Rebondissement : Les tribulations d’un officier supérieur camerounais en France
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Rebondissement : Les tribulations d’un officier supérieur camerounais en France :: CAMEROON

La Justice française dévoile enfin par son inculpation, ce qui est véritablement reproché au Lieutenant-colonel de l’armée de l’Air interpellé le 4 octobre 2016 à Paris en France.

De sources judiciaire et diplomatique autorisées, le Lieutenant-colonel Ghislain Joël Mboutou Ele, attaché de Défense du Cameroun au Maroc avec compétence en Tunisie, en Libye et en Mauritanie, vient d’être officiellement inculpé par la Justice française. Elle lui fait grief d’avoir fait abus de biens sociaux, d’avoir tenté de corrompre et de suborner les fonctionnaires de police judiciaire dans l’exercice de leurs fonctions, de s’être rendu coupable de blanchiment aggravé et répété de capitaux en bande organisée, en coaction avec l’entreprise Mag Force International.

Au regard  de tout ce qui précède, la haute hiérarchie des forces de Défense camerounaises aurait été interpellée. Une commission rogatoire aurait été délivrée par la Justice française à l’intention du Tribunal criminel spécial (Tcs) de Yaoundé pour exécuter en son lieu et place l’acte d’instruction ou de procédure en relation avec cette affaire scabreuse qui jette un discrédit certain sur le Cameroun. Le Lieutenant-colonel de l’armée de l’Air du Cameroun, Ghislain Joël Mboutou Ele, avait, de sources concordantes, été interpellé à Paris dès sa descente d’avion à l’aéroport Roissy Charles de Gaulle, le 4 octobre 2016. L’attaché de défense du Cameroun au Maroc avec zone de compétence en Tunisie, et en Libye, est détenteur d’un passeport diplomatique.

Avant d’intéresser les agents de la Direction générale de la sécurité intérieure (Dgsi) de la France et de passer par la case justice, l’officier supérieur de l’armée camerounaise, séjournait selon des indiscrétions, au Georges V, un établissement hôtelier luxueux proche des Champs Elysées, qui n’est couru que par des personnalités qui ont pognon sur rue. Dans ce registre, l’homme de guerre en disposait, suffisamment en tout cas -on parle de 2 millions d’Euros- pour se faire  mettre le grappin dessus par les agents antiterroristes français chargés du contre- espionnage et de la protection du patrimoine économique, détenteurs du pouvoir de police judiciaire.

L’affaire aujourd’hui intéresse au  plus haut point l’armée camerounaise. Elle a réussi à créer des clivages entre les officiers supérieurs ou non en pro et contre Mboutou. L’officier supérieur aura marqué de son sceau les passages à la tête du ministère délégué à la Présidence chargés de la Défense de plusieurs titulaires du portefeuille de ce poste sécuritaire névralgique. Les plus connus sont Amadou Ali, Laurent Esso, Edgard Alain Mebe Ngo’o. Rémi Ze Meka n’aura pas eu besoin de ses services, pas plus que l’actuel ministre Joseph Beti Assomo. Promu ministre de la Défense en remplacement d’Edgard Alain Mebe Ngo’o, protecteur de Ghislain Joël Mboutou Ele, l’ancien gouverneur de la Région du Littoral aurait été suffisamment briefé sur l’officier supérieur qui squattait encore ses locaux en tant que chef adjoint du Secrétariat militaire.

On lui aurait fait part de l’aura incontestable au sein de l’Armée de Ghislain Joël Mboutou et surtout de la capacité de nuisance de ce dernier. Et de bien d’autres choses. Est-ce fort de tout ce cocktail en bulletins de renseignement que l’Administrateur civil principal se serait fait une certaine opinion, du reste justifiée à la suite de ces derniers événements, de celui qui aurait été destiné à constituer pour lui un caillou dans ses nouveaux souliers de garant par procuration des Forces  de défense nationale ?

Appréhensions

Toujours est-il que l’officier supérieur fera les frais d’une mutation à Rabat au Maroc, loin de son ancien protecteur Edgard Alain Mebe Ngo’o, surtout à distance respectable des affaires concernant la logistique de l’Armée. Il se murmure au sein de la «Grande muette» que Ghislain Joël Mboutou Ele se serait constitué d’épais bas de laine au travers de nombreuses et d’importantes transactions juteuses diverses ayant nécessité le décaissement de sommes faramineuses en rapport avec l’acquisition des matériels militaires pour le compte de la Défense.

Ce qui semble expliquer cet acoquinement révélé par la Justice française avec la société Mag Force, au capital social de 192 millions d’Euros, domiciliée 35, rue Saint Denis, 9300 à Aubervilliers en France. Société anonyme à conseil d’administration, spécialisée dans le commerce de gros (commerce interentreprises) de fourniture de vêtements et d’équipements professionnels et militaires, immatriculée le 2 septembre 1998, son chiffre d’affaires en 2014 est de 34.877.500 Euros.

Normal,  avec des clients du calibre de Mboutou ou de Mebe Ngo’o. En admettant que cette entreprise ait versé des commissions à celui qui aujourd’hui a maille à partir avec la Justice française, on peut aisément faire le rapprochement avec les millions d’Euros retrouvés sur lui, ou avec le grand train de vie qu’il mène. En sept années passées aux côtés de Mebe Ngo’o où il faisait ombrage dit-on à son chef, le capitaine de Vaisseau Joseph Tchouatat, chef du Secrétariat militaire, Ghislain Joël Mboutou aurait en effet pu se bâtir un véritable trésor… de guerre, et davantage, par ricochet, constituer celui de son mentor Edgard Alain Mebe Ngo’o.

Aujourd’hui devenu ministre des Transports, il a réussi le tour de force de créer contre sa personne, un fort sentiment d’acrimonie gracieusement à lui concédé par la plupart de ses compatriotes. Ils lui doivent cela à la suite de la catastrophe ferroviaire survenue à Eséka le 21 octobre dernier qui a endeuillé le pays, et dont la gestion controversée par celui-ci continue d’alimenter ce sentiment de rejet. Quoiqu’elle ne soit pas officielle, son implication même indirecte dans l’affaire des 2 millions d’Euros semble ne faire aucun doute. Si toutefois on tente d’établir, même maladroitement, le lien avec les échanges qu’auraient eus le membre du gouvernement et l’«homme en tenue», via les messages électroniques, on pourrait vite se rendre à l’évidence que les deux hommes étaient plus que de proches collaborateurs au ministère de la Défense, tant leurs intérêts personnels se confondent.

Faux-fuyants

Du coup, l’intérêt porté par les agents de renseignement français sur l’officier supérieur camerounais, qui avait certainement régulièrement ses habitudes dans la capitale française, ne serait donc sans doute pas fortuit. De certaines sources diplomatiques, on apprend que les malheurs de l’officier supérieur camerounais en terre française sont partis de Rabat au Maroc. Les services de renseignement royaux auraient mis la puce aux oreilles de leurs homologues français. Le reste qui est déjà connu, n’était alors que pure formalité.

Le Lieutenant-colonel Mboutou aurait même tenté de résister à ses interpellateurs, notamment ceux de la Direction générale à la sécurité intérieure (Dgsi). Cette institution abrite une direction technique dont la mission est de traquer les personnes qui suscitent pour eux de l’intérêt sur les réseaux électroniques. En effet, ceux-ci sont largement sollicités pour les transferts de fonds illicites, le blanchiment, les trafics d’armes, de drogue, la prolifération nucléaire ou balistique et le recrutement des djihadistes. La régularité de certaines transactions du même tonneau que celles qui ont concouru à son interpellation auraient-elles été jugées interlopes, considérées et sanctionnées comme telles ?

N’aurait-il eu, dans l’esprit du militaire que d’autres cieux européens pour faire des dépenses autrement dispendieuses ? De fait, lesté d’un tel pactole, comment aurait-on pu allègrement le dépenser sous les tropiques, surtout au Cameroun, sans toutefois attirer l’attention des institutions chargées de lutter contre l’enrichissement illicite ou sans cause, la corruption, le détournement des deniers publics, compte non tenu de la jalousie des compatriotes qui auraient jasé sur ces faramineuses dépenses, et alerté une certaine opinion ?

La décision rendue par le Tribunal de Grande Instance de Nanterre en France, juridiction au sein de laquelle Joël Mboutou a été auditionné, vient à point nommé gommer les dénégations de l’officier supérieur et de son protecteur, qui criaient au complot et à la délation fortuite, et jeter du discrédit sur ces justifications bancales qu’ils considéraient comme des systèmes de défense, avérés au final, être dérisoires. Une inquiétude cependant demeure. Féru de rétropédalages comme on l’a vu avec la catastrophe ferroviaire d’Eséka où il refuse toute responsabilité, va-t-il accepter de continuer à être solidaire de ce « collaborateur de sept ans » dans cette affaire aux relents fétides au risque d’y laisser sa tête ?

Une attitude circonspecte devrait être de rigueur, tant dans certains cercles on cancane sur le peu d’égards qu’Edgard Alain Mebe Ngo’o accorde aux causes perdues et qui ne peuvent pas lui profiter. Si «le Cameroun c’est le Cameroun» comme on aime tant à le dire et même à l’écrire, pour justifier des aberrations de toutes sortes, il ne serait pas indiqué de penser qu’ailleurs d’autres slogans ne se vérifient pas. De Rivarol, auteur français, on apprend que «Ce qui n’est pas clair n’est pas français».

Peut-on affirmer que l’attitude de Mboutou en France n’était pas claire ? Ce pays regorge plusieurs institutions chargées de faire la lumière là où il fait sombre. À «Le Courrier», nous espérions que la lumière vienne des deux hommes après que nous ayons pris la peine de les contacter par message. Peine perdue. Le ministre des Transports, Mebe Ngo’o Edgard Alain et son homme de main le Lieutenant-colonel Mboutou Ele Ghislain, sont restés muets jusqu’au moment où nous mettions sous presse.

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