Cameroun,Agriculture:Douaniers et policiers corrompus brident les exportations
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Cameroun,Agriculture:Douaniers et policiers corrompus brident les exportations :: CAMEROON

Depuis les plantations du Moungo jusqu’aux pieds des avions, policiers et douaniers arnaquent régulièrement les exportateurs des fruits et légumes. Malgré les dénonciations auprès des autorités de la région.

« La police camerounaise est tellement impliquée dans la corruption ! Nous avons dénoncé ces cas de corruption jusque chez le gouverneur du Littoral. Mais dommage, les choses n’ont pas beaucoup bougé ». Jean Pierre Imelé est l’un des plus importants producteurs et exportateurs des fruits et légumes du Cameroun depuis plus de 10 ans. Presque toujours, les chauffeurs des camions transportant ses cargaisons de produits doivent soudoyer les policiers à différents postes de contrôle pour passer, depuis ses plantations dans la région du Moungo jusqu’au service fret de l’aéroport de Douala.

Les autres professionnels de la filière sont dans le même pétrin. Jean Marie Sop, lui, a sa plantation dans la localité de Loum, à quelques kilomètres de Mbanga. « A chaque départ avec des cargaisons préparées, il y a des frais qui sont payés sans reçu : les policiers prennent entre 10 000 et 20 000 Fcfa», regrette-t-il. Avant, poursuit-il, les producteurs apprêtaient des sacs d’ananas, de mangues ou d’autres fruits que les chauffeurs leur remettaient au passage. « Mais désormais, c’est l’argent qu’ils exigent ! Et des sommes de plus en plus élevées. Quand vous ne le faites pas, ils bloquent votre camion sur place». Et comme il s’agit des denrées périssables, « nous faisons une véritable course contre la montre, et donc nous sommes obligés de payer cet argent», reconnait-il, résigné.

Taxes imaginaires

Pour Florent Onguéné, président du Rhoticam (Réseau des horticulteurs du Cameroun), « Lors des contrôles routiers, il y a officiellement des documents que policiers et douaniers contrôlent. Mais chaque fois, ils créent des motifs pour nous obliger à payer des sommes injustifiées. Parfois ils ne vérifient même plus les dossiers de véhicules, ils nous obligent à payer 5 000 ou 10 000 FCFA». Une fois arrivé à l’aéroport, le calvaire continue. Jean Marie Sop : « A l’aéroport qui est notre principale base, il y a une première barrière à l’entrée. Régulièrement ils ont un tarif imaginaire qu’ils nous obligent à payer». L’arnaque continue au niveau de la douane, alors que le tarif douanier est régi par des textes réglementaires. « Nous sommes surpris par le fait que la police installée au niveau de la douane exige qu’à chaque passage on puisse payer un montant d’argent. Des sommes élevées qui, cumulées, nous empêchent d’être compétitifs sur le marché international», déplore Jean Marie Sop.

Amer, Jean Pierre Imelé évoque ces difficultés : « Moi je suis très en colère face à ce qu’ils font, surtout au niveau de l’aéroport ». Car, « Ils nous exigent de payer des taxes qui n’existent nulle part. Et lorsque vous refusez, ils vous intimident en empêchant votre marchandise d’embarquer avec les conséquences qui peuvent être graves. Les fruits mal conservés pourrissent». Il a subit un tel coup il n’y a pas très longtemps. Estimant que

c’en était trop, il a résisté et refusé de payer un pot de vin à un policier à l’aéroport de Douala. Ce dernier a riposté en bloquant la cargaison de mangues qu’il s’apprêtait à exporter vers l’Europe. «Notre association a saisi toute la hiérarchie, même le gouverneur pour dénoncer cela. Les journaux ont rendu compte de ce qui m’arrivait. Mais quelques mois après, les choses n’ont pas beaucoup changé ». Au fret de l’aéroport international de Douala, personne n’a accepté de réagir aux plaintes des exportateurs. Nous avons essuyé le même silence au niveau de la police de l’aéroport.

Douane et police corrompues

« Quand il y a monnayage, il s’agit de corruption, fait prévu et réprimé par le code pénal camerounais», explique Me Irène Ntetmen, avocate au barreau du Cameroun. Dans le cas du chef d’entreprise dont la cargaison de fruits a été bloquée à l’aéroport de Douala, Me Irène Ntetmen donne la démarche à suivre pour rentrer dans ses droits : « Si le monsieur qui est soumis au contrôle a refusé de payer un pot de vin et qu’on a saisi sa cargaison de fruits, il peut saisir le procureur de la République, avec ampliation au ministre des transports ou son délégué, pour dénoncer cet acte de corruption. Il fait constater cela par voie d’huissier, et saisit le tribunal en réparation. Une enquête sera ouverte et les personnes accusées de corruption seront punies ».

La douane et la police font partie des administrations les plus corrompues au Cameroun, selon les organismes nationaux et internationaux de lutte contre la corruption.

© JADE : Guy Modeste DZUDIE

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