OPPOSITION CAMEROUNAISE, VOUS AVEZ AUSSI ECHOUÉ. « NOW YOU MUST ALSO GO, AND NOW IS OUR TURN ».
CAMEROUN :: POINT DE VUE

OPPOSITION CAMEROUNAISE, VOUS AVEZ AUSSI ECHOUÉ. « NOW YOU MUST ALSO GO, AND NOW IS OUR TURN ». :: CAMEROON

Pendant longtemps, les analystes ont caressé l’opposition dans le sens du poil en reconnaissant qu’elle évolue dans un environnement extrêmement répressif où le premier sous-préfet venu peut interdire vos assemblées, de la plus grande à la plus insignifiante, où le dernier des commissaires de police ou commandant de gendarmerie peut vous embastiller sous des prétextes les uns plus grotesques que les autres.

Mais après avoir reconnu cette entrave sérieuse à son épanouissement politique, j’ai décidé de bousculer son quotidien en leur criant la vérité suivante : Chère opposition, vos actions et réactions vis-à-vis du pouvoir de monsieur Biya sont faibles, risibles, puériles, et, en définitive, n’ont aucun avenir parce que vous n’avez pas pris le temps de faire une évaluation sans complaisances de vos échecs successifs depuis l’an de grâce 1992, ce qui vous aurait permis de comprendre vos multiples erreurs et de corriger le tir. Les incantations dans les radios et télévisions privées n’apportent pas de changement

La transition au Cameroun.

Il n’y aura pas de transition au Cameroun si elle n’est pas préparée et qu’elle n’est pas précipitée au moment opportun.

  • Une transition politique n’est pas le simple changement de chef au sommet de l’État ;
  • Une transition politique n’est pas le simple changement d’équipe de gouvernement, l’éviction d’un groupe politique X au pouvoir et son remplacement par un groupe politique Y de l’opposition ;
  • Le remplacement de Paul Biya par Joshua Osih, Adamou Ndam Njoya, ou Maurice Kamto ne correspondrait donc pas à une transition politique.

Pour ne pas revivre l’escroquerie de 1982 qui n’était rien d’autre que le changement d’homme dans la continuité du système postcolonial de paupérisation de nos concitoyens, pour qu’il y ait transition, pour que nous ayons l’opportunité de montrer au Camerounais ce que vous pouvez faire en tant que gouvernants pour donner au pays une chance de progrès, nous devons dès ce début de 2015 préparer la transition.

Si nous ne la préparons pas activement et méthodiquement, je vous assure que nous serons les spectateurs d’une course au pouvoir entre les membres du RDPC et il ne nous restera que vos slogans de depuis 1992 à verser dans les oreilles fatiguées des camerounais.

Qu’est ce qui cloche ?

La création d’un regroupement nommé Pacte républicain, qui a fait scission avec ce que les medias ont appelé ‘groupe de 7’ est là pour témoigner de la difficulté, pour les leaders politiques, de se mettre ensemble pour donner au pays les moyens d’une alternance crédible.

Depuis 1990, de tentatives de regroupements en alliances éphémères, assurément l’opposition s’est donné des verges pour se faire fouetter. Dans une  ‘note explicative’ Maître Momo Jean De Dieu, président du Paddec, l’un des inspirateurs du Pacte républicain  et ancien du G7 où il a été exclu pour non-respect de la discipline de groupe déclare : «Le Pacte républicain nait de la volonté de certains leaders de l'opposition de mutualiser leurs forces, énergies et finances en vue de la conquête du pouvoir législatif et municipal partout au Cameroun. L’idée est de se mettre tous ensemble et en raison de l'influence de chaque parti dans telle région, établir des listes pour les prochaines élections avec l'idée d'avoir un seul adversaire en face le Rdpc selon la devise tous pour un et un pour tous. Ainsi nous nous partagerions le pays selon les zones d'influence de chaque parti. Nous battrons ensemble campagne pour chaque parti membre dans sa zone d'influence et vice versa ».

Depuis 1990 et l’avènement du multipartisme, alliances et regroupements ont toujours volé en éclats soit au lendemain des élections, soit avant. Le Sdf est toujours mis en cause : « il m'a semblé qu'un certain parti politique a souhaité ne pas y adhérer en estimant que les autres partis existant devaient simplement se fondre dans son parti et lui donner nos voix. Il n'a pas ouvert une autre porte alternative. Évidemment cela n'est pas acceptable », s’insurge Me Momo. « Le dialogue républicain avec le principal adversaire n'est pas condamnable mais depuis 1990 nous n'avons pas souvenance que ceux-là aient jamais manifesté de la bonne foi en une seule occasion. Il n'y a pas de raison que cela change, que des gens qui ont l'habitude de ruser pour surprendre le peuple en évoquant des problèmes de sémantiques changent subitement, surtout à la croisée des chemins où le régime peut tomber à tout moment. Il y a ceux qui ont choisi de quémander leur pain au régime pour avoir des parcelles de puissance et ceux qui veulent renverser le régime pour avoir toute la puissance de l'Etat pour l'instauration de la nouvelle République du Cameroun ».

Cela rappelle 2004 et la troisième élection présidentielle depuis le retour de notre pays au multipartisme en 1990. Autant de tentatives de regroupements et alliances soldées par l’échec. L’opposition semblait avoir tiré les leçons des échecs passés comme en 1992 ou 1997, où après avoir tenté de s’unir, les leaders n’étaient pas tombés d’accord sur qui porter le choix de leur représentation. Le Sdf  avait librement porté son choix sur Adamou Ndam Njoya, leader de l’UDC, afin de se donner plus de chances que jamais d’ébranler le pouvoir Rdpc.

Après la signature par ces deux partis de la « Déclaration commune de partis de l’opposition » par laquelle ces derniers s’engageaient entre autres à « présenter un candidat unique aux élections présidentielles de 2004 », les contacts se poursuivaient sous la houlette de l’Union Démocratique du Cameroun pour rallier d’autres partis à cette cause commune. Mais le revirement de dernière heure de Fru Ndi a tout fait basculer.

L’opposition camerounaise doit se ressaisir, tirer les leçons des échecs antérieurs et travailler à gagner les échéances prochaines en capitalisant les points forts de la présidentielle et en travaillant à la construction d’un système électoral fiable, dont il doit participer à sa construction et à sa mise en place. L’opposition et les forces du changement ont l’obligation de créer «un cadre de concertation pouvant leur permettre de régler des questions d'intérêt commun, de concevoir et de promouvoir des projets alternatifs crédibles, des approches politiques novatrices et efficaces, bref un cadre pour une véritable synergie d'associations et d'actions en vue de l'instauration d'un nouvel ordre politique et de l'alternance politique au Cameroun[1] » Le temps et l’argent qu’ils dépensent dans le contentieux est un temps dont ils regretteront l’usage au moment des décomptes des municipales et législatives 2013, voire des régionales et de la présidentielle à venir !

L’idéologie de la surenchère et de la mauvaise foi est un des traits saillants de la mentalité de la classe politique. L'incapacité à se remettre en cause et à évaluer de manière critique ses propres erreurs a conduit l’opposition camerounaise à n’être qu’une sorte de faire-valoir démocratique et de trublion sans poids ni mesure qui a du mal à inverser le rapport de forces.

Que veut donc l’opposition camerounaise ?

Tout d’abord, tout le monde se voit à la présidence à Cameroun. On a vu une inflation de prétendants au fauteuil présidentiel en 2011. «Les trois quarts de ces candidatures sont totalement farfelues. Cela fait partie de la stratégie du pouvoir pour émietter la concurrence et engager par la suite le ralliement, histoire de crédibiliser une élection dont les dés sont pipés d’avance. Quant à la prétendue liberté que prouverait le nombre de candidats, c’est de la fumisterie. Certaines personnalités semblent sérieuses mais ne disposent pas de l’appareil capable de mener campagne sur le terrain. Mais dans l’ensemble, l’opposition n’a jamais réussi à faire pression sur les points clés du scrutin comme la composition d’Elecam, ce qui laisse présager de conditions d’arbitrage non équitables.»

L’opposition est incapable de boycotter une élection dont ils savent bien que les dés sont pipés en avance, et pire, à ce jour aucun opposant camerounais n’ose dire à Paul Biya qu’il n’est plus le président légitime du Cameroun au regard de sa propre constitution qui plus est taillée sur mesure pour lui et rien que pour lui,  on se rend compte que c’est une opposition non seulement alimentaire, mais également une opposition qui ne sait pas ce qu’elle veut.

Voici une liste de travaux à réaliser absolument que nous propose Lembe Tiky, Enseignant de sciences politiques, University of Connecticut, USA:

  1. Nouer des relations d’amitié, sinon de familiarité, avec les forces de sécurité et de justice. Dans toute la chaine judiciaire et de l'Administration Territoriale, il faut développer des relations. Il y a une forte probabilité que les fonctionnaires de ces départements ministériels, les policiers et les gendarmes vous suivent, et ce pour trois raisons : (a) ce sont des êtres rationnels qui ont bien l’intention de survivre Paul Biya et qui par conséquent n’hésiteront pas à se mettre de votre coté le moment venu, si après calcul ils arrivent à la conclusion que c’est votre coté qui va assurer leur gari ; (b) policiers et gendarmes sont des Camerounais qui ont aussi à cœur de voir le pays mieux gouverné. Leur patriotisme n’est pas à remettre en cause, c’est le système qui a atomisé l’élan patriotique de beaucoup d’ente eux. (c) Ces Camerounais en uniforme sont après tout nos frères et sœurs, leur rappeler la fraternité qui nous uni et notre communauté de destin aura pour effet d’éliminer ou de réduire la brutalité dans l’application des ordres qu’ils recevront. La transition vous filera entre les doigts si vous continuez à traiter les forces de sécurité en ennemis. Faites-en des alliés ! Il y en a parmi eux des gens qui n’attendent que l’occasion de se désolidariser des pratiques du régime de monsieur Biya et de le laisser tomber comme une mangue pourrie. A vous de les identifier. Sans la désolidarisation de certains membres des forces de sécurité burkinabé, la Révolution aurait échouée. Leçon de choses !
  2. Formuler une communication au laser : vous devez avoir des messages ciblés qui répondent aux attentes de couchent particulières précises. Pour les besoins de la cause (transition) les couches prioritaires doivent être les « foot soldiers », ces populations qui ont un fort potentiel d’activisme le moment venu. L’objectif ici est de garder les Camerounais en état de veille, mobilises dans leur esprit. Il s’agit de préparer les esprits à l’avènement de la transition. Puisque vous avez au moins le luxe de participer aux débats radiophoniques et télévisuels, vous devez mettre à profit chacun de vos passages sur les ondes pour dire aux Camerounais ce que vous allez faire. À la télé comme à la radio, il va falloir trouver les mots justes pour parler directement aux policiers et gendarmes, des mots qui non seulement touchent leur affect, mais qui promettent aussi de meilleurs jours à leurs corporations, comme à tout le pays.
  3. Transformer les modérés du RDPC en réformateurs. Tous les cadres de ce parti ne sont pas pourris ; s’ils le sont tous, les degrés de putréfaction varient : certains sont moins infectés que d’autres. Trouvez-les ! Ils comprendront qu’ils ont intérêts à collaborer avec vous, le moment venu, pour assurer leur survie politique, et peut-être existentielle. La logique de cette collaboration potentielle est simple : quand le bateau commence à couler, les rats sautent. C’est une question de costs & benefits analysis, rationnelle donc. Ceux d’entre eux qui ne l’auront pas compris, ou qui sont trop mouillés dans les salissures du régime de monsieur Biya, couleront, apocalyptiquement. L’exemple burkinabé qui s’est déroulé sous nos yeux est un cas d’école en la matière : la démission en vrac des cadres du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) de Blaise Compaoré et leur alliance avec les ténors de l’opposition ont créé les conditions de l’alternance. Vous ne devez donc pas continuer à traiter tous les Rdépécistes d’agents irrécupérables du néocolonialisme ; il faut plutôt penser à ouvrir les portes du futur institutionnel du Cameroun à certains d’entre eux.
  4. Courtiser les chefs des missions diplomatiques et autres agents internationaux.  Les agents du système international doivent être rassurés et vous voir comme une alternative crédible, des gens avec qui ils peuvent travailler. Il faut absolument baisser le niveau de leurs incertitudes à votre égard. Vous savez bien de quoi ils sont capables pour la réussite ou l’échec des mouvements politiques. Toutes vos cartes ne doivent pas être abattues publiquement, à contre temps. Learn to play the game. Au serpent qu’on veut frapper, on ne montre pas le bâton.
  5. Utiliser les ressources de la diaspora. Il est certain que la plupart des Camerounais de l’extérieur, surtout ceux qui vivent dans les pays dits démocratiques, ont soif de transition politique dans leur pays. Ils ont les ressources financières et intellectuelles qu’ils ne demandent qu’à mettre a votre disposition, à condition qu’ils lisent engagement et sérieux dans vos intentions. De plus, certains d’entre eux ont leurs entrées dans les états-majors des partis au pouvoir dans leurs pays d’accueil et dans les institutions internationales; leurs carnets d’adresse peuvent servir de relai auprès d’éléments clés du système international dont vous aurez besoin.
  6. Enfin, la préparation de la transition exige de vous la formation de coalitions avec des plans A et B. L’isolement est un préréquis de l’échec ! L’action isolée d’un seul parti de l’opposition ne déclenchera et ne réussira pas la transition. Et celle-ci ne doit pas être l’apanage des seuls partis politiques. Le cas d’école burkinabé est révélateur sur ce chapitre : le « Mouvement Balai citoyen » de la société civile et été au front, en coordination avec les partis politiques pour déboulonner Compaoré. Et son fer de lance était la JEUNESSE. La coordination camerounaise, des partis politiques et des associations de la société civile, pour la transition doit se faire avec les jeunes citoyens camerounais dont le futur est plus que compromis ; elle doit avoir des agents identifiés et aux rôles définis qui savent quoi faire, quand, et dans quelles circonstances, en fonction des plan A et B. Au demeurant, n’attendez pas toujours que les évènements se créent, vous pouvez les créer ; cela fait partie des plans évoqués ici.

Si tous ces partis ne veulent pas préparer sérieusement la transition, moi je suis en train de le faire et malheureusement en solo puisque personne ne veut se regrouper.

© Correspondance de : Fabien Assigana, acteur sociopolitique

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