Cameroun: « De la vacuité dans les comportements à l’inspiration musicale chez Malhox le Vibeur dans la chanson « ça comme ça sort »
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Cameroun: « De la vacuité dans les comportements à l’inspiration musicale chez Malhox le Vibeur dans la chanson « ça comme ça sort » :: CAMEROON

Gaétan Guetchuchi est chroniqueur, communicateur, débateur, enseignant de lycée, étudiant chercheur sur les cultures africaines au département d’Etudes Africaines à l’Université de Dschang/Cameroun. Il livre ici son analyse de la chanson « ça sort comme ça sort »

SOMMAIRE
 
Corpus : Le lyric      1
INTRODUCTION     3
I-Vacuité et fatalisme, les sources du « chanter »    4
1-Le titre et le fatalisme     4
2-De la dynamique kinésicodansante à la tendance vers les transes    4
II-De la banalisation de la monstruosité     4
1-L’esthétique de l’imbroglio    5
2-De la catégorisation dans la textualisation    5
 CONCLUSION     5

Corpus : Le lyric  
« ça sort, ça sort 
Malhox le vibeur !!!
Je porte mon pantalon, je suis débout c’est toi que ça serre ? 
Je wanda même 
Je danse ma chose tu te mets à rire, tu ris ta mère ?
Tu veux faire la morale à qui ?  mouf tu es mon père ? 
Quand j’ai déjà bu mes bières, 
Mon frère, est-ce que je vous gère ? 
Ça sort comme ça sort ! mon ami Ça sort comme ça sort  
Je tors mon coup comme MANI BELLA et 
Je descends mon kpongor 
Kpongor kpongor 
J’ai les jambes comme FALLY, mon ami mes reins ont le ressort 
Je ne contrôle plus mon corps, dj tu veux ma mort ? 
Mon ami quand je me fâche je me lâche 
Plus rien ne me fâche je crée mes propres piches 
Et si mon voisin fait un way qui me wanda mouf je m’en fous je triche 
(Bis)
Deuxième casier, on est déjà avancé 
On veut déjà déranger
On commence à se rappeler comment à l’époque on dansait le zingué 
Zingué zingué zingué zingué moto 
On se rappelle comment on dansait le pédaler à l’époque de zélé zélé 
Au pica au péda au picasso : 
Malondo ma mboulè Xavier la gaffe tu connais 
Mignoncité Guy Watson tu connais 
La danse des sorciers, Eza Boto tu connais 
Ndombolo, makossa, bikutsi ; kpongor 
 Quand on a déjà bu nos bières, 
Ça sort comme ça sort ! mon ami Ça sort comme ça sort  
Ça sort comme ça sort ! mon ami Ça sort comme ça sort  
Ça sort comme ça sort ! laisse seulement  Ça sort comme ça sort  
Ça sort ça sort laisse seulement Ça sort comme ça sort ! Ça sort comme ça sort  
Quand tu entres au njocka, tu vois un djo en train de danser 
Par sa manière de danser tu peux déjà déviner quel est son métier 
Le menuisier danse comme s’il était en train de scier scier scier scier le bois mort
Le mécanicien danse comme s’il était en train de visser visser visser visser le moteur 
Le ben skinneur danse comme s’il était en train de filer filer filer 
Après on entend seulement  Poum !! il a déjà cogné wèèè 
Ecartez écartez laissez passer le pater veut danser 
Même si le dj mixe la tecno, il danse l’assiko de Jean Bikoko 
Il ne connait pas vos choses que vous appelez Beyoncé 
Laissez passer la mater va vous montrer 
La mère tu connais on mixe le RNB toi tu danses le benskin de Talla André 
Marie 
Refrain 
Dj mets ça dombolo makossa bikutsi kpongor mouf 
Quand  on a déjà bu nos bières 
Tu connais ma chérie ça sort comme ça sort 
Refrain (plusieurs fois)
    
INTRODUCTION 

La musique à une  époque antique était inspirée par les muses1, la matière de celle-ci étant la gloire des héros, les récits épiques et autres thèmes louables. En Afrique ce fut quelques fois le même tandem mais on voyait aussi des chants qui accompagnent tous les moments importants de la vie : naissance, mariage, rituel initiatique etc. volte-face radical à partir des années 2010 : que du sexe, que de l’alcool ! cette situation pousse à se demander comment se manifestent les relents de la dérive dans les textes qui commandent ces mélopées. Penchons-nous sur la chanson « ça sort comme ça sort » de l’artiste Malhox paru dans les bacs depuis quelques mois déjà. Il convient pour les besoins de l’analyse de questionner d’un, la vacuité doublée de fatalisme qui s’y insèrent ; de deux, la banalisation de la monstruosité. 

I- Vacuité et fatalisme, les sources du « chanter »

D’entrée de jeu, à l’écoute de cette chanson, on est frappé par des énoncés qui sonnent comme une invite à la République très très  démocratique de la Vacuité et du fatalisme. Le titre couplé à l’esthétique de la danse sont les deux mobiles de ce paradigme.
 
1- Le titre et le fatalisme 

Le titre est, par-dessus tout,  l’élément à forte prégnance fataliste qui retient l’attention. A ce sujet, c’est un  énoncé constitué de plusieurs éléments syntaxiques : le pronom démonstratif ‘ça’ qui revient deux fois ; en effet, ce pronom, dans un contexte camerounais est porteur d’une charge de vacuité et de brouillage. Ainsi aura-t-on coutume d’entendre dire ‘ça vient comme ça vient’, ‘ça ne fait rien’, ça fait quoi’. 
   Le deuxième élément qui vient dans l’énoncé est l’idée de l’atemporalité contenue dans le verbe sortir avec ‘ça sort’ il charrie  dans ce contexte des significations comme donner, causer, aboutir à ce que, etc. Il donne,  ce prédicat  avec  son thème ‘ça’ une tendance vers la généralisation et la banalisation de tout ce qui est du ressort de la dérive comportementale, langagière, morale selon les cas.  Cette énonciation est séparée par l’adverbe ‘comme’, ce qui concoure à accentuer les aspects proprement fatalistes des attitudes des uns et des autres. C’est là un point de la verbalisation sous couvert du discours musical de la vacuité. 

2- De la dynamique kinésicodansante à la tendance vers les transes

       Il apparaît avec la mise effective en texte de la topique fataliste que des morceaux lexicaux et syntaxiques la soutiennent.  La tendance vers la transe commence :
 « Quand j’ai déjà bu mes bières, 
Mon frère, est-ce que je vous gère ? »

A partir de là peut commencer toute une batterie de choses qui, sans égard pour le normatif,  implique le corps dans une véritable perte des sens et des sensibilités en l’engageant dans une sorte de transes relayée par les énoncés suivants :
« Ça sort comme ça sort ! mon ami Ça sort comme ça sort  
Je tors mon coup comme MANI BELLA et 
Je descends mon kpongor 
Kpongor kpongor 
J’ai les jambes comme FALLY, mon ami mes reins ont le ressort 
Je ne contrôle plus mon corps, dj tu veux ma mort ? »

La profusion des mots qui donnent la porte ouverte aux dérives de comportement permet de montrer comment les habitudes et les attitudes sociales convergent vers là, vers l’opacité à coloration transantique2. 

II- De la banalisation de la monstruosité 
      
L’idée directrice de cette partie est de montrer que la monstruosité est  banalisée par l’esthétique de l’imbroglio ainsi que de la catégorisation dans l’opacité. 

1- L’esthétique de l’imbroglio

Il faut signaler qu’au sujet de la musique africaine de ces dernières années, dont le titre analysé fait partie, il y a une démultiplication des rythmes qui naissent par renouvellement et mimétisme des anciens rythmes. Du dombolo de la RD Congo à l’assiko du Cameroun en passant par le couper décaler de la Côte d’Ivoire pour ne citer que ceux-ci dans le golfe de Guinée, le nègre aime danser disaient certains. La chanson, ‘ça sort comme ça sort’ y va par une rythmation des autres rythmes musicaux ce qui débouche sur l’imbroglio prosodique et une fin de l’harmonie musicale. A l’instar des coupures suivantes : 
« Malondo ma mboulè Xavier la gaffe tu connais 
Mignoncité Guy Watson tu connais 
La danse des sorciers, Eza Boto tu connais 
Ndombolo, makossa, bikutsi ; kpongor » 

L’imbroglio musical ainsi évoqué est là pour mimer la banalisation du désordre, de l’abscond, de la monstruosité observable dans la société. 

2- De la catégorisation dans la textualisation

L’analyse sociolinguistique emprunte souvent à la sociologie et à l’anthropologie les outils méthodologiques comme la catégorisation des dynamiques sociales que l’on enferme dans des couloirs tant ethnique, sexuel, racial et même professionnel. C’est cette dernière qui nous interpelle car Malhox fait des catégories sociales une des chevilles thymiques de sa chanson. De ce point de vue, l’on a dans chaque métier des actions quotidiennes qui sont répliquées sous forme des isomouvements quand ceux-ci se retrouvent dans un état de transe dansante dans un « djocka ». C’est pour cela que : 
« Quand tu entres au njocka, tu vois un djo en train de danser 
Par sa manière de danser tu peux déjà déviner quel est son métier 
Le menuisier danse comme s’il était en train de scier scier scier scier le bois mort
Le mécanicien danse comme s’il était en train de visser visser visser visser le moteur 
Le ben skinneur danse comme s’il était en train de filer filer filer »

Personne, de ce point de vue ne peut échapper à la folie dansante, incapable de se donner un autre rythme que ce que leur imposent les vicissitudes du quotidien, ils  se résolvent à imiter  dans les bistros le soir venu, peut-être par nostalgie, les mouvements du jour. 
    
CONCLUSION 

Pour conclure, il apparaît que la musique camerounaise est entrée dans un couloir qui mime rigoureusement la psychologie des personnes. Malhox surfe stratégiquement sur cela pour offrir des chansons qui épousent l’horizon d’attente des uns et des autres en proie à une promiscuité ambiante dans les villes, à une crise des comportements. Le débat est ainsi lancé, faut-il faire le procès aux artistes de faire preuve de stratégie situationnelle en composant avec la sexualité ou plaindre toute la société qui ouvre des boulevards pour ce genre de chanson. A vos commentaires, c’est parti !!!!

1-Ce qui nous rappelle les sept muses de la mythologie grecque
2- Liée à la transe

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