Burkina Faso,Justice aux martyrs de l’insurrection: pourquoi ça tarde tant?
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Burkina Faso,Justice aux martyrs de l’insurrection: pourquoi ça tarde tant?

L’hommage aux martyrs de l’insurrection des 30 et 31 octobre 2014 est un pas important parce que riche de symboles dans le processus d’apaisement des cœurs et de la réconciliation. L’autre geste que les victimes et leurs ayants-droit attendent de l’Etat pour faire vraiment le deuil de leurs morts ou vivre avec moins d’amertume avec les séquelles des violences subies est sans doute la justice.

Et à ce niveau, l’on ne peut vraiment pas dire que les choses avancent comme on l’aurait souhaité. Certes, la justice a l’habitude de s’entourer des précautions nécessaires au bon déroulement du traitement de ses dossiers. Ce qui peut entraîner une apparente lenteur, compréhensible quand il est difficile de savoir ou de soupçonner sérieusement les éventuels suspects. Cela n’est nullement le cas dans les tueries lors de la récente insurrection populaire. Car, il y a eu une planification de massacre des manifestants, même si, par extraordinaire, la situation a connu un changement inattendu qui a permis d’éviter le carnage.

Il y a, d’abord, eu la réquisition de l’ancien Premier ministre, Luc Adolphe Tiao, qui invitait les forces de l’ordre à faire usage de leurs armes contre les civiles à mains nues. Des corps sans vie de civiles ont également été retrouvés devant ou non loin du domicile de François Compaoré où le feu a été ouvert contre les manifestants. Des insurgés ont en outre été tués devant la présidence du Faso où seul le Régiment de sécurité présidentielle (RSP) a pignon sur rue. Des images sont, du reste, là pour le prouver. Si l’on sait qu’en plus de Blaise Compaoré, l’ancien Chef d’état-major particulier de la présidence du Faso, le commandant des troupes du RSP et son adjoint sont censés pouvoir donner les ordres à Kosyam, un minimum de travail doit pouvoir être fait par la justice. Ne serait-ce qu’une audition, voire une interpellation ou, pourquoi pas, une arrestation des potentiels commanditaires aurait pu rassurer les populations que l’on ne tente pas de faire passer leurs morts par pertes et profits. Les lieux de tueries et leurs maîtres étant connus, même si les auteurs de ces actes répréhensibles ne sont pas individuellement ou nommément identifiés pour le moment, la moindre des choses à faire serait de demander des comptes aux probables commanditaires que sont ces propriétaires ou garants de ces lieux.

Nous aimerions croire que la justice fait son travail dans la discrétion pour préserver le secret de l’instruction et éviter que des suspects ne brouillent les pistes. Mais comme le dit l’adage, «quand l’os dure dans la main de son maître, le chien finit par perdre son optimisme». Un acte fort devait être posé pour rassurer. En émettant, par exemple, un mandat d’arrêt international contre Blaise Compaoré et son frère cadet, ne serait-ce que pour qu’ils viennent dire si oui ou non ils ont donné l’ordre de tirer sur les manifestants.

Quant aux responsables du RSP, y compris le Premier ministre Zida lui-même, ils doivent également être interrogés. Et il faut rendre publiques ces actions pour que le peuple insurgé sache qu’un travail est en train d’être fait pour rendre justice aux martyrs. Comme l’a d’ailleurs rappelé leur porte-parole, le pardon et la réconciliation ne sont pas impossibles. Mais le seul pardon et la seule réconciliation qui vaillent ne sauraient s’opérer sans une vraie justice et une repentance sincère.

© Source : Les Echos du Faso

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