Cameroun, M. LE PRESIDENT ET Mme Chantal BIYA : POUVEZ-VOUS RENTRER, CHEZ VOUS, AU CAMEROUN, COMME LE FONT LES AUTRES, LORS DES CATASTROPHES, PERILS ET ACCIDENTS DE GRANDE AMPLEUR ?
CAMEROUN :: POINT DE VUE

Cameroun, M. LE PRESIDENT ET Mme Chantal BIYA : POUVEZ-VOUS RENTRER, CHEZ VOUS, AU CAMEROUN, COMME LE FONT LES AUTRES, LORS DES CATASTROPHES, PERILS ET ACCIDENTS DE GRANDE AMPLEUR ? :: CAMEROON

A LA PLACE DES COLLOQUES AUX DEPENSES INUTILES, A VOTRE GLOIRE, ET DES SEJOURS DE LUXE EN SUISSE, LES CAMEROUNAIS VOUS ATTENDENT TOUJOURS A MAROUA ET A PRESENT A ESEKA ET MATOMB ! J'ai bien lu le communiqué du ministre de la Communication portant sur les " instructions spéciales du chef de l'Etat qui suit la situation de près ", après le déraillement de train d'Eséka dont le bilan ne cesse de s'alourdir, aussi bien en nombre de morts, 55 ce matin, qu'en blessés, dont le pronostic vital laisse augurer d'une peine lourde pour la Nation.

Je vous avoue qu'une fois encore, j'ai cru à une série de cauchemars, essayant de me convaincre qu'il s'agissait d'un " fake", ces documents de faux site dont a du vous parler la très connectée Brenda Biya.
Hélas ! Mille fois hélas, c'est notre triste réalité. Les Camerounais se résignent à ces non-surprises. Il n'y aura bientôt plus que des illuminés pour croire à une cour des miracles à Etoudi, à la place de celle des griots.

Au vert des arpents d'Eseka, maculé du sang de nos compatriotes, correspond le bleu de la gandoura du ministre, radieux de louanges et la brise tranquille de votre séjour genevois, que perturbe à peine le chahut lancinant et éperdu de nos compatriotes du Code.

Je veux bien savoir ce que signifie en langage moderne, simple et responsable, " instructions spéciales " - quand un gouvernement se perd en démentis, guerre contre les photos sur les réseaux sociaux, absence de dispositif fiable de protection civile - d'un chef de l'Etat au bord du Lac Léman, alors même que votre présence, aurait au delà de sa portée symbolique, donné le sentiment que nous faisons corps, avec sincérité, empathie et compassion avec les malheurs des nôtres.

C'est en cela qu'aurait plus de sens, à la place des articulations flagorneuses de ce colloque sur Mme Biya, source de dépenses ubuesques dans une université d'Etat qui manque parfois des basiques, une présence qui donnerait plus d'allant à une dimension de mère de la Nation, dont l'action sociale serait la symétrie parfaite de la compassion. Ce que j'avais cru percevoir, à Paris, lors de la couverture pour le compte du magazine de l'Ambassade du Cameroun en France, dont j'étais le rédacteur en chef, de la cérémonie de sa nomination comme ambassadrice de bonne volonté de l'UNESCO pour l'éducation et l'inclusion sociale, par M. Koichiro Matsura, alors Directeur général de l'Unesco, en novembre 2008.

Le temps n'est pas aux bulles de cette cérémonie, ni à la fête. Il est aux bougies que nous devons allumer sur ces tombes, au chevet des blessés, à la porte de nos hôpitaux qui souffrent le martyre du sous-équipement, celui d'Eseka devant faire la triste expérience.

Le temps aussi, est à une claire explication aux camerounais, sur les raisons de ces séjours prolongés à Geneve, dans le droit fil de la République exemplaire que vous avez prônée lors de votre investiture en novembre 2011 :
- Que nous coûte ces séjours et pourquoi ? Alors-même que, comme partout en Afrique, désormais, les citoyens ont la satisfaction de voir des chefs d'Etat aux cotés des populations, soldats et personnes éprouvées en de nombreuses circonstances, surtout lorsqu'il advient un péril, une catastrophe ou un accident d'une grande ampleur.
- Comment après tous les sommets et rencontres comme celle des Nations-Unies, tous les chefs d'Etat rentrent au pays, et vous prenez le chemin d'ailleurs ?
M. le Président, s'il y'a une enquête, ce serait aussi celle-là. Ou avec un peu de transparence, vos rêves perdus de moralisation en 82, pourrait, en édifiant nos concitoyens sur le gouffre financier de notre installation à demeure à l'Hotel Intercontinental, retrouver un rab de crédibilité. Oui, ce trou financier plus béant que celui qui déchire la route depuis hier à Matomb !

Au péril d'Eséka correspond, en effet, le trou béant de Matomb, balafre sur l'axe-lourd Yaoundé-Douala, artère stratégique, dont la veine est coupée à quelques semaines de la Can féminine. Vos collaborateurs ont trouvé la belle idée de placarder votre photo sur une pochette de Cd d'hymne de compétition sportive, au lieu de vous notifier le péril imminent d'une route éreintée par les accidents et un entretien défectueux. L'art bien connu, chez nous, de remplacer des trous par des creux !
Avec tout le respect du à votre fonction, il serait temps, dans ces années qui ponctuent le crépuscule d'une longue vie politique et administrative, je vous demande humblement d'éteindre les lampions et bougies de Genève et de votre tour d'ivoire et d'allumer celles du deuil, de prendre le chemin de nos lieux de périls et, tout simplement, de revenir à la maison.

En Afrique, chez vos parents Yezoum, Bulu, Nanga, Beti, nos pères Bantous et autres, un chef, un père, une mère ne font pas le deuil au téléphone, par télex, par fax, par sms ou par " instructions " dans une salle de sport d'un lieu cossu ou une suite présidentielle !

Que l'on cesse de vous prendre pour un dieu. C'est vous rendre un très mauvais service. Pour ma part, je n'en ai qu'un seul et en tant que citoyen, mon devoir est aussi de vous rappeler que nous n'avons pas besoin d'un président au Ciel mais sur terre. La terre ferme de Fotokol, Eseka et Matomb.

Quand on a un tel pouvoir - celui que la ruse de notre société de cour a transformé en privilège de droit divin - on l'utilise non pas pour soi, mais pour le plus grand bien. On l'utilise pour faire mettre les drapeaux en berne, décréter des jours de deuil national. On l'utilise pour déployer toute la charge symbolique de la fonction. On l'utilise, oui, pour être là. Avec ses compatriotes, dans les moments de grave péril. Le reste n'est que mots, paroles, théâtralisation de boulevard et illusions ! Le reste, aussi, n'est que littérature ministérielle éprouvée ! Le reste n'est que conception tropicale de la fonction présidentielle !

Je scruterai dès cet instant le ciel pour voir passer, avec l'énergie de l'espérance, un avion qui vous ramènerait dignement, comme nous l'ont appris nos ancêtres, car " on ne suit pas de près " un deuil à 7000 kilomètres 

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