Martin Oyono : Pourquoi les travaux de la centrale à gaz sont bloqués
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Les révélations Martin Oyono, député de cette circonscription géographique et politique.

J’ai lu avec un grand intérêt l’article paru dans Mutations du  30-04-2015 en son n°3887, dont le titre  porteur d’angoisses et d’inquiétudes ne surprend nullement le modeste observateur averti que je suis au regard de l’expérience engrangée dans le suivi du dossier sus-évoqué depuis la 8e législature au sein de la commission compétente à l’Assemblée nationale et au regard  de l’implantation des infrastructures incriminées dans la sphère géographique de ma circonscription électorale, l’océan. Permettrez moi de parler dans un langage simple pour répondre aux importantes interrogations posées par votre article dans l’optique de situer les responsabilités des acteurs clés intervenant dans le processus de mise en place des centrales à Gaz et électrique de Bipaga et Mpolongwe.
 
En effet, il s’agit de poser la question de savoir où le processus a trébuché avant de constater le lieu actuel de sa chute. Vous avez affirmé que dans la genèse de ces projets la Snh, expert de l’Etat du Cameroun dans le domaine de l’exploration du gaz et du pétrole, avait suggéré et proposé de construire des infrastructures de traitement et de transport du gaz naturel afin d’injecter près de 500 Mw dans le réseau national en déficit chronique par rapport à la demande en fourniture d’électricité.  Si cette option n’a pas été retenue, le gouvernement aurait quand même dû prêter attention aux mises en garde  de la Snh qui pensait que le concessionnaire Aes-Sonel à l’époque n’avait pas les capacités requises pour construire ces infrastructures.

C’est pourquoi il faut interroger les jeux d’intérêts qui ont conduit à la création de Kpdc et Dpdc sociétés filiales du concessionnaire Aes-Sonel dans lesquelles on a amené savamment l’Etat  à prendre des participations dans le capital social des ces structures privées avec en toile de fonds  un intéressement de l’administration part la désignation des membres du gouvernements à la tête de leurs conseils d’administrations. Fort de ce statut privilégié, le concessionnaire a réussi à arracher à l’Etat un prix de cession du gaz très préférentiel pouvant lui permettre de faire des bénéfices conséquents sans commune mesure avec le degré de satisfaction du consommateur ou la nécessité pour l’Etat d’amortir ses investissements. Aux dernières nouvelles, à titre d’illustration, Eneo a réalisé en 2014 un bénéfice net de 15 millions de dollars.

Sur le plan technique, les visites de terrains que notre commission a pu effectuer à Kribi avant la mise en service de la centrale de Mpolongwe, sous la conduite du très honorable président de l’Assemblée nationale ont donné l’occasion aux membres de notre commission de faire le même constat que celui du régulateur Arsel dans votre article à savoir : « que la technique utilisée à Kribi par Kpdc c’est-à-dire les moteurs à pistons est dépassée ». Et pour preuve, lors de la mise en fonction des deux unités (Bipaga et Mpolongwe) deux (02) des moteurs à pistons avaient lâché et provoqué un incendie heureusement maitrisé par l’unité de sapeurs pompiers réquisitionnée à propos par la Snh. Sauf erreur de notre part la qualité  approximative de ces équipements explique mieux que cette centrale ne soit qu’à 70% de ses capacités de production, ce qui  bât en brèche le prétexte de la demande en électricité insuffisante du marché et des ménages pour consommer les quantités de gaz contractuels que la Snh et Perenco livrent à Kpdc. Sinon comment justifier l’insuffisance des connexions jusqu’à date décriée sur l’ensemble du territoire ou des délestages qui persistent sur l’ensemble du réseau national ?

Pour répondre à la question de savoir ce qui coince dans l’opération d’extension de cette centrale à gaz, vous conviendrez avec moi qu’il s’agit tout simplement de la question du meilleur arbitrage que le gouvernement de la République devrait opérer sur le sujet. Malheureusement, dans ce clair obscur savamment organisé depuis la genèse de ces projets par ceux qui, devant défendre les intérêts de l’Etat, se retrouvent plutôt de l’autre côté de la barrière pour défendre ceux des concessionnaires privées contre la Snh, l’Etat, et les consommateurs parce qu’ayant choisi leur statut de Président de conseil d’administration de ces structures privées au détriment de celui de membre du gouvernement de la République. Quelle en est la contrepartie ? Seuls les initiés pourront répondre à cette question.
 
En conclusion n’est-ce pas l’expertise et les avis de  la Snh qui représente les intérêts de l’Etat face à ces concessionnaires qui devraient prévaloir ? Car on n’a pas besoin d’être un grand juriste pour comprendre que l’opération d’extension de la centrale à gaz de Kribi ne doit plus générer une nouvelle convention, mais plutôt un avenant à l’ancienne convention signée avec Aes-Sonel.

Au demeurant, qui de la Snh et d’Eneo devrait démontrer sa citoyenneté auprès du public camerounais lorsqu’on connait la part de contribution du premier cité au budget de l’Etat, (1/5eme) et le degré d’insatisfaction du public que le 2ème cité provoque par ses délestages et le non respect des termes de son cahier de charge. Vous avez posé la question du pourquoi du blocage de l’extension ? J’espère que mes réflexions pourront contribuer à vous apporter quelques unes des réponses souhaitées.

© Source : Mutations

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