime et d’un homme ? Il faut apprendre à dire la vérité au lieu de raconter aux camerounais que des détournements aussi colossaux se passaient pendant plusieurs années dans les caisses de l’état et des grandes sociétés d’état à l’insu du chef de l’état. Chez les bantous, si vous épousez une femme et elle ne fait pas d’enfants, vous êtes conseillé d’en prendre un deuxième. Si la deuxième ne fait pas d’enfants non plus, vous êtes encouragé à en prendre une troisième. Mais si la troisième femme ne fait pas d’enfants non plus, alors l’on reconnaîtra que c’est vous-même qui êtes la cause de l’infertilité de vos femmes. Si tous ces hauts fonctionnaires étaient tous des voleurs, et ils étaient si fins que l’oreille la plus informée du Cameroun n’ait rien su pendant des décennies, alors il y a un problème de légitimité d’un tel régime. Et si l’oreille la plus informée était au courant, elle n’a donc rien fait pendant des décennies. Et ça c’est un problème et l’on se demanderait si le voleur devrait être dedans et le receleur dehors. Et s’il est clair que très peu de ceux qui ont été écroués pour détournements de fonds publics l’ont vraiment fait, et que tout le reste subit des pressions politiques, alors la démocratie n’existe pas au Cameroun, car, tout au moins cela est clair : Biya n’est plus le représentant du peuple.

A suivre…

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